Un enclos dans la forêt

La préhistoire est un domaine qui me passionne aussi, allant visiter le château de Fontainebleau (très bien rénové ces 15 dernières années, soit dit en passant) je ne pouvais résister à l'envie de passer voir le musée de la préhistoire de Nemours, consacré au passé lointain des hommes en Île de France. Une exposition temporaire sur les Sénons achève de me convaincre de m'y rendre, sans que j'en sache plus. Je n'en attendais pas de merveilles ni les émotions ressenties en visitant des grottes de la vallée de la Vézère mais c'est toujours intéressant.
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L'exposition temporaire était de grande qualité et le contenu du musée est vraiment riche mais là n'est pas mon propos, même si je profite de l'occasion pour vous encourager à « faire le détour » si vous en avez l'occasion. Non, ce qui m'a marqué est les émotions ressenties dans le lieu lui-même, ce bâtiment de verre et de béton brut.
- Je ne savais rien sur l'endroit où j'arrivais et j'ai eu en prime la chance d'être « seul » dans les salles (pas d'accompagnants, une quasi absence de public) ce qui est idéal pour « vivre » un lieu, loin de tout « parasitage ». Et j'ai été émerveillé par la façon, en apparence simple, dont ce bâtiment entrait en résonnance avec son contenu, s'intégrait fabuleusement avec le lieu physique de son implantation. La façon de délimiter intérieurs et extérieurs était aussi à la fois d'une grande simplicité apparente et d'une surprenante profondeur. L'utilisation de la lumière naturelle était exceptionnelle (quantité, couleur, provenance dans les pièces). Des patios intérieurs extraordinaires enrichissaient encore les échanges. Par instants je ressentais une profonde harmonie et l'impression que le but était aussi de me placer au coeur de la vie de ces hommes engloutis dans un passé si lointain à notre échelle et pourtant si proche.
- Je me suis surpris à m'intéresser autant au bâtiment lui-même qu'à son contenu, pour finir par me demander si je vivais une expérience aussi intéressante que déconnectée du réel ou si l'architecte qui avait travaillé avait voulu faire passer un message qui me parvenait alors de façon si transparente.
- En sortant j'ai donc demandé s'il existait un ouvrage sur le musée lui-même, au delà de son contenu. Après une recherche dans une armoire c'était le cas et le voici. Cet « enclos dans la forêt » (tout un programme) a été créé par Roland Simounet et est le fruit d'un travail architectural complexe et épuré à la fois. Et tout ce que j'ai ressenti en le visitant était inclus dans le projet de ce créateur. Il est rare qu'un projet architectural soit aussi « lisible » et, par ailleurs, s'adapte de façon aussi admirable et pleine à son sujet. Comme indiqué sur la quatrième de couverture : « Presque 40 ans après son achèvement, le bâtiment en béton brut de Roland Simounet, labellisé Patrimoine du XXe siècle, est devenu une sorte de « marqueur » de l'imaginaire architectural. Ce livre […] confronte archives et regards contemporains. Il analyse le bâtiment sous l'angle de la tenue dans le temps, selon une approche à la fois théorique et historique, muséographique et technique »
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Je conseille donc sans réserve pour commencer la visite de ce musée, pour qui s'intéresse à la préhistoire évidemment mais aussi pour qui aime l'architecture…. Ou, simplement, pour qui veut pouvoir ressentir un lieu hors du temps, s'offrir une parenthèse propice à la méditation ou à l'émerveillement. Et, pour qui a pu vivre ce moment je ne saurais trop conseiller l'ouvrage ici commenté qui, loin de démythifier le vécu l'enrichit, l'éclaire, le contextualise dans la grande histoire de l'architecture. L'écrit est précis sans être techniquement difficile et les photos aident à comprendre parfaitement le propos. Il peut gagner à être complété par des photos personnelles ou par d'autres livres pour qui veut pleinement profiter de la grâce du lieu car si les images sont « efficaces » elles ne sont pas le fait d'un grand photographe, mais ce serait ma seule nuance critique pour un livre de grande qualité portant sur un lieu qui, pour être largement ignoré, n'a rien de mineur.