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Citations sur Une rencontre à Pékin (24)

Peu après mon retour, une crise plus grave s'est emparée de moi. Pendant ma première année à Pékin, tout m'avait enchanté. La nouveauté de ce que je découvrais ne m'avait pas rendu aveugle aux aspects déplaisants de la réalité chinoise, mais en avait, pour ainsi dire, annulé l'effet négatif sur ma sensibilité. J'étais Stendhal en Italie. Le charme était maintenant rompu. J'étais privilégié, j'avais une chambre à moi, les cours que je suivais avec les étudiants chinois du département de littérature classique excitaient ma curiosité et les difficultés considérables que je rencontrais à cause de l'insuffisance de mon chinois ne faisaient que renforcer mon ambition. Mais la vétusté des équipements et la médiocrité générale de la vie quotidienne m'ont soudain accablé. Il régnait une monotonie due au fait que le régime interdisait toute initiative personnelle. Les étudiants chinois de ma volée n'avaient aucune idée de leur avenir, qui dépendait le moment venu des "besoins de la révolution". Je les côtoyais, mais ne pouvais les fréquenter, car seuls deux d'entre eux étaient autorisés à avoir des relations avec moi. Ils étaient chargés de m'aider dans mes études, ce qu'ils faisaient de leur mieux. Quand je leur disais que je n'avais pas été envoyé en Chine, mais que j'y étais venu de mon propre chef, ils ne me croyaient pas. Pour eux, c'était inimaginable. Ils ne savaient quasiment rien du monde extérieur.
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Il n'y avait pas le téléphone chez elle et je n'ai pas su son adresse. Nous continuerions à passer par sa soeur.
Le rendez-vous suivant a été tout différent. Sa soeur a trouvé le moyen de me faire savoir qu'elle voulait me voir tel jour, à telle heure, à l'entrée d'un parc de la banlieue ouest, situé au bord d'un canal et où passait très peu de monde. Nous avons échangé quelques propos anodins en poussant nos bicyclettes dans une allée déserte puis, s'arrêtant dans un endroit qui lui paraissait favorable, elle m'a appris que la police était venue trouver Wen, qu'elle était en danger et que nous devions soit cesser de nous voir, soit décider de nous marier et de lutter pour atteindre notre but quoi qu'il arrive. Ai-je été saisi de stupeur ? D'admiration, plutôt, pour le sang-froid dont la soeur faisait preuve. J'étais impressionné par la confiance qui m'était faite et heureux, au fond, qu'au romanesque se substitue aussi vite la nécessité d'agir. J'avais été maladroit jusque-là dans mes relations avec la gent féminine et j'avais décidé de ne plus rien entreprendre jusqu'au jour où je rencontrerais la femme avec qui je pourrais être heureux toute ma vie. Peut-être le moment était-il venu. J'avais aussi conscience de sortir à cet instant-là du monde artificiel dans lequel les autorités tenaient à confiner les étudiants étrangers. Je faisais un pas essentiel dans ma découverte de la réalité. Avant de nous séparer, la soeur m'a offert un petit livre qu'elle avait soigneusement recouvert de papier blanc, "L'art de la guerre" de Sunzi. Le message était clair : nous allions devoir nous battre et, le cas échéant, prendre l'adversaire au dépourvu pour l'emporter.
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L’ère des longs voyages vers l’inconnu est close.
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Les événements s'accéléraient et le paradoxe qui a sous-tendu les trois années de mes études à Pékin a pris un tour aigu : à mesure que j'étais devenu capable de lire les journaux et de m'entretenir avec les gens, la tension politique avait augmenté et progressivement rendu les échanges quasiment impossibles. La vie de tous était déterminée par d'obscures manœuvres à la tête du régime.
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