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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Miss Anna Estcourt est une jeune anglaise qui vit en parente pauvre chez son frère et sa riche belle-soeur. Elle a déjà vingt-cinq ans et un chagrin d'amour sur le coeur. Elle sent de plus qu'elle ne renoncera pas à son indépendance pour la domination d'un mari et elle ne croit plus vraiment en l'amour, chat échaudé craint l'eau froide.

C'est pourquoi, alors que son destin prend un virage à 180° quand son oncle allemand meurt en lui léguant une confortable rente et un domaine, décide-t-elle de quitter l'Angleterre pour s'installer sur le continent, malgré son allemand balbutiant. Elle découvre une autre culture, d'autres us, d'autres traditions et elle a une brusque révélation : il lui faut redonner tout son éclat au manoir qui est désormais sien pour y accueillir une douzaine de "dames de bonne famille ayant été éprouvées par la vie et n'ayant pas de foyer". Commence alors une aventure avant-gardiste qui est loin de faire l'unanimité dans son entourage. Régisseur, pasteur, domestiques, femme de charges, gentlemen-farmers du voisinage, et... les pensionnaires elles-mêmes !

Je ne connaissais pas l'oeuvre d'Elizabeth von Arnim mais elle piquait ma curiosité depuis un moment, au même titre que toutes les femmes de lettres du XIXème siècle. La plume est belle, conforme à l'académisme de l'époque. La structure du roman n'est pas sans rappeler les soeurs Brontë ou encore Thomas Hardy. Mais, surtout, ce qui est remarquable avec "La bienfaitrice" publié en 1901 en feuilleton, c'est la modernité du sujet.

A cette époque - pas si lointaine -, une jeune femme de vingt-cinq ans sans fortune et qui n'est pas mariée est pour ainsi dire mise au banc de la société mondaine, et catégorisée parmi les vieilles filles. Or, l'auteure se propose de faire d'Anna une figure indépendante, qui agit avec décision et autonomie, recherchant la compagnie des femmes, non celle des hommes. Certes, pas dans un but charnel mais pour secourir celles qu'elle nomme ses "soeurs" car elle voit en elles la détresse à laquelle elle a échappé en héritant ; en les sauvant, c'est elle-même qu'elle sauve par procuration. de même, bien qu'elle soit dotée de beaucoup de dons dont la beauté, Anna Estcourt n'est pas une âme romantique qui s'amourache du premier venu. Par bien des aspects, elle m'a rappelée Bathsheba Everdene, l'inoubliable héroïne de "Loin de la foule déchaînée". J'ai vraiment aimé cette héroïne.

L'idée de créer une communauté laïque offrant refuge et asile à la façon phalanstère avec l'espoir de construire un cadre de vie harmonieux témoigne à mon sens d'une évolution des mentalités en cette Belle-Epoque charnière pour la condition des femmes. Alors, même si Elizabeth von Arnim n'était pas une suffragette, j'ai apprécié cet angle narratif, d'autant plus que le roman a été écrit alors que son mari et elle venaient de s'établir en Poméranie - où se déroule "La bienfaitrice" - au domaine familial. J'ai goûté cette note d'inspiration autobiographique dans le contexte.


Challenge PLUMES FEMININES 2022
Challenge MULTI-DEFIS 2022
Challenge COEUR d'ARTICHAUT 2022
Challenge SOLIDAIRE 2022
Challenge XIXème siècle 2022
Challenge XXème siècle 2022
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Bien que fort jolie, Anna n'a guère l'insouciance habituelle de son âge pour profiter de la vie. La fortune familiale n'est qu'un vague souvenir, ne demeure que le nom, témoin unique de sa bonne naissance. Elle vit chez son frère, à ses dépens, enfin plus précisément aux dépens de sa belle-soeur Susie qui détient la fortune du ménage.
Anna songe à son indépendance, sa belle-soeur lui serinant amèrement le fait qu'elle lui soit redevable pour tout. Plutôt qu'aspirer au mariage, contrecarrant ainsi tous les efforts concédés par Susie pour lui trouver un bon parti, elle préfèrerait gagner son indépendance en balayant les rues ! Susie appuie avec toute la franchise qui la caractérise sur le coût de ses démarches pour attirer les prétendants. le problème majeur reste qu'elles sont loin d'avoir la même vision du bonheur, Susie se ralliant à celle de l'époque qui veut que toute femme, c'est-à-dire un être faible, doit trouver appui sur un mari et se complaire dans les travaux ménagers du foyer.
Eh bien, ce n'est pas du tout le sens qu'Anna veut donner à son existence !
Et voilà qu'une merveilleuse lettre vient changer le cours des choses avec l'héritage inespéré d'un domaine en Allemagne. Débordante de bonheur, enfin détentrice d'un revenu, Anna désire le partager avec d'autres femmes de bonne naissance mais malheureuses et complètement désargentées en leur offrant un asile et un avenir heureux.

Cette première découverte d'Elizabeth von Arnim m'a enchantée.
Tout d'abord le cadre, dans ses belles descriptions explicites, m'a tout de suite attirée. Une bâtisse dans un écrin forestier propice au bonheur, comme le pressent Anna. L'intérieur y est pourtant miteux avec une décoration hideuse. Mais Anna aime cette maison perdue, nichée entre le rivage de la mer baltique et cette forêt de pins qui l'apaise. Rien ne peut ternir sa fierté ni n'entamer la magie d'être propriétaire.

L'originalité de son projet fou est charmante même si l'on se doute bien qu'apporter lumière et bonheur à des femmes inconnues mais scrupuleusement sélectionnées ne va pas couler de source. L'élan et la naïveté de cette jeune anglaise de vingt-cinq ans n'avaient point pris en compte la nature humaine. Être de bonne famille n'exclut pas la perfidie, l'hypocrisie, la mesquinerie et le mensonge. Cette entreprise philanthropique plutôt hasardeuse va rapidement ouvrir les yeux de notre héroïne et lui faire reconsidérer sa définition du bonheur.

J'ai particulièrement apprécié l'humour de l'auteure, si naturellement présent, et bien sûr son ironie très subtile mais qui ne dénonce pas moins la considération des femmes à cette époque. Que ce soit en Angleterre ou en Allemagne, leur infériorité est rappelée de différentes façons tout au long du roman. On détestera alors le régisseur du domaine qui, derrière son obséquiosité, cache des intentions conquérantes au niveau de l'exploitation tout en signifiant odieusement : ce n'est qu'une femme « née pour aider et pour servir ».
Bien d'autres personnages de ce roman sont irrésistiblement détestables et heureusement qu'un brave pasteur, dithyrambique et candide, ainsi que le séduisant propriétaire voisin sauvent un peu cette galerie humaine.

Mené avec mordant, délicieusement écrit, ce roman exploite la question du mariage au beau milieu d'une époque où il est bien difficile de passer au delà des considérations sociales bien ancrées. Ce refus de la dépendance, chose excessivement triste et déprimante selon Anna, est loin d'être accepté comme un élan de modernité en ce début de XXe siècle.
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Un grand merci à Babelio et aux éditions de l'Archipel pour cet excellent roman découvert à l'occasion de Masse critique. Cela faisait plusieurs années que je songeais à découvrir cet écrivain, et puis son nom a fini par grossir ma LAL et je dois bien avouer que je l'ai un peu oubliée, la pauvre.

Comme son nom ne l'indique pas, Elizabeth von Arnim était une Anglaise, née en Australie et mariée à un comte Prussien, homme coléreux et violent, qui lu a inspiré bon nombre de personnages. La vie de von Arnim m'a beaucoup intéressée : cette cousine de Katherine Mansfield côtoya des écrivains, fut la maitresse de H.G. Wells, et parvint à gagner son indépendance. L'indépendance féminine justement, est le thème principal de son roman.

Se marier ou ne pas se marier ? telle est la question...

...que se pose notre jeune héroïne, Anna Estcourt, qui va goûter les joies et les désagréments de la liberté à la fin du XIXème siècle.

Orpheline, à la charge de Suzie, sa belle-soeur, Anna est lasse de sa vie mondaine sans intérêt qui se déroule à Londres. Jusqu'au jour où un vieil oncle allemand a la bonne idée de lui léguer un petit domaine dans le nord de son pays, en Poméranie. Et voilà notre belle jeune femme de 25 ans, toujours résolument célibataire, décidée à s'installer dans sa nouvelle demeure avec une idée fort généreuse : faire de sa nouvelle maison un hâvre de paix pour femmes malheureuses et désargentées.

On se doute bien que son parcours sera semé d'embûches et que les rencontres ne seront pas toutes plaisantes. Elizabeth von Arnim brosse les portraits d'une galerie de personnages tantôt farfelus tantôt méprisables. de l'ambitieux et odieux intendant Dellwig, au vicaire Manke, passablement intolérant, en passant par des coureurs de dot et un jeune illuminé, on ne saurait dire lequel de ces messieurs il conviendrait de fuir en premier !

Heureusement, le séduisant voisin d'Anna, Axel von Lohm, incarne le gentleman parfait et pour tout dire l'homme idéal. Un héros dans la lignée de ceux de Jane Austen ou Elizabeth Gaskell.

Anna a beau vivre dans un cadre enchanteur, son coin de nature paisible et sauvage, elle passe le plus clair de son temps à repousser des demandes en mariage, à s'opposer à des idées et suggestions que d'aucuns voudraient lui imposer et à subir les remarques perfides des autres femmes, épouses soumises et solides travailleuses.

C'est qu'en Poméranie, le destin de la femme est tout tracé : épouse et tais-toi !

Malgré ce constat amer, la gente féminine n'est guère épargnée et je ne peux m'empêcher de penser qu'Elizabeth von Arnim ne devait pas avoir une haute opinion de ses contemporaines. Toutes celles croisées dans le roman, la femme du vicaire, celle de l'intendant, les trois protégées d'Anna, la soeur d'Alex, Suzie et bien d'autres se montrent mesquines, paresseuses, superficielles, et même méchantes. Fraulein Kuhrauber, Frau von Treumann, la baronne Elmreich, aucune n'est digne d'intérêt et encore moins, de compassion.

Rares sont celles qui échappent à cette peinture au vitriol ! : la Princesse Ludwig, la nièce d'Anna, Letty et Miss Leech sa gouvernante.

Rien ne manque à ce très bon roman : une peinture très ironique de l'époque, un face à face savoureux et souvent drôle entre les mentalités anglaises et allemandes, une idylle romantique - et quelques drames pour ajouter un peu de piment, et une saine réflexion sur le statut de la femme et les différences sociales. Une excellente découverte qui me pousse à ajouter quelques autres titres de Miss von Arnim sur ma liste de bouquins prioritaires.
Lien : http://lectures-au-coin-du-f..
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Elizabeth von Arnim excelle dans l'art du portrait. Les personnages qu'elle met en scène dans "la bienfaitrice" reflètent bien la diversité des caractères et des ambitions humaines. Peu sont attachants, femmes et hommes campés avec précision rivalisent d'hypocrisie, d'orgueil, de mesquinerie, d'égoïsme. La liste pourrait être encore plus longue. Ils mettent toutefois en valeur Anna l'héroïne. Jeune femme de 25 ans, elle vit chez son frère et n'est pas très heureuse. Jolie, intelligence et pleine de bonté elle rêve d'indépendance et n'a aucune envie de se marier comme le voudrait sa belle soeur Suzy.
Le destin la comble lorsque son oncle lui lègue une maison en pleine nature au nord de l'Allemagne qui lui assurera une belle rente. Un peu naïve Anna part sur place et décide de créer un lieu d'accueil, un refuge pour quelques femmes de bonnes familles désargentées. Malgré sa bonté et sa force de caractère l'aventure est difficile et douloureuse. Elle trouve réconfort dans une nature paisible et sauvage dont les descriptions enchantent le récit, et dans l'amitié d'un homme. S'assumer, prendre les décisions, tout gérer rien n'est simple mais Anna se bat et ne baisse pas les bras.
Elizabeth von Arnim nous conte ce parcours du combattant avec humour et ironie. Son regard sur le genre humain n'est pas tendre. Ce texte paru en1901est d'une très grande modernité et son attachante héroïne est précurseure des femmes d'aujourd'hui dans leur autonomie et leur liberté d'action et de pensée.

"avril enchanté"reste toutefois mon coup de coeur de cette auteure.
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Jeune fille de famille noble mais piteusement fauchée, orpheline de surcroît, Anna Escourt a été élevée par sa belle-soeur, aussi fortunée que dépourvue de manières et toujours prompte à rappeler ce qu'on lui doit. Elle a bon coeur, Anna, elle tendrait assez à plaindre cette pauvre Susie dont la situation affective n'est guère enviable - mais l'affection qu'elle lui porte elle-même n'est jamais si vive que lorsqu'elles sont séparées. Lorsqu'elle ne doit pas subir sa raideur, ses réflexions désobligeantes, ses manigances mondaines et ses perpétuelles allusions à l'ingratitude de la jeune fille : pensez donc, dans sa situation, à presque vingt-cinq ans, s'obstiner à décourager tous les prétendants que son joli visage attire, à rester sur les bras de celle qui a déjà tant fait pour elle !
C'est que le mariage ne la tente guère, Anna, surtout le mariage d'argent qu'on entend lui imposer. Libre et indépendante : voilà ce qu'elle se rêve, sans grand espoir hélas... jusqu'au jour où tout bascule enfin. Son vieil oncle Joachim vient de mourir et lui laisse, contre toute attente, un petit domaine en Poméranie doté d'un assez bon revenu pour ne plus dépendre de personne.
Folle de joie, Anna se met en route pour l'Allemagne et décide bientôt que son bonheur, puisqu'elle en a désormais les moyens, doit être partagé. Elle accueillera dans son nouvel éden quelques unes de ces femmes que personne ne songe à secourir - des dames de qualité tombées dans le besoin, ses futures grandes amies, ses futures soeurs avec qui tout partager.
Tout ceci est évidemment sans compter la naïveté du projet, le manque d'expérience pratique de la jeune femme, la barrière de la langue, le foudroyant décalage culturel qui l'attend, le machisme consternant des Allemands, la mauvaise volonté de son régisseur, l'inébranlable certitude de tout son entourage que le bonheur d'une femme ne peut se trouver que dans le mariage et l'entrée en scène de trois nouveaux prétendants dont elle se serait fort bien passée.

Si la première partie du roman est un peu longue à démarrer, l'arrivée en Allemagne bouscule agréablement les choses et les multiples mésaventures d'Anna ne tardent pas à devenir franchement palpitantes, voire assez difficiles à lâcher.
Mais... attendez un instant. Une jolie jeune femme indépendante et volontaire qu'un héritage met à la tête d'un domaine agricole, résolue à ne pas se marier malgré le poids des conventions, confrontée à trois amoureux diversement assidus et bien intentionnés : cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Les amoureux, d'ailleurs, un travailleur solitaire et dévoué, une tête faible que l'amour exalte un peu trop et un militaire aussi fat qu'intéressé, ressemblent beaucoup à une réinterprétation des trois prétendants de Bathseba Everdene. Et ce quiproquo malheureux autour d'une lettre d'amour, cette grange incendiée, cette histoire de bottes de foin... Pas de doutes : c'est un détournement de Loin de la foule déchaînée qu'on lit là ! Et c'est comme si l'auteur, agacée par les mêmes choses que moi dans le roman de Thomas Hardy avait entrepris de reprendre l'histoire en main pour en exploiter les potentiels, d'un point de vue moins puritain, plus féministe et plus subtil.
L'héroïne indépendante et volontaire n'est plus une pimbêche vaniteuse, mais une idéaliste un peu naïve, aussi attachante que Bathseba m'agaçait, et clairement pas du genre à tomber dans les bras du premier bellâtre venu. L'orgueil qui empêche une femme de céder à l'affection d'un homme pourtant désirable n'est plus un sentiment condamnable à dompter, mais une réaction logique à un ordre social qui abaisse. La relation entre hommes et femmes, la manière dont l'attitude instinctivement dominatrice ou protectrice des uns, la dépendance socialement organisée des autres, empoisonne les rapports les plus simples et peut aller jusqu'à geler les sentiments, est mise en scène de manière assez fine, avec toutes les ambiguités qu'elle entraîne.
Autant dire que sous la plume d'Elizabeth von Arnim, cette histoire devient considérablement moins réductrice et plus intéressante ! Avec en prime pas mal d'éléments autobiographiques qui donnent de la profondeur aux personnages et aux situations, avec aussi l'esprit de satire délicieusement mordant et l'amour poétique de la nature qui font le sel et le charme de l'auteur. Un régal !
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Il est des écrivains qui restent injustement dans l'ombre de certaines grandes plumes , en particulier féminines, de la littérature britannique du début du vingtième siècle  ainsi en est-il d'Elisabeth von Arnim .

Oubli réparé grace à ce  roman avec un joli portrait d'une jeune femme , Anna Escourt qui, pour cause de célibat volontairement prolongé vit toujours à Londres, sous le toit de son frère et surtout de sa belle-soeur, la détestable Susie .

Un oncle, séduit par les qualités  d'Anna lui lègue une propriété perdue dans la campagne allemande et une rente qui lui permet d'acquérir une certaine indépendance .

Anna a un grand coeur et des idées charitables bien utopistes lorsqu'elle décide d'accueillir dans sa nouvelle demeure douze femmes d'un milieu honorable  qui n'ont pas eu sa chance pour leur faire connaitre le bonheur et en faire des amies, voire des soeurs.

Choix délicats et la première arrivée de quatre femmes va s'avérer bien différente de ce qu'avait rêver Anna.

L'émancipation de la jeune femme est fort éloignée des moeurs en cours à cette époque et la pauvre Anna va vite déchanter , heureusement son voisin veille sur elle ( c'est pas un peu macho quand-même ? )

Jolie découverte de cette femme , Elisabeth von Arnim, à la plume élégante qui peut se comparer sans rougir à Jane Austen ou aux soeurs Bronté !
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Anna, jeune anglaise de 25 ans, a jusqu'ici vécu dans le foyer de son frère sous la coupe de sa belle soeur qui veut à tout prix la marier (et s'en débarrasser !) . Et voilà qu'elle hérite miraculeusement d'un vieil oncle : un grand domaine en Allemagne, entre mer Baltique et forêt de pins , qui lui rapporte suffisamment pour la rendre indépendante. Débordant d'enthousiasme et de bonheur, elle projette de partager cette bonne fortune avec une douzaine de femmes de bonne famille mais désargentées en leur offrant un asile et un avenir heureux.

D'une plume légère et pleine d'humour, Elizabeth von Arnim dresse toute une galerie de portraits très vivants et très caustiques . Anglais ou Allemands, hommes ou femmes, tout le monde y passe : le frère absent, l'obséquieux et odieux intendant, le pasteur pontifiant, le jeune vicaire ridiculement romantique ou le fils de bonne famille désargenté coureur de dot, voilà pour l'essentiel de la gent masculine ! Tous ces messieurs considérant bien sûr la femme comme inférieure , un être faible , « née pour aider et pour servir » , un « matériau brut inutilisable tant que la main d'un homme ne l'a pas façonné ».
Mais l'auteure n'épargne pas les femmes non plus : de l'insupportable belle-soeur anglaise, riche mais vulgaire, aux allemandes hypocrites, jalouses et méchantes , le tableau n'est pas reluisant et seules quelques unes trouvent grâce à nos yeux, à commencer par Anna bien sûr !

Quand on lit la biographie d' Elisabeth von Arnim, on comprend qu'elle s'est un peu inspirée de sa propre vie ( les différences de mentalités entre Anglais et Allemands par ex) , qu'elle a dû souffrir d'être une femme « moderne » et indépendante à une époque où c'était plutôt mal vu (fin XIX e) et que le personnage d'Anna lui ressemble par certains côtés .

Une riche galerie de portraits, une défense et illustration de la condition féminine , auxquelles il faut ajouter de beaux paysages et une nature sublimée : une lecture très plaisante et une belle découverte.
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C'est en parcourant la toile que je suis tombé sur le nom d'Elizabeth von Arnim qui m'était totalement inconnu et semblait assez peu populaire. Pourtant, cette auteure m'a très vite attiré pour les éloges que j'ai pu lire de ses écrits et bien que moins connu semble-t-il qu'Avril Enchanté, le résumé de la Bienfaitrice m'a de suite interpelé grâce à son héroïne qui se devinait moderne et indépendante.

Il est indéniable que ces promesses sont belles et bien tenues et que le personnage principal dévoilé reste la grande force de ce récit. En effet, Anna se démontre bien différente de ses consoeurs et prône fièrement sa singularité. Ainsi, cette dernière trop peu romantique préfère largement se définir comme une jeune femme libre et indépendante, un poil philosophique et fière de l'être. C'est pourquoi, lorsque celle-ci hérite d'un domaine en Allemagne ainsi qu'une importante rente financière rêvera d'émancipation plutôt que de mariages. J'ai vraiment été séduit par ces attraits qui font de ce protagoniste un personnage en avance sur son temps et totalement actuel et moderne. D'autant plus que malgré ses grandes convictions et cette différence Anna ne cessera de faire preuve d'altruisme envers ses compères et mettra à profit cette liberté durement acquise en venant en aide à nombreuses femmes en détresses. Malgré toute sa bonté et sa bienveillance notre héroïne se fera bien souvent dupée et malmenée dans cette société où l'hypocrisie et les différences sociales sont de mises. J'admets que même si cela accentue le côté attachant et empathique de sa personne, je l'ai trouvée par moments bien trop naïve et crédule. Fort heureusement, Anna ne manque pas pour autant de caractère, ce que j'ai beaucoup apprécié. de plus et malgré ses voeux de célibats, notre jeune gentleman Axel se trouvera vite charmé par cette dernière et mettra tout en oeuvre afin de lui faire baisser sa garde. J'ai beaucoup aimé ce personnage qui permet à Elizabeth von Arnim d'offrir un brin de romance à son roman satirique.

En effet, La Bienfaitrice est une très nette et juste critique de la société dans laquelle évolue notre héroïne aussi que son auteure. Ce récit sans pour autant être totalement autobiographique semble s'inspirer de manière conséquente de la vie tourmentée d'Elizabeth von Arnim. Cette inspiration personnelle lui permet d'offrir un récit attrayant et assez touchant, à la dimension humaine impressionnante. D'une fine plume parfaitement maitrisée et remplie de poésie, cette dernière offre une oeuvre qui se lit avec facilité et qui se vit avec intérêt. D'autant plus que cette dernière ne manque nullement de cynisme et le retranscrit à merveille grâce aux nombreuses femmes qui peuplent ce roman. Mise à part notre héroïne aucune ne semble faite de bons caractères et chacune entache encore plus l'image que se faisaient les hommes de l'époque à leur propos. Pour autant et à l'image d'Anna, le style d'Elizabeth von Arnim se veut lui aussi moderne et actuel. Ainsi nulle chinoiserie n'est venue compliquer ma lecture excepté les thermes et le vocabulaire allemand spécifiques à cette oeuvre. Bien entendu, ce choix de ne pas traduire certaines parties permet de mettre en avant le choc des cultures entres ces deux pays dépeint avec réalisme par l'auteure. Quel plaisir de découvrir de nouvelles coutumes et autres modes de vie que ceux déjà bien connus des classiques anglais. Sans pour autant être totalement différents, cette comparaison et cette nouvelle contrée permettent à l'auteure d'apporter une oeuvre rafraîchissante.

En conclusion, ma première rencontre avec Elizabeth von Arnim est couronnée d'un véritable succès. J'ai adoré découvrir son fin style parfaitement maîtrisé, fortement actuel et moderne, à l'image de son héroïne fière et indépendante, largement en avance sur son temps.
Lien : https://mavenlitterae.wordpr..
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Au début du XXe siècle, Anna Escourt, orpheline de 25 ans, vit à Londres avec son frère et sa belle-mère tyrannique qui ne cesse de lui rappeler qu'elle lui est redevable et de la traîner de bals en soirées pour la marier à un bon parti. Anna préférerait de loin gagner son indépendance en balayant les rues. À la suite du décès de son oncle, Anna hérite d'un grand domaine en Allemagne, dont les revenus lui permettent de vivre à sa guise, en restant célibataire, et d'accomplir son rêve : offrir un toit aux femmes seules et sans ressources.

Cette héroïne résolument moderne, rejetant tout sentiment amoureux, agit selon ses propres convictions, quand bien même celles-ci feraient fi des convenances et des critiques. Néanmoins, en dépit de sa force de caractère, Anna fait preuve d'une grande naïveté quant à son projet philanthropique et à ses protégées qu'elles considèrent comme ses « soeurs » (car elle voit en elles la détresse à laquelle son héritage lui a permis d'échapper). Mais au fil du temps, les mensonges et l'hypocrisie de ces dernières lui ouvriront les yeux et lui feront reconsidérer sa vision du bonheur.

Elizabeth von Arnim nous offre une belle galerie de personnages secondaires. Parmi mes préférés, Letty, la jeune nièce d'Anna, qui raffole des souvenirs romantiques que lui conte sa gouvernante, et accumule les maladresses malgré ses louables intentions, ainsi qu'Axel von Lohn, un voisin qui tente de protéger Anna des ruses de son régisseur et de ses résidentes.

Cette fable, gorgée d'humour et d'ironie, savoureusement écrite par Elizabeth von Arnim, dénonce la condition des femmes considérées comme des êtres inférieurs, destinés à vivre sous la coupe d'un mari, et met également en avant le choc des cultures entre ces deux pays aux coutumes extrêmement dissemblables mais tout aussi étriquées et emprisonnantes.
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Avril enchanté m'a tellement plu que j'ai vite déniché un autre roman de Elizabeth von Arnim à lire. La bienfaitrice est plus long, l'histoire a de ce fait un peu plus de ramifications.

Quand Anna Estcourt, jeune et belle anglaise noble mais sans fortune, hérite d'une propriété en Allemagne, elle y voit là l'occasion de prendre son indépendance et également de faire profiter de pauvres âmes de sa bonne fortune. Mais dans sa candeur, elle ne perçoit pas ce que ce projet a de difficile à mettre en oeuvre, d'autant plus dans un pays dont elle ne connaît pas les us et coutumes.

De la belle-soeur riche mais vulgaire au pasteur pontifiant, en passant par les personnes intéressées et manipulatrices, l'auteure offre une galerie de personnages piquants et drôles et des descriptions pleines de malice.

Une très agréable lecture.
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