Lu dans le cadre de ma première année de LM, ce gros roman écrit en 1938 et 1939, débute à la Belle Époque, en 1897, - l'histoire s'ouvre sur l'Exposition Universelle de Paris (1889) - et nous emmène jusqu'à la Première Guerre mondiale.
On suit les pérégrinations du protagoniste principal, Pierre Mercadier, professeur d'histoire et de géographie dans l'enseignement secondaire. Un portrait d'homme assez banal, coincé dans sa vie professionnelle et sa vie privée (il est mariée à Paulette, une jolie sotte) qui décide un beau jour de larguer les amarres, frustré de ne pouvoir entreprendre certaines choses (cela fait des années qu'il écrit un livre sur le financier Law).
C'est véritablement un homme qui m'a paru antipathique. Pourtant, le regard qu'il porte sur sa vie m'avait plu : il n'aime plus sa femme dont la sottise lui porte sur les nerfs, il joue en Bourse, perd de l'argent, considère sa famille comme un fardeau. Tout lui pèse et l'ennuie (à commencer par son métier) et sa brève aventure extra-conjugale ne lui apporte qu'une grosse déception. le genre d'événements qui amènent un individu à songer au vide et à l'inutilité de sa vie.
Voilà donc notre anti-héros qui devient rapidement cynique et indifférent jusqu'au jour où il décide de vendre ses actions et de partir au loin, abandonnant du même coup ses enfants.
C'est à partir de ce moment que Mercadier a commencé à m'agacer sérieusement. La mésaventure qui lui arrive à Venise, avec une jeune femme, le rend pathétique et grotesque. de même, sa brève histoire d'amour avec Reine Bercy (maîtresse d'un diplomate allemand)
Pire encore. Après cette liaison qui se termine mal, Mercadier s'exile en Egypte, avant de revenir à nouveau à Paris., en 1908 où il retrouve par un ancien collègue professeur, un juif nommé George Meyer. Ce dernier et sa femme, émus par la situation de Pierre, lui offrent l'hospitalité et un job.
Il faut dire que Mercadier n'avait pas cessé de fréquenter Meyer, même au plus fort des remous causés par l'affaire Dreyfus, ce qui lui a valu la reconnaissance de son infortuné collègue.
Le roman est construit selon les étapes de la vie de Mercadier. D'abord sa vie conjugale et son emploi de prof, puis la fuite à l'étranger, et le retour peu glorieux en France où le lecteur a l'impression de ne plus avoir affaire au même personnage. Quand j'ai entamé la partie sur le café-bordel Les Hirondelles, j'ai même douté que le client régulier qui fait la conversation à Madame Dora, la patronne, était bien Mercadier ! Ce dernier y passe en effet ses après-midis pour fuir (et oui, encore !) la vie étriquée dans l'appartement des Meyer.
Dans cette seconde partie, on suit également la destinée du fils de Pierre, Pascal que l'on croise alors qu'il est petit garçon. Ce sont d'ailleurs les passages que j'ai préférés, ces vacances au château familial, où les belles descriptions de la nature allègent considérablement le roman. C'est finalement une saga familiale où l'écrivain excelle, dans ces portraits peu flatteurs et si réalistes (la belle-mère de Pierre Mercadier, quel phénomène...).
Mais ici, point de tendresse, de nostalgie, de poésie. Tout respire la médiocrité, la banalité. Ces petites vies étriquées ont fini par me lasser, cet égoïsme forcené de Mercadier, cette solitude qui suinte de chacun des personnages... L'amour, la générosité, le courage ne sont que des illusions.
Mercadier fuit une vie qu'il juge sans intérêt, redoute, comme la plupart d'entre nous, la mort, la vieillesse, la solitude, mais sans rien faire pour changer un tant soit peu sa condition. Un peu déprimant tout ça, non ?
Ce n'est pas un roman que j'aurai choisi, je veux dire vraiment choisi de lire, par goût. Aussi, d'une certaine façon, et bien que je n'ai pas été emballée plus que ça, je suis contente de l'avoir eu au programme, cela me force un peu à sortir de mes lectures habituelles (voui, je sais, il n'y a pas que
Jane Austen ou le Nature Writing dans la vie...).
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