De temps en temps, je me fais une pause à l'eau
De Balzac, une source quasi inépuisable d'histoires qui nous décrivent la France de la première moitié du 19ème siècle, une société où la cupidité, la méchanceté côtoient l'amour sincère et le dévouement.
Encore un auteur avec lequel, avec le temps, la compagnie m'est devenue familière, et que j'aime tant, y compris pour ses défauts!!!.
A côté de ses grands romans:
le Père Goriot,
La cousine Bette, Les
illusions perdues,
La recherche de l'absolu,
Splendeurs et misères des courtisanes,
le Lys dans la vallée, etc…, il y a à explorer chez
Balzac tous ces récits plus courts, voire même très courts (telle « Une étude de femme », une bonne dizaine de pages)
C'est presque toujours un régal, et c'est parfois saisissant et cruel, je pense à Gobseck ou à Vendetta.
Il s'agit, dans beaucoup de cas, d' « histoires d'amour qui finissent mal, en général ».
Comme cet
Albert Savarus, de qui je n'ai pu m'empêcher de penser que ce cher Honoré y avait mis un peu de sa propre histoire, de son amour pour les Duchesses et Comtesses, ici peut-être la Comtesse Guidoboni-Visconti ou la Comtesse Hanska.
L'histoire se passe en bonne partie à Besançon, une ville dont
Balzac fait un portrait pas très « fun » dans ces années 1830, avec des habitants plutôt lourdauds. où tout le petit monde de l'aristocratie et de la grande bourgeoisie se connaît et s'épie.
Nous y faisons d'abord connaissance de la famille du baron de Wattewille, vieux noble désargenté, pas très futé, mais d'une grande bonté, dont la jeune épouse Clotilde de Rupt, lui a apporté une dot conséquente et lui a donné une fille, âgée maintenant de 17 ans, pas très belle, mais rebelle à sa mère, une bigote au mauvais caractère.
Ajoutez à cela le vieil abbé de Chancey, et Amédée de Soulas, un jeune noble sans le sou venu de Paris, qui tous deux viennent faire le beau dans le salon des Wattewille, (dans l'espoir pour le dernier de marier la jeune fille) et l'action peut commencer.
Grâce à la bonne nouvelle que l'abbé vient annoncer: il a gagné son procès, la bonne société bisontine apprend l'existence d'un jeune avocat brillant mais mystérieux, Albert Savaron de Savarus.
C'est vers ce jeune avocat, dont la renommée va croître grâce, d'abord, aux procès qu'il gagne, puis à sa participation à une revue locale, que la jeune Mlle Wattewille va être attirée; mais elle va deviner, suite à la lecture d'une nouvelle publiée par l'avocat (et que
Balzac nous livre « in extenso » dans un récit enchâssé), qu'il aime une magnifique femme de la noblesse italienne, mais, malheureusement pour lui, déjà mariée à un vieux barbon.
En soudoyant le valet d'
Albert Savarus, Mlle Wattewille intercepte sa correspondance avec son ami Léopold mais surtout ses lettres enflammées échangées avec la belle Duchesse florentine Francesca d'Argaiolo. Toutes ces lettres révèlent à la jeune Wattewille la promesse que les amoureux se sont faite, et les raisons de la venue d'Albert à Besançon.
Dans la suite, les agissements malfaisants de la « vilaine fille » vont apporter le malheur, je n'en dis pas plus, je ne « spoile » pas, avec de nombreuses conséquences prévisibles ou imprévisibles, et une punition du destin pour clore le tout.
Au total, une histoire bien menée, avec toujours la fine mais impitoyable acuité psychologique
De Balzac, reprenant d'une façon différente un thème qui le préoccupe, celui des obstacles que rencontre l'amour entre deux personnes de rang social et de fortunes différents.
Mais aussi, ce qui me fait sourire, car c'est une sorte de tic récurrent chez lui, la description détaillée des « histoires de sous »: dots, placements, fortunes qui se font et se défont, faillites, etc…toutes choses qu'il avait aussi expérimentées dans sa vie.
En conclusion, une courte histoire, romanesque à souhait, certes pas au niveau d'autres courts récits poignants comme
La femme abandonnée,
La Maison du Chat-qui-pelote,
Une double famille,
La fille aux yeux d'or; mais, une fois encore, la verve cruelle
De Balzac emporte mon adhésion.