Etre russe était être pessimiste; être soviétique était être optimiste. C'était pourquoi les mots Russie soviétique étaient contradictoires. Le Pouvoir n'avait jamais compris cela. Il croyait que, si l'on tuait assez de citoyens, et si l'on mettait les autres au régime de la propagande et de la terreur, l'optimisme en résulterait. Mais où était la logique là-dedans? De même qu'ils n'avaient cessé de lui dire, de différentes manières, par l'intermédiaire de bureaucrates culturels et d'articles de journaux, que ce qu'ils voulaient, c'était "un Chostakovitch optimiste". Une autre contradiction dans les termes.
Destin. Ce n'était qu'un grand mot pour ce à quoi vous ne pouviez rien faire. Quand la vie vous disait : "Et voilà", vous hochiez la tête, et appeliez ça le destin.
Parce que, si la tyrannie peut être paranoïde, elle n’est pas forcément stupide. Si elle était stupide, elle ne survivrait pas ; de même que, si elle avait des principes, elle ne survivrait pas. La tyrannie comprenait comment certaines parties – les parties faibles – de la plupart des gens fonctionnaient. P 80
Ilf et Petrov avaient écrit : « Il ne suffit pas d’aimer le pouvoir soviétique, il faut qu’il vous aime. »
Il était né à Saint-Pétersbourg, avait commencé à grandir à Petrograd, fini de grandir à Leningrad. Ou « Saint-Leninsbourg », comme il lui plaisait parfois de l’appeler. Qu’importait tel ou tel nom. P 22
Quand tout le reste décevait, quand il semblait n'y avoir qu'absurdité dans le monde, il se raccrochait à ceci : la bonne musique serait toujours la bonne musique, et la grande musique était invulnérable.
Il n'avait aucun des talents politiques requis : aucun goût pour le léchage de bottes, et il ne savait pas conspirer contre l'innocent, trahir des amis.(P. 103)
"La vie n'est pas une promenade d'agrément" : c'était aussi le dernier vers du poème de Pasternak sur Hamlet. Et le vers précédent était : "Je suis seul ; tout, alentour, se noie dans le mensonge."
Nikita pouvait déclarer un jour que votre musique lui donnait la colique
et le lendemain après un grand banquet
aller jusqu'à faire votre éloge.
p 145
[...] il est toujours possible d'avilir un peu plus les vivants. On ne peut en dire autant des morts.