Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage. le titre, magnifique,poétique, évocateur, invite à la lecture. Un proverbe italien dit l'oiseau en cage ne chante pas par amour mais de rage. Ni voit-on pas une allégorie de l'afro-américain qui se voit entouré d'un monde auquel il n'a pas accès, d'une liberté qui lui est refusée et qui chante sa détresse et son espoir, son blues et le gospel. Cette oeuvre est un récit autobiographique des origines, de ce qui a probablement fait de
Maya Angelou ce qu'elle fut : une artiste douée, aux multiples facettes, une activiste des droits civiques, une source d'inspiration pour sa communauté, pour les générations qui ont suivi et à venir, un témoin privilégié de son temps. Elle naît à Saint-Louis. Son père se donne des grands airs, sa mère, à la peau claire est d'une extrême beauté. Ses parents vivant en Californie se séparant, on l'envoie, elle et son frère, chez la grand mère paternelle, qui tient une petite épicerie avec son fils infirme, en Arkansas. C'est une femme de tête, respectée et crainte, très pieuse, qui éduque ces enfants selon des principes rigoristes. La religion est un exutoire, on chante, on crie, on invoque le seigneur, on connait la transe mais on ne se révolte pas contre sa condition, on remet toute son espérance en un au-delà hypothétique. Puis sa mère les reprends dans sa ville natale, Saint-Louis où elle connaîtra le pire. Retour dans le sud, où il ne fait pas bon pour un noir d'emprunter les chemins écartés la nuit tombée, où le Klan perpétue des expéditions punitives sous prétexte qu'un noir a osé touché une blanche. Puis c'est la Californie où elle fait l'expérience d'une liberté relative, d'un racisme plus insidieux, qui ne dit pas son nom.
Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage est un témoignage émouvant; le rire côtoie la peine.
Maya Angelou se livre sans détour, simplement, humainement. L'oeuvre est précieuse et inspirante, elle dépasse les différences. Elle se place parmi les oeuvres les plus belles et les plus marquantes traitant de la condition des noirs.