Lorsque la flamme fut arrivée au point
où mon guide jugea qu’il était temps et lieu,
je l’entendis parler en cette forme :
« Ô vous qui êtes deux dans un seul feu,
si j’ai mérité de vous dans ma vie,
si j’ai mérité de vous peu ou prou,
quand j’écrivis mes hauts vers dans le monde,
ne partez point : que l’un de vous me dise
où, se perdant lui-même, il est allé mourir. »
(Enfer - Chant XXVI - V 76-84 - traduction Jacqueline Risset)
qui donc est dans ce feu si fourchu à sa pointe
qu’on dirait qu’il jaillit du bûcher
où furent mis Étéocle et son frère ? »
« Là-dedans », me dit-il, « endurent leur tourment
Ulysse et Diomède ; ainsi ils vont ensemble
au châtiment comme ils allaient à la colère ;
et dans leur flamme ils pleurent
la ruse du cheval qui ouvrit la porte
par où sortit la noble semence des Romains.
Ils y pleurent la ruse qui fit que morte
Deidamie se plaint encore d’Achille,
et y expient le vol du Palladium. »
(Enfer - Chant XXVI - V 52-63 - traduction Jacqueline Risset)
Nul tonneau, fuyant par la barre ou les douves, n’est aussi troué qu’un damné que je vis, fendu du menton jusque là d’où les vents s’échappent. Entre les jambes pendaient les boyaux : à découvert était la courée, et le dégoûtant sac où en excréments se transforme ce qu’on mange.
Tandis que sur lui je tenais mes yeux fixés, il me regarda, et avec la main s’ouvrit la poitrine, disant : « Vois comme je me déchire. Vois comme dépecé est Mahomet : devant moi Ali va pleurant, le visage fendu du menton jusqu’à la chevelure. Tous ceux qu’ici tu vois furent, de leur vivant, des semeurs de scandale et de schismes ; et pour cela sont-ils fendus de la sorte.
Un- ange apparaît aux
deux voyageurs.
Je voyais s'avancer la belle créature
Avec sa robe blanche et sa blanche ceinture,
Le front plein de lumière, et dans l'azur lointain
Tremblotant comme fait l'étoile du matin.
Au milieu du chemin de notre vie, ayant perdu la droite voie, je me trouvai dans une forêt obscure.
La Divine Comédie est le poème de l’humanité entière, l’épopée de l’histoire de la chrétienté et de la civilisation romaine ; elle est la parabole de la damnation et du salut, le voyage d’un homme, Dante, à travers l’Enfer, le Purgatoire, le Paradis, mais aussi la pérégrination biblique du peuple de Dieu, de l’esclavage du péché à la gloire éternelle. Tout est présent, dans un immense théâtre où les gestes infimes et les plus héroïques, les flammes et les étoiles sont convoqués, la parole d’amour et les cris du désespoir s’unissent : l’homme y est tout entier.
Carlo OSSOLA
La chair des mortels est si faible que, sur la terre, bon commencement ne dure pas plus de temps qu'il n'en faut à un chêne qui vient de naître pour porter des glands.
Nel mezzo del cammin di nostra vita mi ritrovai per una selva oscura
Ainsi que dans un cauchemar
On veut s'assurer que l'on rêve
Pour dissiper son illusion.
Ah que justice et piété vous allège, et que vous puissiez bientôt dresser les ailes, que vous élèveront selon votre désir.
II, XI
Quand on entend ou qu'on voit une chose qui attire l'âme très fort à soi, le temps s'en va sans qu'on le voie, car autre est la puissance qui le perçoit, autre est celle qui tient l'âme tout entière : la première est liée, la deuxième libre.
(Le Purgatoire, chant IV)