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Citations sur Blanche ou l'oubli (6)

Inutile de fuir la douleur, elle habite le vent, elle habite la nuit. Inutile d'inventer pour la fuir encore des histoires, des pays, des saisons, des personnages mis ensemble. Des phrases. Des conjonctions de clameurs.[...]
Ah, toute la place de penser n'est qu'une grande plaie où je m'ouvre. Il n'est parole ni parfum que de blessure. Je suis le blé où souffle son vent, Blanche. Qu'est ce que c'est que ce petit moment blême où je m'égare ? Blanche, ainsi s'appelle ce pays sans limite d'être meurtri. Blanche, seule, vers qui toujours vivre en vain me ramène. Et ce sont les abords de l'enfer où ne me sont donnés les pouvoirs intermittents d'Orphée.
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𝘕𝘰𝘶𝘴 𝘯𝘦 𝘴𝘰𝘮𝘮𝘦𝘴 𝘳𝘪𝘦𝘯 ; 𝘤𝘦 𝘲𝘶𝘦 𝘯𝘰𝘶𝘴 𝘤𝘩𝘦𝘳𝘤𝘩𝘰𝘯𝘴, 𝘦𝘴𝘵 𝘵𝘰𝘶𝘵... Cette phrase me hante depuis combien d'années ? Etrangement, c'est à Java que j'ai lu 𝘏𝘺𝘱𝘦́𝘳𝘪𝘰𝘯.

Il n'y a autour de moi que la foule des autres. Celle qu'on voit le dimanche. Cette immense fatigue humaine. Pourquoi Dieu m'adresserait-elle la parole?
J'ai brutalement, un jour, renoncé, comme à des bagues jetées à l'eau, aux êtres de mon imagination. J'avais de ces invités qui ne s'en vont plus une lassitude infinie. J'avais assez de leur voix de tête, de leurs fous rires, de leurs disputes, de leurs confidences, de leur hystérie, de leurs exigences, tout, tout, le désordre, les assiettes sales, les mégots par terre, les arrière-pensées, les questions à brûle-pourpoint, les insinuations, j'avais assez de ce carnaval, ses confettis, ses masques. Un jour, un beau jour. On dit comme ça, un 𝘣𝘦𝘢𝘶 jour, ça n'a pas de rapport avec la douceur de l'air, cette beauté là. On meurt un beau jour, un beau jour la femme qu'on aime vous quitte. Beauté d'ironie ou de rien penser. 𝘜𝘯 𝘣𝘦𝘢𝘶 𝘫𝘰𝘶𝘳, j'ai dit, cela vous échappe, et donc 𝘶𝘯 𝘣𝘦𝘢𝘶 𝘫𝘰𝘶𝘳 s'il faut qu'il le fût.
La vie, après ce beau jour-là, m'était, semble-t-il, un seul long jour férié, personne sur l'éphéméride ni dîners ni 𝑑𝑎𝑡𝑒𝑠 avec quelqu'un, comme disent les Anglais, ce peuple d'exactitude, qui écrit sur un carnet son avenir.
J'avais congédié ma mémoire, et je me disais je laverai les assiettes un autre jour. Ainsi s'empilent les souvenirs qu'on ne se souvient plus de rien. L'encre pâlit sur les vieilles enveloppes. Les signes qu'on vous fit n'ont plus de sens.
Il n'y a même pas d'ange avec qui lutter.
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Elle m'explique : "Je suis resté très longtemps à t'attendre, Geoff', il faut comprendre. Le comprendre. Cette maison noire... nous deux ..." De quoi parle-t-elle ? De qui ? Le klaxon a encore appelé, au dehors. Je pourrais demander, qui est-ce ? Je pourrais dire, ne t'en vas pas sans m'avoir... Blanche dit : "Tu l'entends, tu l'entends ? Il s'impatiente. Il a dû tourner toute la soirée comme un fou dans les montagnes. Je le connais. Il est vraiment capable de toutes les folies..." Je la regarde. Elle n'est plus jeune, c'est à dire si on compare avec la mémoire... mais si on la compare avec l'oubli... Un visage lisse encore. Voilà la différence : autrefois, je n'aurais jamais pensé 𝘦𝘯𝘤𝘰𝘳𝘦. Qu'est-ce qu'il y a donc dans ses yeux, les mêmes ? Comme un regret ou une peur, je ne sais. Les deux, probable. Mais ce n'est pas de moi qu'elle a peur. Plus de moi. Ni pour moi. Je dis : "Alors, nous allons nous quitter comme ça ?"  Elle a eu un geste inattendu, levé ce bras nu, ce bras d'enfant, toujours, dont j'ai le souffle coupé. Elle a porté sa main à sa tête. Qu'est-ce qu'elle fait ? Elle a arraché ce voile blond, elle passe les doigts dans les cheveux qui se défont. J'ai vu. Mon Dieu, mon Dieu. Est-ce possible ? C'est terrible, comme ça tout d'un coup. Mais jamais elle n'a été plus belle, cela lui donne une autre douceur du visage que la dureté des cheveux noirs et lourds... Elle dit : "Tu as des ciseaux..." et ce n'est pas une question. Je ne comprends pas. Alors elle les prend elle-même.
...𝘌𝘭𝘭𝘦 𝘥𝘦́𝘧𝘪𝘵 𝘴𝘰𝘯 𝘱𝘦𝘪𝘨𝘯𝘦 ; 𝘵𝘰𝘶𝘴 𝘴𝘦𝘴 𝘤𝘩𝘦𝘷𝘦𝘶𝘹 𝘣𝘭𝘢𝘯𝘤𝘴 𝘵𝘰𝘮𝘣𝘦̀𝘳𝘦𝘯𝘵. 𝘌𝘭𝘭𝘦 𝘴'𝘦𝘯 𝘤𝘰𝘶𝘱𝘢, 𝘣𝘳𝘶𝘵𝘢𝘭𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵, 𝘢̀ 𝘭𝘢 𝘳𝘢𝘤𝘪𝘯𝘦, 𝘶𝘯𝘦 𝘭𝘰𝘯𝘨𝘶𝘦 𝘮𝘦̀𝘤𝘩𝘦. - 𝘎𝘢𝘳𝘥𝘦𝘻-𝘭𝘦𝘴 ! 𝘢𝘥𝘪𝘦𝘶 !
C'est incroyable, parfaitement insensé dans un moment pareil, de ne pas pouvoir faire autrement que de penser à Frédéric Moreau, à Mme Arnoux. "Non, - dit Blanche -, ne m'accompagne pas, Geoff', c'est un fou, tu sais... et il a si longtemps attendu..."
𝘘𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘦𝘭𝘭𝘦 𝘧𝘶𝘵 𝘴𝘰𝘳𝘵𝘪𝘦, 𝘍𝘳𝘦́𝘥𝘦́𝘳𝘪𝘤 𝘰𝘶𝘷𝘳𝘪𝘵 𝘴𝘢 𝘧𝘦𝘯𝘦̂𝘵𝘳𝘦 𝘔𝘮𝘦 𝘈𝘳𝘯𝘰𝘶𝘹 𝘴𝘶𝘳 𝘭𝘦 𝘵𝘳𝘰𝘵𝘵𝘰𝘪𝘳 𝘧𝘪𝘵 𝘴𝘪𝘨𝘯𝘦 𝘥'𝘢𝘷𝘢𝘯𝘤𝘦𝘳 𝘢̀ 𝘶𝘯 𝘧𝘪𝘢𝘤𝘳𝘦 𝘲𝘶𝘪 𝘱𝘢𝘴𝘴𝘢𝘪𝘵...
Je n'ai pas reconduit Blanche à la porte, je n'ai pas soulevé le rideau de la fenêtre. Je ne lui avais pas demandé, quand elle a dit 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘶𝘯 𝘧𝘰𝘶 : "Et tu l'aimes?" Il n'y avait pas besoin. La voiture là-bas démarrait avec une brutalité de fauve. Je ne suis pas si sourd. D'où j'étais, d'ailleurs, dans la pièce, j'ai vu tourner les phares. Et je me suis caché les yeux dans les mains, pour ne plus voir que l'oubli. Les cendres chaudes de l'oubli.
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« La lecture d’un roman jette sur la vie une lumière. »
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Les guerres en Asie ou en Afrique ? Vraiment pas intéressant. D'abord les gens ne parlent plus que de ça. Et pour ce qu'on y comprend. On les gagne sans arrêt, ces guerres-là, et un beau jour voilà qu'on les a perdues. Tandis qu'une guerre chez soi, c'est comme le pot-au-feu, ça a le goût de ce qu'on met dedans.
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Blanche n'est plus présente mais elle revit à travers le jeune personnage de Marie-Noire, personnage de papier né sous la plume de Louis Aragon.
Blanche, allégorie de la femme aimée au passé et aussi de la mémoire, tandis que Marie-Noire semble évoquer l'écueil du solipsisme et du présent narratif.
L'auteur semble aussi se muter en un protagoniste à la quête de lui même au sein de ce roman d'anticipation : il dévoile la psychologie de son sujet grâce à des personnages sublimes en échos et une trame narrative attractive ; le clivage de la jeunesse fougueuse en proie à la vitesse du rythme de vie ciblè sur leur présent en contraste aux personnages qui font tomber les masques de la nostalgie mélancolique en proie à leurs émotions vécues ou à venir, au ralenti de leur maturité et de leur conscience mature et plus réfléchie sur le sens de la vie et des liens humains.
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