Roman de fantasy wuxia ou de fantasy art martial, le premier tome de L'art de la prophétie est le résultat d'une immersion profonde de la part de l'auteur et cascadeur
Wesley Chu dans le monde du cinéma d'art martial chinois fortement influencé par ce genre d'abord littéraire qu'est le Wuxia.
En effet, on ne peut s'empêcher à des oeuvres telles que Tigre et Dragons à la lecture de ce premier tome de fantasy d'inspiration chinoise qui enchaine les combats à coups de fluidité et de poésie technique, sur fond d'intrigue initiatique où s'entrecroisent quatre personnages autour d'une destinée épique et prophétique.
Personnellement, c'est la première fois que je lis un roman d'art martial, qui plus est dans le domaine de la fantasy et je sors revigoré de cette lecture qui possède de bonnes qualités descriptives autour de ces scènes de combats et de son univers fortement inspiré par la Chine antique et la Mongolie. L'art de la prophétie est une petite bouffée d'air frais dans le paysage de l'imaginaire qui mérite son attention même si premier tome souffre aussi d'un désquilibre quand à son ton , un peu trop alourdie par un humour qui ne fait pas tout le temps mouche et quelques petites longueurs tantôt prévisibles, tantôt superficielles.
Ainsi, si
Wesley Chu s'inpire de son expérience et de ses influences pour illustrer à merveilles des combats qui nous tiennent en haleine, il n'en est pas de même pour la construction de ces personnages et de l'intrigue principale. Un peu trop de ventre mou pour une trajectoire tout en ligne droite, la surabondance d'énergie narrative ne fait pas tout et ne transcende en rien ce premier tome de cette série qui ne se démarquera pas sans doute autant d'autres titres d'une tout autre envergue.
On commence par des personnages attachants mais quand bien même limités par leurs étiquettes à commencer par le héros de la prophétie qui, malgré une petite évolution, ne se départit pas vraiment de son arrogance et de son manque d'expérience. Son mentor, sorte d'avatar de Michelle Yeoh , est décisif et stylé mais intervient un peu trop comme un deus es machina redonnant un coup de pouce à l'intrigue par moment et souffre d'un arc narratif pas forcément utile
( par exemple, je n'ai toujours pas compris la finalité de la venue de Taishi dans le temple originel où nous n'apprenons pas grand chose de plus...) .
Qisami, la tueuse ambitieuse, n'est qu'une figure de violence destinée à faire sourire le lecteur par son humour noir beaucoup trop présent. le seul antagoniste véritablement interessant de cette chanson de geste asiatique demeure Sali, celle qui constate la chute de son peuple et qui est tiraillée par les enjeux de la prophétie et la sauvegarde de ses proches....
Comme souvent, avec les romans étalant plusieurs points de vue, il faut adopter un bon équilibre entre les différents arcs afin d'éviter quelques longueurs et superficialités. Là aussi,
Wesley Chu n'évite pas les eccueils et quelques arcs sont trop disséminés pour devenir vraiment passionnant...
Il est regretable par exemple que l'auteur ne recentre pas un peu plus son récit autour de la figure du héros de la prophétie dont le chemin parcouru dans ce premier tome reste très mince, ce qui est tout de même dommage pour un beau roman de 600 pages !
Dans les dernières parties, l'écrivain se rattrape toutefois en réunissant les personnages principaux dans une même cité ce qui donne encore plus d'énergie à la lecture et donne de bons passages de confrontations entre certains personnages-clés.
Encore une fois, c'est l'une des principales qualités de ce roman : savoir adapter de l'action tout droit sortie des films d'arts martiaux dans des passages effiaces traités avec une prose tout en fludiité. On notera le nom donné à certaines techniques qui animent les combats et qui donne un joli grain poétique aux scènes de combats.
Indéniablement,
Wesley Chu est un bon artisan de la castagne mais il manque à cette série une piste narrative plus sérieuse, plus recentrée et plus complète pour satisfaire pleinement le lectorat.
Dans tout les cas, je conseille vivement ce titre à tous les amateurs de ce noble art qu'est le Wuxia, notamment pour tous ceux qui sont friands de films d'art martiaux asiatiques dont cet Art de la prophétié demeure un efficace reflet littéraire.