Citations de Éric Dubois (104)
DELTA
Au delta des apparences tu cueilleras le fruit la substance pendant que la nuit fleurira
Ses douleurs sous-jacentes
Au delta tu plongeras ton abîme dans les cheveux du vent tu songeras à ces rues adjacentes ces places fortifiées ces repas pris en commun avec les loups
Tu diras aux bienheureux qui ignorent le goût du désastre que le fleuve avance toujours dans un seul sens sens de la vie vers le delta fédérateur
Tu leur parleras de moi de nous tu les encourageras à mieux encore dans le même sens vers le delta des apparences
Alors je partirai l’âme claire affronter d’autres climats
Affronter d’autres peuples affronter d’autres Moi
ECRIS POUR OUBLIER
A Paul Cash, Jules Dard
La conscience
Se fait
Vœu
Et pénètre
Les miroirs
Branche le micro
Si tu t’ensables
Bonnes vibrations
Interrogent
Les zombies
Et les filles sans visage
Répondent par des cendres
La conscience
Se fait vœu
Et confond
Les plaies
Oublie ton médiator
Si ton masque
Tombe
Et invoque le Marquis
Apprends à
Te perdre
A flotter
Dans l’absolu
Mets ton loup
Et conspire
Avec le vide
Prends un acide
Et arrache tes pansements
Ecris pour
Les orages
Ecris pour
Les symboles
Ecris pour
Transcender
Ecris pour
Lutter
Ecris pour
Trembler
Ecris pour
Etonner
Ecris pour
Oublier
LA VIE EST LUMINEUSE
Vanité
Vanité
Que frémir
Du même possible
La vie est lumineuse
La vie est belle
Rebelle
J’attends le printemps
Aurai-je le temps ?
A la sortie du garage
La rebouteuse fait l’aumône
De quelques viscères
Et tumeurs oniriques
Hier soir une fille sans visage
M’a dit que j’étais malade
A propos
Et vous ?
La vie est lumineuse
La vie est belle
Rebelle
Où est passée mon ordonnance ?
Vanité
Vanité
Que frémir
Du même possible
LES FLOTS BLEUS BLUES
On me dit
Que sept ans
Est l’âge de raison
L’âge de raison
L’âge de comprendre
Comprendre que
Ce sera fini
Entre la voie ferrée
Et la rue Barbusse
La rue du Viaduc
Et l’allée de la Voûte
1973
J’ai sept ans
Pourquoi vivre
De l’autre côté
De la voie ferrée
Dans le confort
Et la modernité
Ça dépasse
Mes compétences
Je préfère
Les chats errants
Et les habitués
Des Flots Bleus
C’est mon terrain de jeux
Alger Tunis Nouakchott
Des chants kabyles
Des chants habiles
Des jardinets
Des mélopées
Des transistors
Qui criaillent
Des grincements
De Teppaz
Et faire pipi
Au fond de la cour
Et le brouhaha
Des poules
Et le cri fat
Du coq
J’ai sept ans
Pourquoi vivre
De l’autre côté
LA LANDE
Il faut comprendre
Les candélabres
Les étoiles saintes
Les sacrifices
Les mots offrandes
Et repentirs
L’espoir affleure
La lande
Les soifs ne cessent
D’en finir
Il faut comprendre
Le sable le sabre
Les femmes peintes
En haut des cuisses
Le sombrero qui sombre
Les fugues à l’étude
L’exemplaire
La loi du nombre
Qui excède
Exulte exsude
Comprendre
Attendre
Surprendre
Suspendre
Les éclats les états
La redondance l’abondance
Les repos les repas
Le hasard qui se cherche
A tâtons
La traversée du miroir
Revêche
Sans rime ni saison
Sans rire ni raison
FORET
J’irai
Dans ta forêt
Profonde
Lécher
Tes plaies
Armer
Tes sentinelles
Protéger
La veuve et l’orphelin
J’irai
Ramer
Dans tes ramures
Faire chanter
Tes seins
Secouer
Les escarcelles
J’irai
Dans ta forêt
Profonde
Lécher
Tes plaies
ARBRE
A Jacques Décréau
Arbre de vie
Arbre aux ailes
Déployées
D’infini
Arbre aux tresses
De bronze
Je t’observe nu
Mort
Ici s’écrit le Temps
La Voie
Qui se dresse du nœud
De souffrance
A la branche maigre
De printemps oublié
Je sais que tu
Refleuriras
SOLEIL !
Dans un soupir
De vent et de chaleur
REVES PARASITES/CRIS GHETTOS
Dans mes
Rêves
Parasites
Il y a
Des trafiquants
D’orgasme
En plein
Marasme
Crash
Blues
Crash
Blues
Des poumons
Kleenex
Il y a
Des robots
Mutants
Qui musèlent
La muse
Pantelants
Pantalons
Il y a
Des moutons
Sanguinolents
Des poissons
Saucissons
Il y a
Monsieur Chien
Et Madame Chienne
Sabre au clair
Pas très clean
Pas très clairs
Qui habitent
L’abîme
Pas de rime
A urine
Pas de rime
A latrines
Urine
Usine
Latrines
Latines
Dans mes rêves
Parasites
Paraboliques
Architectoniques
Pleuvent
Des camés
Transistors
S’ébouriffent
Des lesbiennes
Comédiennes
Gémissent
Des alcooliques
Egocentriques
En odeur
De sainteté
S’échangent
Des propos
Contrits
Confits
Pas de parade
Que des riffs
Que des riffs
Que des rixes
Que des rixes
Poignards
Et Monsieur
Chien
N’aime plus
Madame Chienne
Ils ne vivent
Plus
Dans l’osmose
Apothéose
Et Monsieur
Chien
Boit
Et Madame
Chienne
Aboie
Tous aux abris
Tous aux abois
Parasites
Sinusite
Tilt
Blues
Tilt
Blues
Plus de
Sitting
Home
Que de coups
Dans le dos
Que des cris
Ghettos
GHETTOS
FREE JAZZ
A Pilote le Hot
Des filles soûles
Armées de panamas
Soleils
Panament à Paname
La douce
Quel panard !
Champipi champignon
Juché sur un tabouret
Un mutant muté là
Fonctionnaire fonctionnel
Arrose ses glandes sa glotte
De bourbon cul sec
Glou glou glou
Champipi champignon
Le magnétisme
On l’élève en vertu
Le magnétisme
De ces filles soûles
Est une pulsation électrique
Qui vous déchire le bas-ventre
Et vous tord la bite
Savent-elles que j’existe
Et que je n’ai pas la peste bubonique
J’ai pris ma tête
Et je l’ai posée là
Sur le comptoir
J’attends qu’on me masse
Le cerveau
J’attends
Champipi champignon
Peut-être bien
Que je la laisserai là
En souvenir
Ma tête
Pour l’instant
Je me clone sur le sofa
En buvant des cafés allongés
Et je taxe des billets
Pour le taxi
De demain matin
Champipi champignon
DOUTE DERIVE SEPARATION
A Marie-Isabelle P.
Je doute
M’épanche
Saigne
Dans la
Chambre
Eden
Enchaîne
Dis-je
A celle
Que j’aimais
Je doute
Pas de veine
Larsens
Jeu
Aveugle
Ferme
Les persiennes
Quels poux
Quelles teignes
Geignent
Au creux
De mon oreille ?
On se saborde
On déborde
L’ange miroir
S’est lézardé
Je doute
Que tu reviennes
Un jour
Je doute
De l’amour
L’horizon
S’est ensablé
Les questions
Macèrent
Mes mots butent
Contre la pierre
Chapeau
Le chapiteau
S’est envolé
Nos actes
Nos baisers
Nos secrets
Je doute
Que tu reviennes
Un jour
Je doute
De l’amour
Voici notre entretien. Autour d’un crème, pour moi, et pour Frédéric, un cocktail ( j’ai oublié le nom ) dont il raffole.
- Bonjour Frédéric !
- Bonjour.
- Comment allez-vous ?
- Je vais bien. Et vous ?
Un long silence.
- Bien aussi. Je vous ai fait venir, Frédéric, car j’ai le complexe de l’écrivain.
- ?
- La peur de la page blanche et le refus d’être visible.
- ?
- Et je suis un poète. Autrement dit, je suis un pigeon malade.
Laure est une chic fille, avec qui je partage une sexualité exacerbée, nous ne sommes pas officiellement amants, nous ne vivons pas ensemble. Aucun contrat entre nous, aucune histoire donc.
- Ah, tu me fais mal !
Je lui fais pourtant du bien. Elle n'est pas toujours de bonne humeur. Qu'importe ! Nous nous aimons. Comme c'est romantique et c'est à tomber ! Elle me tance afin que je trouve du travail, devienne un écrivain riche, célèbre et beau aussi comme Frédéric Beigbeder, avec qui je devrais prendre contact. Il y a aussi Thierry Ardisson, le mythique animateur télé.
- Quand ton roman sera écrit et publié, tu le lui présenteras !
Les Buttes Chaumont. 3 heures à épier l'ombre. Rien de tel pour émoustiller la mémoire défaillante. Henri parcourt de long en large le parc. Des rires fusent de Lunatic. Brahms ou Mozart. Les arbres enserrent Henri comme le font les chasseurs à leur victime sans qu'il se soit plié, aux circonstances, pour autant, mais … Des traces consumées pour peu qu'on y croie...
Sourire. Les rayons du soleil. On a mangé. Moi, je l'ai trouvée fatiguée. Catherine ne m'a pas semblé soucieuse ou inquiète, de prime abord. Il faisait beau. Tout pouvait repartir.
Il la connaissait. Je le savais, je l'ai toujours su. Il parle mais c'est faux. Du mauvais Boulevard .
Fatal.
Je l'ai déshabillée. Elle se laissait faire. J'ai tiré les rideaux. Un moment, j'ai cru qu'elle pleurait.
Moi, je la respectais. Je lui ai massé les seins. Elle m'a embrassé l'intérieur de la cuisse.
Mes seins ont durci.
Je regarde Catherine. Catherine couche avec cette fille.
Qu'est-ce que je fais avec une fille qui me traînera dans la boue, au moment le plus opportun, quand je ne m'y attendrai pas ? Henri se lève. Boire de l'eau. Elle est jolie, mais elle ne devrait pas s'aimer autant... Je lui dis qu'elle est jolie. Aussitôt, elle différente. Elle le montre. Elle joue à être agréable.
A se frayer un chemin dans votre esprit, insidieusement, à susciter une certaine forme de panique, tu flippes ? L'angoisse...Comment la dissiper ? Elle se nourrit de certitudes, vous emporte, vous conduit à Lunatic, nulle part, terminus.
Peu à peu, votre esprit est un terrain vague, lorsque la nuit tombe comme un couperet. Elle habite une chambre de bonne. Je ne couche pas chez elle. Je suis de passage. Pendant qu'elle tape sur son ordi, parce qu'elle travaille sans cesse, elle ne s'interrompt que pour me dire de débarrasser la table, vider les poubelles, surchargées d'immondices. Henri regarde les photos. Le mégot . On ne s'habitue jamais à cette aliénation de tous les instants, confortable, quand vous avez du fric, dangereux, autrement, jamais, c'est la faute à pas de chance.
Je lui donne à peine deux jours pour qu'il tombe amoureux de moi. J'étais sûre de lui faire de l'effet, de le provoquer. Grâce à mon body. Je suis pute, un peu pute. Va-t-il me donner de l'argent ? Ma copine me dit que c'est dangereux d'aguicher les mecs comme ça. Je lui ai dit que j'avais mes règles.
Il n'a pas bronché. Esquissé un sourire faux, extatique. Il était aussi stone que moi.
Il n'y a plus personne. On a dansé sur ça. Dansé. Cela ne te rappelle rien. Quoi ? On a dansé sur ça.Tu me draguais ET je ne te connaissais pas encore. J'essayais de te faire la cour. Rectification. Tes mains autour de ma nuque, j'ai craqué. Je veillais à ne pas trop te brusquer. Je n'attendais que ça, je ne demandais que ça. Alors, je t'inspirais plus que de la sympathie ? J'étais soûle. C'était où ? Chez Bertrand. L'été dernier. Comme la pub pour les préservatifs
Je n’ai toujours pas compris ce qu’il s’est passé cette fameuse nuit. Je regarde le plafond de ma chambre en espérant y trouver une réponse. Il y a quelques jours, je suis allé voir un médecin qui m’a dit que j’avais besoin de repos, et qui m’a donné quelques jours d’arrêt. J’ai dû rêver cette soirée d’étudiants ou alors on m’a drogué, on a pris mes clefs, on est entrés chez moi, et on m’a mis dans ce lit. Je n’ai pas vu Milena, et je ne m’explique pas son absence ni, pourquoi elle m’a invité. Hervé me dit que je suis en train de traverser une zone de turbulences, peut-être une dépression. Milena ne m’appelle pas, et je ne suis pas sûr qu’elle m’ait appelé un jour. Je doute même de son existence et de la véracité des faits. C’est une histoire littéraire, cinématographique, un roman, un film, où je perds pied. J’ai appelé Milena, ça sonnait occupé. Alors, je suis allé sur le Net, les réseaux sociaux, et j’ai cherché sur Facebook : Milena Moreau. J’ai trouvé quelques homonymes, dont certains mal renseignés, sans photo. J’ai essayé Linkedin, Twitter et Instagram, rien trouvé de concluant. J’ai rappelé Milena, elle m’a répondu.
Je me suis réveillé comme au sortir d’un mauvais rêve. J’ai marché dans la pénombre à la recherche du poste de télévision, en vain. Je n’ai pas ce genre d’appareil. J’ai juste un ordinateur portable. Mais alors, hier soir, que s’est-il passé réellement ? J’ai appelé Hervé, je lui ai posé plein de questions relatives à Milena Moreau, il m’a demandé si je n’étais pas fou, car, jamais, je ne lui avais parlé de cette jeune fille. J’ai écourté la conversation, et je suis sorti précipitamment, ma voisine de palier n’était pas une vieille dame avec son chien, mais un couple avec un enfant en bas âge.
Je dois bien admettre que je ne connais pas Milena et que je me fais des idées mais c’est plus fort que moi. Plus fort que ma vie d’assureur, de bureaucrate penché sur ses dossiers, le regard perdu dans le cadran de sa montre. Je fais appel de temps en temps, au service d’une prostituée, qui travaille chez elle, en toute discrétion, parfois pour quelques caresses bucco-génitales, parfois pour le grand jeu, quelques heures d’une nuit étrange parce que nous ne sommes pas des amants mais elle une pute et moi son client, elle s’appelle Samia et elle est maghrébine. Elle est beaucoup moins jeune que Milena, la quarantaine, et elle n’a pas ses états d’âme ni, les mêmes origines sociales. Il arrive qu’on parle plutôt que de baiser. Et ces quelques minutes qu’elle ne me facture pas m’apportent beaucoup, et peut-être davantage qu’une histoire d’amour imaginaire avec une étudiante qui peut-être ne pense plus à moi et m’oublie. Mais Milena demeure une obsession.