Dès l'abord, on ne prit pas Corot au sérieux comme peintre; on l'aimait pour sa bonhomie, son humeur [toujours sereine, ses chansons qu'il lançait à pleine voix, une belle voix de ténor, s'il vous plaît, qu'il maniait fort agréablement, et pour laquelle il avait un tantinet de fierté ; souvent aussi on le raillait, Aligny tout le premier, et si Corot supportait gaiement la raillerie, il se trouvait désarmé pour y répondre.
C'est qu'il était alors tout entier à la nature; le reste, les hommes ne lui étaient rien. Il s'en allait tout seul, dès l'aube, sa boîte de couleurs sous le bras, un couplet sentimental aux lèvres, il s'en allait cherchant les coins déserts où, parmi des ruines, la végétation fût luxuriante et féconde. Une fois le coin trouvé, il s'installait ; les ruines exigeaient de lui un dessin précis, un dessin architectural, et il les dessinait avec une sûreté d'architecte ; puis la nature sollicitait le peintre, et dans l'étude achevée on découvrait toute la mélancolie des civilisations disparues baignées d'ombre et de parfum sous le baiser de lierres grimpants, au milieu des buissons fleuris, où la bise qui passe met ses mystérieux frissonnements.
Il y a bien des façons, pour un artiste, de saisir et de rendre la beauté féminine, depuis les proportions et le cadre de l'épopée, jusqu'à ceux de l'élégie et même de l'épigramme. Fragonard est au premier rang des virtuoses qui ont splendidement traité, varié, ce thème éternel. Il a su, dans cet exercice triomphant de son pinceau, unir, suivant les données d'une formule complexe, la langueur amoureuse et la séduction lascive, sans omettre, quelquefois, une pointe d'insinuante licence, le parfum capiteux, un peu trouble, de la tentation et du désir.
Une seconde question préliminaire plus importante est celle de savoir si Philippe et Jean-Baptiste de Champaigne appartiennent à l'école flamande ou à l'école française. Tous deux sont nés à Bruxelles et ont appris de maîtres flamands les premiers éléments de leur art; mais tous deux ont quitté leur pays natal de fort bonne heure ; tous deux ont vécu en France, ont épousé des Françaises et sont morts à Paris.