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Critique de ATOS


ATOS
10 février 2019
Vivre. Écrire. Rythme and Heart. Mon coeur est bleu , mon encre est rouge, parce que ma peau touche la douleur de l'autre à hauteur d'homme. « Un artiste ne peut parler vraiment que de ce qu'il connaît » écrit Geneviève Brisac, dans sa préface qui accompagne l'édition française aux Editions Stock d'un des plus grands romans de James Baldwin. Beale Street, berceau du Blues. « à mon avis, l'Amérique n'est un don de Dieu pour personne- ou sinon les jours de Dieu sont comptés.Ce Dieu que les gens prétendent servir- et qu'ils servent de façons qu'ils ignorent – a un sens de l'humour plutôt sinistre. Qu'il faudrait Lui écraser les couilles, s'Il était un homme.Ou si « vous » en étiez un. ». En lisant les mots de James Baldwin, et cela après avoir vu le merveilleux film de Barry Jenkins ( actuellement dans les salles), on sait que le temps ne passe pas, mais qu'il presse toujours. Et il faut lire le texte de Baldwin, avant tout. Car il est l'origine. Et en voyant l'adaptation de Jenkins, que je salue de nouveau, je ne peux que constater que la force, l'intensité de la parole de Baldwin se sont parfois dissoutes, parfois effacées à travers le film . Beauté des images ?... L'écriture a cet avantage : elle peut tout dire. Un film peut il tout montrer ? Un livre s'adresse au lecteur. Un film s'adresse au plus grand nombre. On comprend. Mais on frémit également. Car ce n'est certainement pas par choix que Jenkins a adapté de cette façon ce roman. Il fallait qu'il passe, que le film passe, qu'il passe les rugissants de la finance, l'écueil de la censure, les abîmes du dramatique « publiquement correct » . le Livre lui n'a pas à ce soucier de son passage, mais de son empreinte. le livre ne passe pas, il reste.
Mais je n'oppose pas. Littérature contre cinéma. Duras a dit ce qu'elle jugeait. J'essaie pour ma part de comprendre les émotions qui me traversent, me soulèvent, me bouleversent.
L'identité de l'écrit de Baldwin se trouve dans ses textes. « Je me regarde dans la glace », ce visage au fond du puits... première phrase du roman. Face à face. Pas de filtre, pas de censure, Direct face à face, sans réserves. J'ai retrouvé dans l'écrit de Baldwin, l'origine, la même origine que celle que j'ai découvert à travers les livres de Toni Morrison. Pour moi, ces deux auteurs sont indissociables. Et je me permettrait de leur adjoindre Léonora Miano ( le crépuscule du tourment est pour moi un pilier phare de la littérature de notre nouveau siècle ) et également Ta-Nehisi Coates, dont le dernier ouvrage «Huit ans au pouvoir » nous permettra sans doute de comprendre qu' à certain «  rêve » succède des cauchemars  .
Baldwin, Morrison, : Même intelligence de l'analyse, même intensité des mots, même regard sur la complexité et l'enchevêtrement d'une effroyable mécanique, même force, même génie du verbe. Ce que ne montre pas suffisament le film de Jenkins s'est l'articulation interne d'une communauté générée par l'effroyable pression externe d'une société toute entière sur cette communauté. Et cela concerne toutes les communautés. Comprendre l'imbrication de chaque gramme de plomb qui dresse murs et pyramides de verre. Comprendre cette «  machine-action » que révèle Balwin, et Morrison c'est comprendre comment va notre monde. Ce système inventé de toutes pièces où l'humain devient matière première, devient carburant pour que la machine puisse broyer et avancer. C'est comprendre la colère, la résistance, c'est comprendre bien des luttes, c'est comprendre aussi pourquoi il leur est si souvent si difficile de s'exprimer. « Celui qui sauve une vie sauve l'humanité entière. » tel serait la parole divine.. Et je crois, également que celui qui comprend une vie peut comprendre l'humanité entière. Alors oui « le temps », ce temps si précieux pour Tish, ce temps de naissance symbolisé par l'enfant qu'elle porte, presse. le temps presse car la vie nous blesse. Gold Blesse America. Gold blesse the world. Gold blesse humanity. L'humanité toute entière. « Je me regarde dans la glace » et je nous vois interrogés.


Astrid Shriqui Garain
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