Ils se connaissaient depuis à peine quelques heures et, déjà, usaient de leurs prénoms. Fallait-il n'y voir que l'apanage de leur jeunesse qui les poussait à une rapide familiarité, ou chercher ailleurs les motifs de ce rapprochement ? Dans une affection instinctive, par exemple? Un sentiment encore mal formulé qui faisait que, déjà, Anne et Marc respiraient à l'unisson ?
Le cœur de la jeune fille était meurtri, blessé comme il aurait pu l'être après un violent chagrin d'amour. Mais au fait, qu'était-ce, sinon un chagrin d'amour justement? Un amour pas encore clairement déclaré, du moins en paroles, mais qui avait empli sa vie avec la soudaineté d'un orage
Certes, cette femme étrange avait vécu toute sa vie comme une amazone, une aventurière incapable de fidélité ou d'amour vrai, mais il n'en demeurait pas moins qu'elle était sa mère, celle qui lui avait donné le jour. Pour cela, Marc n'admettait pas qu'on lui manquât de respect.
Il était certain que cet homme, une dizaine d'années auparavant, avait dû avoir un succès fou auprès des femmes. Son cynisme était fascinant et son sourire plein de grâce.
Marc rit franchement, et Anne sentit tout le bonheur qu'elle pourrait connaître auprès de cet homme, en une prémonition fulgurante qui est l'apanage des êtres sensibles.