Hatem Nafti se révèle être un guide éclairé et sûr pour tenter de nous faire comprendre l'état actuel de la Tunisie et les motivations et prétentions du plus énigmatique de ses présidents Kaïs Saïed.
Après avoir dressé l'historique d'une décennie de tourments sociaux et politiques ayant abouti à une totale impasse de gouvernance, l'auteur aborde sans concession les rouages d'un système commandé par le seul maître de Carthage.
Après la Révolution de 2011, le pays semblait condamné à s'entredéchirer, victime après l'éviction du président dictateur Ben Ali du multipartisme et de l'opportunisme d'une classe politique qui n'aspirait qu'au poste présidentiel sans réel planification économique et sociale.
Le parti islamiste a su tirer avantage d'une situation pourrissante qu'il a bien souvent organisée. Il est craint par l'élite intellectuel du pays, soutenu par les plus démunis.
A cela s'ajoutait, la dépendance énergétique, la fonte du tourisme de masse principalement européen effrayé par une série d'attentats, l'instabilité sociale, la désindustrialisation, la corruption et l'intolérance religieuse qui ont fait passer une des économies les plus compétitive d'Afrique (selon la banque mondiale) à un pays en faillite.
Cette situation a abouti à la prise d'un pouvoir quasi intégrale en juillet 2021 par le président Saïed.
Désormais « Tout ce qui ne relève pas du président Kaïs Saïed à titre principal relève du président à titre subsidiaire » souligne avec malice M'Rad dans son ouvrage « Les dérives contraires en Tunisie ».
Hatem Nafti analyse finement ces dérives successives et toute l'ambiguïté d'une hyperprésidence qui si elle se veut éclairée ne relève pas le pays de ses lourdes difficultés.
A celles-ci s'ajoute aujourd'hui, une crise migratoire qui n'était pas encore perçue dans toute son ampleur.
Un grand merci à Babelio et aux Éditions Riveneuve pour cet essai remarquable.