La ville doit sa renommée à un triste record, celui du plus grand nombre de disparitions aux États-Unis. Chaque année, ce sont plus d’une vingtaine de personnes qui s’évaporent dans la forêt.
C’est bien ce que je pensais : je suis totalement nue. Reste calme, Emily. Il doit y avoir une explication. Je laisse courir ma main droite autour de moi. Le sol rocheux est glacé… Il y a une odeur d’humidité, de terre, et une autre, un peu plus acide, comme du soufre. Suis-je dans une cave, une grotte ? Une mine peut-être, mais laquelle ? Des milliers de souterrains ont été creusés à travers l’Oregon au cours de la ruée vers l’or, à partir de 1850. La plupart ont été condamnés. Je le sais, car en commençant ma randonnée il y a trois jours, j’ai été surprise de voir autant de panneaux de mise en garde en bordure de forêt :Ne tentez jamais d’entrer dans une mine abandonnée. Danger de mort.
Je sais ce que je risque à être là, en cet instant. J’aurais dû m’enfuir, bien entendu, quand j’en avais l’occasion. Je tiens plus du dernier des crétins que du Bon Samaritain, mais on ne se refait pas. Et elle a besoin de moi…
Je sais ce qu’ils doivent avoir en tête. J’étais comme eux, dans une autre vie. « Un village en quête de vengeance », « Un meurtrier en cavale »… J’imagine déjà les gros titres. Tout est réuni pour qu’ils fassent le reportage de leur carrière. Ils attendent, espèrent secrètement que ça va dégénérer.