Citations sur Une fille, qui danse (112)
Si je ne peux plus être sûr des faits réels, au moins puis-je être fidèle aux impressions qu'ils ont laissées.
Si je peux me permettre une brève leçon d’histoire : la plupart des gens n’ont pas fait l’expérience des Sixties avant les années soixante-dix. Ce qui signifie, logiquement, que la plupart des gens vivant dans les années soixante faisaient encore l’expérience des années cinquante – ou, du moins, de bribes de ces deux décennies côte à côte. Ce qui embrouillait pas mal les choses.
À vingt ans, on peut se rappeler sa courte vie dans sa totalité. Plus tard, la mémoire devient quelque chose de bien plus décousu. C'est un peu comme la boîte noire que les avions transportent pour enregistrer ce qui se passe en cas d'accident. Si rien de fâcheux n'arrive, la bande s'efface. De sorte que, si on s'écrase, la raison en est évidente; sinon, l'historique de son voyage est beaucoup moins clair.
Et ça fait une vie, non? Quelques accomplissements et quelques déceptions. Elle a été intéressante pour moi, mais je ne serai pas contrarié ni étonné si d'autres la trouvaient moins intéressante.(...) L'Histoire, ce ne sont pas les mensonges des vainqueurs, comme je l'ai trop facilement affirmé au vieux Joe Hunt autrefois ; je le sais maintenant. Ce sont plutôt les souvenirs des survivants, dont la plupart ne sont pas victorieux, ni vaincus.
La principale caractéristique du remords est qu’on n’y peut rien.
L’Histoire est cette conviction issue du point où les imperfections de la mémoire croisent les insuffisances de la documentation.
"Nous savions, par notre lecture de la grande littérature, que l'Amour implique la Souffrance, et nous aurions volontiers endurés quelque Souffrance, s'il y avait une promesse implicite, peut-être même logique, que l'Amour pourrait alors venir."
Combien de fois ajustons-nous, embellissons-nous, coupons-nous en douce ici ou là ? Et plus on avance en âge, plus rares sont ceux qui peuvent contester notre version, nous rappeler que cette vie n'est pas notre vie, mais seulement l'histoire que nous avons racontée au sujet de notre vie. Racontée aux autres, mais -surtout- à nous-même.
Parfois je pense que le but de la vie est de nous réconcilier avec sa perte finale en nous décevant, en prouvant, si longtemps que cela prenne, qu'elle n'est pas tout ce qu'elle est réputée être. (151)
Il me semble que cela peut-être une des différences entre la jeunesse et la vieillesse : quand on est jeune, on invente différents avenirs pour soi-même ; quand on est vieux, on invente différents passés pour les autres. (118)