Critique
Pierre BayardPierre Bayard est un universitaire de 68 ans issu d'un milieu où on ne lisait pas et qui a fait Normale Sup. Les classes préparatoires sont un nid de futurs intellectuels issus de milieux le plus souvent cultivés dans lesquels la connaissance des grandes oeuvres littéraires est la norme. A 18 ans le bagage littéraire est forcément réduit mais l'imaginaire nous incite à penser que les autres ont tout lu, alors comment ne pas se sentir complexé devant cette équation impossible, tout lire dans une temporalité aussi restreinte.
En 2007, Bayard écrit un essai « comment parler d'un livre que l'on n'a pas lu »qui est sans doute le fruit de la méthode dont il a abusé pour ne pas sembler ignorant dans un milieu où le paraitre domine l'être.
Cet essai vise donc à déculpabiliser le lecteur n'osant pas avouer ce qu'il n'a pas lu, en rendant floue la frontière entre la lecture et la non lecture. En mettant au coeur de son ouvrage le non-lecteur, il s'ingénie à mettre en lumière l'hypocrisie ambiante (mais de quelle ambiance parle-t-il ?) qui tendrait à nous faire croire que tout le monde lit les livres qui comptent dans le panthéon
de la littérature.
La question posée par l'auteur me gêne car elle pousse à la méthode du mensonge uniquement pour paraitre, en oubliant que le lecture est un outils d'enrichissement personnel que l'on peut faire partager mais qui avant tout doit toucher notre être en profondeur.
Il a publié un essai « comment parler de lieux où on n'a pas été ?» et aussi « comment parler de faits qui ne se sont pas produits ?»
A qui s'adresse -t-il, sans doute à ceux qui veulent briller en société en s'économisant l'effort de voyager, de lire, d'aller au cinéma, d'écouter la radio, c'est valoriser l'illusion au détriment de la connaissance, celle qui nous rend réellement libre au sens de
Spinoza.
Dans cette logique de mensonge, on pourrait épiloguer sur des gens que l'on n'a jamais rencontré, sur des restaurants où l'on n'a jamais mangé, sur des médecins que l'on ne connait pas, sur des sujets politiques qui nous échappent complétement , où sur des sujets sur lesquels on a aucune connaissance, on donne son opinion, on appelle ça le café du commerce.
Tout cela revient à flatter l'imposture uniquement pour paraitre !!
Pour en revenir à l'essai, les citations sont pléthore et font appel à Greene, Céline,
Pierre Siniac (que je ne connaissais pas),
Montaigne ,
Balzac, Wilde et
Umberto Eco.
En revanche, je reconnais qu'il m'arrive de ne pas finir un livre, de le lire parfois en sautant quelques passages lorsque je repère quelques redondances et descriptions interminables, d'oublier la teneur d'un livre lu ce qui revient à un livre non lu mais notre esprit préfère dire qu'il l'a lu, je pense à
Kundera, auteur incontournable dont on peut facilement oublier parfois la teneur (l'insupportable légèreté de l'être).
Quand Bayard fait quelques citations d'auteur, il devient paradoxal de lui faire confiance puisqu'il survole voire parfois invente une réflexion d'un auteur c'est ce qu'il appelle le facteur créateur de la non lecture !!
En conclusion si je m'en tient à la raison profonde de cet essai, à savoir qu'il suffit de situer le contexte, la personnalité de l'auteur et surtout l'arbitrage temporel qu'il est nécessaire de faire lorsque l'on choisit un livre, je suis satisfait d'avoir pu en parler sans en avoir lu une ligne.
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