Max Beckmann se situe toutefois à l’opposé de Franz Marc et de Kandinsky. En réponse à Marc, il écrit dans un article intitulé « Pensées sur l’art temporel et intemporel » : « Une chose est récurrente en tout art. C’est la sensibilité artistique, liée au caractère figuratif et objectif des objets à représenter.» Il estime que les « papiers peints Gauguin » ou les « étoffes Matisse » pèchent par excès d’esthétisme décoratif et ne permettent plus de faire la distinction entre un tableau et un papier peint. Pour Beckmann, l’artiste doit créer selon « l’esprit de son temps », ce qui signifie qu’il doit d’abord en prendre conscience. Beckmann part donc de l’histoire telle qu’il l’a vécue. Comme les grands peintres du XIXe siècle, Goya, Géricault, Delacroix, qui ont représenté des scènes remarquables de la mythologie, de la religion, de l’histoire, Beckmann veut rendre compte de son temps, non pas en pratiquant une peinture narrative, mais en créant des personnages emblématiques qu’il met en scène dans des décors à haute teneur symbolique.
Une peinture des Pays-Bas en haut de la Butte.
VANDONGEN les années Montmartroises
Jusqu’au début de l’Occupation, Paris a été le lieu saint de notre temps.
Le seul. […] Paris était alors le lieu unique où l’on pouvait fondre les
différentes tendances et les mener à la maturité, où l’on pouvait agiter le cocktail “moderne” de psychologie viennoise, sculpture africaine, romans
policiers américains, néo-catholicisme, technique allemande, nihilisme italien. Paris était l’Internationale de la culture », écrit le poète et critique
américain Harold Rosenberg au début de la Seconde Guerre mondiale. Le désir de Paris, désir que nourrissent des motifs d’ordre culturel, artistique, social ou politique, prend la forme du rêve à réaliser puis d’un séjour déterminant, enfin d’une installation définitive. C’est la trajectoire suivie
par Van Dongen (1877-1968).
LE PASTEL AU PRÉSENT TONIQUE
Le latin pastellus signifie pâte. Comme dans pâtisserie. Après avoir mélangé des pigments de couleur purs avec de la craie ou de l’argile (la charge), de l’eau et de la gomme arabique ou un autre liant, on roule la pâte obtenue en petits cylindres. Voilà nos bâtonnets de pastel prêts à l’emploi. Facile ! Loin d’être si facile, en réalité, cette commodité et cette immédiateté d’usage – au regard des lentes préparations qu’exigeait traditionnellement la peinture à l’huile et à ses longs temps de séchage ont plutôt joué en sa défaveur. Le fait que le pastel ne s’enseignait pas dans les écoles, qu’il pouvait se pratiquer hors atelier et qu’il était accessible aux femmes dès son fameux âge d’or du XVIIIe siècle, l’ont traditionnellement assimilé à un art d’amateur, un hobby charmant et délicat. Au mieux, un art mineur.
Au tournant du XXe siècle, les artistes suisses, eux aussi, se mettent au pastel et font éclater leurs palettes irisées ou sonores, les Grasset, Biéler, Burnat-Provins, Giovanni Giacometti, Segantini ou Amiet. Les nabis (en particulier Vuillard) y trouvent un allié pour donner du moelleux à leurs fondus et leurs mouchetés. Les impressionnistes (notamment Sisley) privilégient sa liberté d’écriture sur le vif. Les pionniers de l’art abstrait (tels Klee ou Augusto Giacometti) mènent à travers lui des alchimies expérimentales qui conduisent à la puissance pure et à la pleine autonomie de la couleur.
MAX BECKMANN PEINTRE D’HISTOIRE ET MORALISTE
Il existe au moins deux raisons impératives de faire le voyage à Potsdam : découvrir l’ancienne capitale de la Prusse, aux portes de Berlin, presque entièrement détruite par les bombardements alliés en avril 1945, puis rasée par les Soviets et transformée en cité interdite abritant le centre de contre espionnage russe et l’exposition Max Beckmann : Welttheater, qui se tient au tout nouveau Musée Barberini du 24 février jusqu’au 10 juin 2018