Citations sur Une fille, qui danse (112)
Mais le temps... comme le temps nous soutient d'abord, puis a raison de nous... On croyait faire preuve de maturité, quand on était seulement en sécurité. On croyait être responsable, mais n'était que lâche. Ce qu'on appelait réalisme s'est révélé être une façon d'éviter les choses plus que de les affronter. Le temps... donnez-nous assez de temps et nos décisions les mieux étayées paraîtront bancales, nos certitudes fantaisistes.
Le remords, étymologiquement, est l’action de re-mordre: c’est ce qu’on ressent...
Combien de fois racontons-nous notre propre histoire ? Combien de fois ajustons-nous, embellissons-nous, coupons-nous en douce ici ou là ? Et plus on avance en âge, plus rares sont ceux qui peuvent contester notre version, nous rappeler que cette vie n'est pas notre vie, mais seulement l'histoire que nous avons racontée au sujet de notre vie. Racontée aux autres, mais - surtout - à nous-même.
Si je ne peux plus être certain des événements qui se sont produits, je peux au moins témoigner des impressions que ces événements ont laissées en moi.
C’est le mieux que je puisse faire.
À quoi bon de trouver dans une situation digne d'un roman, si le protagoniste ne se comporte pas comme il le ferait dans un livre ?
Parce que, de même que le changement politique et historique déçoit tôt au tard, l’âge adulte déçoit aussi. La vie déçoit. Parfois je pense que le but de la vie est de nous réconcilier avec sa perte finale en nous décevant, en prouvant, si longtemps que cela prenne, qu’elle n’est pas tout ce qu’elle est réputée être.
Oui, en effet, si Tony avait vu plus clairement, agi plus résolument, adhéré à des valeurs morales plus authentiques, ou opté moins facilement pour une placidité passive qu’il avait d’abord appelée bonheur et, plus tard, contentement ; si Tony avait été moins timoré, n’avait pas compté sur l’approbation des autres pour sa propre estime de soi … et ainsi de suite, à travers une succession de si, jusqu’au dernier : ainsi, par exemple, si Tony n’avait pas été Tony.
Et çà fait une vie, non ? Quelques accomplissements et quelques déceptions. Elle a été intéressante pour moi, mais je ne serais pas contrarié, ni étonné si d'autres la trouvaient moins intéressante. Peut-être que, dans un sens, Adrian savait ce qu'il faisait. Pourtant je n'aurais manqué cela -ma propre vie- pour rien au monde, vous comprenez.
J'ai survécu. "Il a survécu pour raconter l'histoire". C'est ce qu'on dit, n'est-ce pas ? L'Histoire, ce ne sont pas les mensonges des vainqueurs, comme je l'ai trop facilement affirmé au vieux Joe Hunt autrefois ; je le sais maintenant. Ce sont plutôt les souvenirs des survivants, dont la plupart ne sont ni victorieux, ni vaincus.
J'ai survécu. "Il a survécu pour raconter l'histoire" - c'est ce qu'on dit, n'est-ce pas? L'Histoire, ce ne sont pas les mensonges des vainqueurs, comme je l'ai trop facilement affirmé au vieux Joe Hunt autrefois; je le sais maintenant. Ce sont plutôt les souvenirs des survivants, dont la plupart ne sont ni victorieux, ni vaincus.
C'est un des problèmes centraux de l'Histoire, n'est-ce pas, monsieur? La question de l'interprétation subjective contre une interprétation objective, le fait que nous ayons besoin de connaître l'histoire personnelle de l'historien pour comprendre la version qui nous est présentée. (p. 25-26)