TROIS
J’erre, dévoyée, adultère,
j’oublie la langue de mes aïeux,
je ne me connais plus et t’oublie,
visage familier, visage ami.
Je ne sais plus
que boire ni que manger,
où aller où me rendre.
Ces fleurs bleues ont bu toute l’eau.
Aide-moi, mon cœur !
Viens au secours de ta sœur mortelle,
aide-moi à prendre mon envol
à me remettre
au gré du vent, au gré du vrai,
au bleu du ciel, au vert.
/ Traduit du russe par Irène Imart
L’étreinte de la rivière
1
Nous n’avons ni temps
ni lieu moins
des lambeaux
des fragments
des syllabes seulement
volent
de partout vers le fleuve
vent chargé de détritus
courant à rebours
à minuit
et se dressent
comme vivants
L’étreinte de la rivière
3
Chante
simplement chante
nul besoin de mots
simple poussière
dont le sens
encore une fois
se défait
L’étreinte de la rivière
2
qui a les clés ?
somnolence
oubli
dans les ténèbres
mouvantes
faussement vivifiantes
à pleines gorgées inassouvies
de l’eau froide
dans le creux des mains
L’étreinte de la rivière
6
lèvres maquillées
là où elle s’abritait
palpitait
vivait
c’est le vide
à présent