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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Achille, écrivain trentenaire et lecteur de manuscrits pour une petite maison d'édition au bord de la faillite, mène une vie plutôt monotone. Seule sa relation aléatoire avec Pénélope, une « B.T.L.S.P.S » (beauté typiquement latino sans permis de séjour) éclaire un peu son quotidien. Tout va changer quand il recevra un mail d'un certain Achille, sorte d' « elephant man », tapi au fond d'un appartement avec lequel il va nouer une amitié intense faite d'humour et de sincérité, mais aussi de perversité et de souffrance…Le début du roman nous raconte la vie d'Achille au jour le jour, mais aussi les aspects les plus aberrants de la société italienne : c'est désopilant ! Mais, sans accusation explicite, S. Benni écrit un pamphlet sans concession d'une Italie qu'il refuse (mafia, scandales politico-financiers, vagues de licenciements, rejet des émigrants…). Au fil des pages, l'humour devient plus discret pour évoquer la relation entre Ulysse et Achille et ses conséquences. S.Benni a un monde bien à lui (dont il faut peut être chercher la clef dans la tradition littéraire italienne ?) Fables fantastiques, farces burlesques, du rêve « physiologique » au rêve éveillé, ses personnages passent du monde réel à un monde onirique qui n'est pas sans me rappeler Pirandello dont certains héros dérivent parfois vers le rêve pour tenter d'échapper à l'aliénation de la condition humaine.
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Sous des dehors d'anar désabusé et satirique, le narrateur noue une amitié d'abord virtuelle puis improbable avec un jeune homme hydrocéphale cloîtré chez lui devant son ordinateur. Un chef d'oeuvre de délicatesse et de pudeur, une réflexion sans poncifs sur la solitude liée au handicap
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N°896– Avril 2015

ACHILLE AU PIED LÉGER – Stefano BENNI – Actes Sud.
Traduit de l'italien par Marguerite Pozzoli.

Achille est un jeune écrivain peu inspiré et en mal de chef-d’œuvre. Pour survivre s’est fait lecteur dans une petite maison d'édition du nom de Forge, par ailleurs au bord de la faillite à cause de la concurrence. Elle est comme il se doit dirigée par Vulcain (d'emblée de ton est donné). Il a aussi le malheur d'être insomniaque et quand il parvient enfin à dormir, il rêve que les auteurs qu'il est obligé de lire dans le cadre de son travail le poursuivent. Sa vie n'est donc un calvaire tout juste ensoleillé par son amour pour Pilar-Pénélope, une BTLSP, comprenez « une beauté typiquement latino sans permis de séjour », une plantureuse jeune fille très courtisée, ce qui ne l'empêche cependant pas de répondre aux avances de Ciré, la secrétaire de la maison d'édition. Après tout il y a pire comme situation même s'il pouvait espérer mieux pour lui sur le plan professionnel. Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes, selon l'expression désormais consacrée, jusqu’à ce qu'Ulysse reçoive un courriel envoyé par un certain Achille qui souhaite le rencontrer. On est déjà en pleine mythologie antique et cela ne fait que commencer ! Sauf que le Achille en question n'a rien d'un valeureux guerrier, ressemble à un monstre cloué sur un fauteuil roulant, rongé par la solitude, constamment plongé dans une pièce obscure. Il ne connaît rien de la vie, ne connaît l'amour qu'en imagination et ses rares rapports aux autres sont faits de violence. Quant à Ulysse, il n'a rien de commun non plus avec le personnage d'Homère, c'est plutôt un anti-héros un peu ballotté par les événements. Pourtant, malgré ces apparences peu engageantes, un marché va être conclu entre les deux hommes que tout oppose : Si Ulysse lui raconte ce qu'il veut écrire sans être capable d'y parvenir, Achille sera sa plume, révélant ainsi une parfaite complémentarité entre eux. Achille vivra donc par procuration et trouvera ainsi un sens à son existence. Ainsi la vie de chacun va être transformée. Une amitié va naître entre eux mais une amitié dérangeante à cause des propos durs et méchants d'Achille, personnage à la fois cynique et intelligent, et de la bienveillance d'Ulysse, surtout quand leurs conversations abordent la sexualité. Nous avons droit à des séquences érotiques à travers les rêves et les fantasmes d'Achille. Les femmes sont belles, désirables et on sent Ulysse très amoureux de Pénélope même si Circé ne le laisse pas indifférent, c'est le moins qu'on puisse dire. Il y aura quand même entre les deux hommes une véritable complicité où la perversité le dispute à la souffrance, à la tendresse et à l'humour.

Ce roman baroque est véritablement prenant, à cause de l'univers de Benni, son humour décalé, son vocabulaire truculent qui me rappelle celui de Boris Vian (parfois aussi de Lewis Caroll), sa poésie si particulière malgré ou à cause des mots parfois crus, des situations salaces, son style agréable à lire et généreusement débridé (et sûrement bien traduit, ce qui en doit pas être facile). A travers les personnages, les situations, c'est aussi une critique de l'Italie contemporaine avec l'inévitable mafia, la franc-maçonnerie, le football, le non moins incontournable Berlusconi (pourtant jamais nommé) et ses scandales, les immigrés, la crises économique et les licenciements qu’elle induit et, évidemment les problèmes des maisons d'édition. On n'oubliera pas non plus de réfléchir sur l'inspiration, la peur de la page blanche, celle de la panne créatrice et de l'inévitable découragement chez les jeunes auteurs qu'on n'encourage guère, surtout dans les maison d'édition. Là aussi j'ai accroché et me suis retrouvé à titre personnel sur ce chapitre. De plus c'est, à travers une sorte de parabole, une tentative originale de réécrire la mythologie antique marquée par une certaine perfection et de l'adapter au monde de l'Italie d'aujourd'hui nettement moins ressemblant !

J'ai rencontré Stefano Benni un peu par hasard, comme souvent, mais franchement je ne suis pas déçu. Son univers à la fois loufoque et fantastique me parle et m'a entraîné dans cette histoire jusqu'à la fin.
©Hervé GAUTIER – Avril 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Quelle petite merveille que ce livre, grinçant, désabusé, terrible et terriblement drôle. Stefano Benni nous y élabore une épopée homérique passée sous acide, confrontant aux figures mythologiques de l'Iliade et de l'Odyssée la réalité, parfois crasse de l'Italie contemporaine telle qu'il la voit. Chaque élément de notre vie est passé au filtre de la métaphore antique, le plus commun prenant sous sa plume des tournures tout bonnement fantastiques. Son écriture est ainsi à prendre comme une oeuvre en soi, tant chaque mot semble porter en lui images, références et clins d'oeil venus taper dans le notre.

Le style, extraordinaire, fond dans son récit fantastique et réalisme, entretenant, par la seule force de la langue, une incroyable ambiguïté dans ce qu'il décrit. Bien bas mon chapeau, au passage, à la traductrice Marguerite Pozzoli dont le plaisir à suivre les frasques langagières de Benni est à peu près aussi évident à la lecture que la difficulté de l'exercice (non pas dévoilée par des maladresses, mais par la réflexion que l'on se fait, devant la richesse que la plus petite phrase de cet ouvrage, qu'il est surprenant qu'il ne s'agisse pas là d'une VO, tant la personnalité de l'auteur y transpire à chaque ligne).

Il y dénonce par pirouette ce qu'il abhorre, il relève avec finesse ce qui l'attendrit, et nous embarque dans un récit prenant souvent des détours improbables, mais en évitant toujours par sa précision de tomber dans la lourdeur.

Ulysse, auteur/éditeur un peu ralenti, polygame polythrope, vorace et complice; Achille, handicapé mystique, érotico-trash, capable de renvoyer par le grotesque (au sens théâtral du terme) une gifle frappante de tragédie, d'humanité, nous plaçant dans une très inconfortable intimité, et dans une empathie que l'on réalise éviter au quotidien. Je me suis ces derniers mois beaucoup attachée dans mes lectures à la notion de marginalité... En voilà une autre, douloureuse et sans aucune pitié, mais tout particulièrement riche.

Cinq étoiles, sans la moindre hésitation, pour ce texte qui se dévore, si intelligent, et si souple. Je regrette d'en être sortie, et n'eurent été quelques très désagréables lectures obligatoires à venir, j'aurais très volontiers poursuivi un peu plus mon voyage au coeur de la prose virtuose, et carrément rock'n'roll de Benni.
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