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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Moana Blues. Quel écrin doux et limpide pour accueillir le deuil bleu nuit de cette famille tahitienne. le titre annonce déjà toutes les nuances de bleu contenues dans cette lecture. « Moana, c'est le bleu absolu que prend l'océan quand le regard plonge vers les profondeurs sans se rassurer sur l'élan pailleté d'un banc de poissons (…). Moana désigne aussi l'abysse. Moana, c'est la matière bleue, à la fois aussi présente au plongeur que sa conscience et aussi désespérément fuyante, aérienne et douloureuse. (…) Moana se mérite par l'angoisse qu'il distille. Plonger dans le bleu angoisse et fascine. (…) Des ondes dans l'onde. Des sons que l'on entend aussi avec les yeux. »


Des sons comme celui d'un prénom. Parce que Moana est aussi un prénom. Celui du fils que Paulot a adopté en se mariant à une tahitienne de cette île qui l'a adopté lui, l'enfant du Maroc. Son (beau-)fils surfer dont il s'est appliqué à mériter la confiance chaque jour, y compris en lui apprenant à plonger. Ce fils qu'il pleure aujourd'hui jusqu'à la nausée. Car aujourd'hui, Moana est bleu, lui aussi. Bleu comme l'eau qui l'a recraché, alors que Paulot ne peut s'empêcher de penser : « J'aurais voulu que la mer ne rende jamais ton corps. J'aurais voulu te revoir à jamais libre et beau, souriant de toutes tes dents très blanches dans ton visage coloré par le soleil, sous la broussaille de ta chevelure, toujours tempérée de sel. Au lieu de ça, j'aurais toute ma vie sous les paupière l'image de ta chair éclatée, de ta figure bleuie, meurtrie, et pourtant affreusement reconnaissable ».


Alors Moana blues, c'est le chagrin qui envahit Paulot et la famille à la mort de ce fils, qu'il pleure à l'intérieur pour ne pas paraître faible. Et pour ne pas craquer il se parle, une litanie de mots et de souvenirs qui le submergent par vagues, et qu'il s'applique à enfiler comme des perles de larmes sur un fil de logique raisonnable. Pour ne pas perdre le fil de sa vie, de cette journée d'enterrement interminable, tenter de retrouver le sens de ce qui est arrivé. Y a-t-il jamais un sens à la mort ? Il se parle pour s'encourager, mais en réalité il parle aussi à Moana comme s'il pouvait l'entendre, pour l'accompagner dans sa mort ou la nier encore un peu ; Il lui confie ce qu'il n'a jamais osé de son vivant, s'appuie sur ce dialogue avec un mort, lui qui n'est pas croyant, pour supporter la terrible journée qui l'attend. Et les suivantes, emplies d'un vide nouveau, qu'il tente de combler avec difficulté tant il se sent par moment comme étranger à ce à quoi il assiste, comme si son âme flottait hors de son corps pour ne plus vivre ce deuil, ne plus souffrir, ne pas se noyer dans son chagrin.


La narration extrêmement sensible mise en place par Anne-Catherine Blanc reprend ce mouvement que l'on peut ressentir dans ces instants de deuil : Un narrateur extérieur prend le relai quand Paulot ne peut plus raconter, mais très vite on repasse au tutoiement, comme si le narrateur était un ami plein d'empathie pour Paulot et qu'il le soutenait, jusqu'à se fondre ensuite avec le tutoiement par lequel Paulot se parle à lui-même pour tenir le coup, puis devenir enfin le tutoiement qu'il adresse à son fils. le lecteur se laisse porter par ce courant puissant, comme pris dans les mailles d'un filet dont il ne peut plus, ne veut plus se dépêtrer. A l'aide de tous ces points de vue, on reconstitue l'ensemble des faits qui ont mené à cette tragédie. C'est avec beaucoup de psychologie et une infinie douceur que l'auteur amène le lecteur et son personnage à détricoter cette sensation de culpabilité que l'on ressent dès le départ, et qui justifie d'entendre le beau-père plutôt que la mère, à laquelle on aurait pu s'attendre. C'est beau, c'est fort et surtout bourré d'amour, de maladresses, de petites victoires, de vérités inavouées. de cette luminosité des îles, aussi, qui se réverbère sur le blanc pur et immaculé de leur deuil et en éclaire les circonstances. de bleues.


« Moana, mon fils, j'aurais aimé qu'on t'immerge en face de notre maison, au-delà du récif, dans le bleu, pour que l'océan puisse achever son oeuvre. J'aurais aimé, chaque matin, saluer le miroir pour te saluer, toi, avant de le traverser pour te rendre visite. Chaque frisson de ma peau au contact de l'eau amicale aurait été de ta part comme une caresse lointaine, un signe très doux de présente fugitive, mais toujours renouvelée. Au lieu de cela, il y aura la tombe, le cimetière. »


Moana blues, une gemme saphir dans un écrin de turquoise et de corail blanc.


« La vérité gît là-bas, à l'échancrure de la mer ».
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J'ai beaucoup aimé ce roman, qui s'apparente davantage à une introspection de la part de son protagoniste, Paulot. Paulot et ses pensées intarissables, qui surgissent comme un cri aussi assourdissant que les paroles qu'il n'arrive pas à prononcer. Car Paulot est en deuil. Il pleure silencieusement Moana, son fils, son passionné de surf, son amoureux de la mer. Il pleure intérieurement, avec décence et un peu de distance aussi, car il n'est pas facile de clamer son amour pour un fils qui est un beau-fils. Il redoute que le monde lui hurle son illégitimité au visage, lui le “père d'élection”. Comme si être père n'était qu'une histoire de biologie, de lien du sang.
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C'est un commencement dans le chagrin, dans la douleur. Celui de se lever le jour de l'enterrement et d'affronter la réalité. Moana n'est plus. L'envie de se recoucher et d'oublier, surtout la vision de ce corps bleui sous la bâche. Mais sa famille d'adoption, celle de sa femme Malinda, est là pour les soutenir. Une famille d'insulaires chère à son coeur, qui l'a adopté et qu'il a adoptée, lui le popa' vieillissant, l'ancien prof venu de la métropole.
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“Aucun père, qu'il soit père biologique ou père d'élection, ne maîtrise la mort de son fils.” Alors, comme pour panser sa blessure, Paulot déroule le film de sa vie sur l'île, ses rencontres, Malinda, sa paternité, ses projets et Moana, toujours. Peut-être qu'à force d'y penser, la peine se tarira. Comme un refrain lancinant auquel on finirait inévitablement par s'habituer, avant de se résoudre à l'accepter. Mais pour l'instant, la douleur est profonde, déchirante, physique aussi. Son corps, si fiable d'ordinaire, est en train de lâcher prise. Peut-être le signe que certains cris doivent impérativement jaillir.
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Ce monologue intérieur est comme un chemin de croix, qui nous plonge également dans les coutumes et traditions tahitiennes. L'écriture, superbe, authentique, suscite une empathie immédiate. En cette journée de deuil, on suit Paulot qui se laisse porter, un pas après l'autre, vers l'adieu au fils. J'ai visualisé sans peine sa carcasse, le regard lointain, le poids du chagrin sur ses épaules, l'obstruction de sa trachée. Je l'ai imaginé prendre part à cette journée sans y prendre part vraiment, comme envahi par un vague à l'âme, le “Moana Blues”. Un récit que j'ai trouvé aussi captivant qu'émouvant, essentiel et poétique, jamais larmoyant.
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Une chose est sûre, après mes lectures saisissantes de “Bones Bay” et “Moana Blues”, je vais suivre de près les éditions “Au vent des îles” et continuer à découvrir leurs publications.
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Roman lu dans le cadre d'une Masse Critique Babelio. Je remercie Babelio et la maison d'édition pour l'envoi de ce roman.
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Ma chronique est sur le blog.
Caroline - le murmure des âmes livres
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Attention, coup de coeur de DD !! J'aime bien ramener des lectures de mes voyages. le dernier en date m'a ainsi donné l'occasion de découvrir « Moana blues », édité par les super éditions Au vent des îles.
Moana, c'est le nom tahitien pour désigner le bleu infini de l'océan, celui dans lequel on peut sembler être appelé et s'y perdre au cours d'un plongée dans le grand large. C'est aussi le prénom du beau-fils de Paulot, brave popa'a (étranger blanc) tombé amoureux des îles et de Malinda, la mère de Moana. le problème, c'est que Moana vient d'être retrouvé mort noyé le long du récif, et que Paulot doit se plier aux us et coutumes polynésiens, tout en gérant sa douleur et sa tristesse…
Oui, je sais, ce n'est pas très vendeur, mais à partir de ce thème plutôt larmoyant Anne-Catherine Blanc parvient à nous faire découvrir quelques-uns des rouages de la société polynésienne, avec infiniment de sincérité et de justesse. Parce que le Paulot en question est loin d'être un saint, il s'insurge intérieurement sur ce qu'il observe et ne comprend pas (les –trop- nombreuses visites, la place de la religion notamment), tout en se remémorant le fil de son histoire avec Malinda. Car ne vous fiez pas aux apparences, sous leurs airs de petites fleurs des îles, les vahinés en ont sous le paréo ! Ce sont elles qui tiennent la baraque et la famille, et Malinda le prouvera largement à la fin du récit.
Je ne vous cacherai pas que ce livre m'a arraché plus d'une larme, et que cela faisait très longtemps que cela ne m'était pas arrivé. C'est dire s'il m'a touchée… Bref, j'ai adoré !
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J'ai immédiatement adhéré au résumé de Moana Blues, beau, poétique et énigmatique qui donne envie d'en lire plus ! Il consiste en un extrait du prologue, et révèle la plume si particulière d'Anne-Catherine Blanc. Percutante et empreinte de poésie, sans pour avoir rien de guindé, loin de là.

Ce résumé nous fait comprendre, si on n'avait pas deviné avec la couverture et le titre (moana signifie entre autres significations la mer, l'océan, le bleu. Mais Anne-Catherine en parle bien mieux que moi), que le livre tourne autour de la mer, on comprend aussi qu'un drame s'est passé ou se passera, et c'est tout.

C'est donc pour ça que j'ai été étonnée par la tournure du roman. Je n'ai pas envie d'en dire plus, parce que j'estime qu'il vaut mieux le découvrir soi-même en lisant le roman. Sachez juste qu'on aborde les thématiques de la mort et du deuil. L'autrice dénonce aussi les violences conjugales, le viol sur mineures... Vous l'avez compris, ce n'est pas un roman gai.

Mais il est tellement bien écrit, j'ai adoré la plume de l'autrice qui m'a prise aux tripes. Au début j'ai eu un peu de mal avec la narration, car on oscille entre présent et passé d'un paragraphe à l'autre, sans prévenir. Parfois on est dans la tête du personnage principal, qui se parle à la deuxième personne, parfois on suit un point de vue externe à la troisième personne. C'est un peu déroutant, mais j'ai fini par m'y faire pour me laisser bercer par les mots de l'autrice.
J'ai aussi apprécié le point de vue adopté par le personnage principal sur la société tahitienne des années 2000 (et qui n'a pas beaucoup changé depuis). C'est celui de Paulo, un métropolitain installé depuis une quinzaine d'années à Tahiti, celui d'un étranger qui découvre une autre culture sans mépris ni fascination. Il la prend comme elle vient, car comme Paulo le dit si bien "c'est comme ça ici, suffit de savoir". Ça m'a bien fait sourire, car ayant quitté Tahiti pour la métropole, je comprends bien le désarroi des étrangers face à certaines habitudes typiquement tahitiennes et au parler local.

Paulo, c'est un personnage gris qui a des choses à reprocher, dont une absolument abjecte. Et malgré ça, malgré le fait que ce soit un grand ronchon cynique, il a du bon en lui, ce qui permet de s'attacher à lui malgré tout.

Je recommande fortement ce roman, que vous soyez sensibles ou curieux vis-à-vis de la culture populaire tahitienne. Si vous avez peur que ce soit trop axé sur le monde maritime, n'ayez crainte, il n'est qu'en arrière-plan. Ici ce qui domine c'est le deuil, la perte brutale d'un être cher. le roman est court, à peine 170 pages pour relater une journée, le tout raconté avec des mots percutants. Lisez-le, parce que c'est beau, tout simplement.
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« Moana, faute d'un meilleur synonyme, les Polynésiens interrogés traduisent le mot par bleu.
Grand bleu s'efforce de traduire moana, mais moana est intraduisible.
Moana, c'est aussi le bleu du ciel dans sa plus grande profondeur quand l'abîme et le zénith se regardent dans les yeux. »
Moana, c'est aussi un prénom.
Ce texte de renom, doux comme de la soie est d'une beauté inouïe. Litanie, choralité intrinsèque, la poésie est à l'instar du sable qui s'écoule entre les mains subrepticement. La langue dévore les pages, sublime et attentive, altière et sans pathos. La puissance innée d'un génie littéraire.
Avant de pénétrer ce récit, de lire, il se passe l'heure de la connivence entre un chef-d'oeuvre d'excellence et ce qui va advenir d'une trame bouleversante, pure et merveilleuse.
La rencontre avec Paulot, le beau-père de Moana, endormi à jamais dans l'antre familial.
Il y a si peu encore, ce jeune homme de 16 ans virevoltait dans la vie. Complice avec Paulot, lui, qui lui a offert une paire de palmes pour noël, juste trois jours avant sa noyade.
Paulot qui a su rassembler la fratrie. Malinda et ses poulbots, enfants de pères différents. Seule, la petite dernière Urahei, est la sienne aux yeux du monde. Sauf que Paulot va les adopter, les éduquer, les pousser entre vagues et terre, contraintes et devoirs, et l'amour à pleines brassées.
Le récit se situe sur une journée. Séquence après séquence, heure sourde contre heure pleine de larmes, nous sommes en plongée dans cette torpeur où l'enterrement de Moana clôturera le rituel de l'avant, avec ses habitus, son voile blanc et ses fleurs d'hibiscus.
Dans les mouvements des aiguilles au cadran des souffrances intestines, des rappels et des attitudes dignes et pudiques. L'écriture admirable de Anne-Catherine Blanc fusionne et étincelle, dans une intégrité touchante et digne.
« Peut-être qu'elle tient ça d'un de mes gênes à moi, qui sait ? Dès qu'elle aura les pieds assez grands, je lui achèterai des palmes. Et je lui collerai le masque sur la tronche dès qu'elle saura nager. Et je la ferai plonger. Comme Moana, bon Dieu, comme Moana. Y a pas de raison pour que l'histoire bégaie. »
« Moana, mon fils, j'aurais voulu que la mer ne rende jamais ton corps. Moana, mon fils, j'aurais aimé qu'on t'immerge en face de notre maison, au-delà du récif, dans le bleu, pour que l'océan puisse achever son oeuvre. »
Paulot, fragile et aimant, qui connaît de l'amour toute sa glorification. Dans son quotidien où l'importance est dans les petits riens, les actes de magnanimité. Paulo est un altruiste, un homme qui affronte la mort, le regard perdu vers l'horizon. Un être égaré dans les limbes d'un chagrin infini.
« Le seul avantage de ce grand gâchis aura été de ventiler un peu les gènes de l'espèce humaine : à regarder Moana, ton fils, ce demi, si beau, on ne pouvait que militer pour le grand métissage universel. »
S'il est un livre olympien, théologal, dans cette orée où le bleu étale son céleste pouvoir, c'est celui-ci. On est en transmutation dans cette famille océane où Moana apaise ses silences et les douleurs. Ce texte d'une journée, d'une vie, d'un drame et de ses brûlures est tragique et touchant.
« J'attends la fin de cette journée qui n'en finit pas. Moana, pour pouvoir te retrouver dans cet univers où notre filiation s'est éprouvée et reconnue. »
Un livre d'amour, magistral. Un hymne à la filiation. Une merveille de complétude dont chaque crépitement est Moana. Inoubliable. le plus bel éloge pour Moana.
Publié par les majeures éditions Au vent des îles.
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Un petit roman superbe malgré la tragédie qui se joue comme fil d'Ariane du début à la fin par l'enterrement d'un adolescent mort accidentellement lors d'une plongée. Paulot, beau-père du défunt nous livre par le biais de ce drame, sa propre histoire, ce face à face avec son existence, il nous plonge non dans le grand bleu mais dans les profondeurs de l'être humain.

Nous parcourons ce jour d'enterrement de l'aube à l'adieu final, et l'émotion va crescendo à la mesure des mots de Paulot qui se livre au grand jour, ce jour est aussi le bilan de sa vie, la révélation tardive de cet amour paternel, sa vision de cette île, toute une panoplie de sentiments, de réflexions, un roman très riche et écrit magnifiquement.

La structure est originale, ce dialogue avec Moana décédé et entre Paulot et lui c'est autre Paulot faisant son bilan sur cette île, c'est troublant et à la fois très intime, sensible, l'émotion devient de plus en plus intense jusqu'aux limites des larmes qui naissent bien malgré nous.

Quoiqu'on en dise, la chose la plus terrible dans une vie, c'est de perdre son enfant, tout s'écroule autour de vous, en vous, tout le reste devient dérisoire et absurde, on sait qu'il y aura un après mais que sera-t-il ?

Alors Paulot confie à ce fils ses douleurs, son amour, ses regrets peut-être, il se vide de ce trop plein qui le terrasse, jusqu'au bout il fait acte de présence mais dans sa tête il est ailleurs déjà loin très loin , perdu dans l'océan, dans les profondeurs, là où il sait qu'il retrouvera Moana…

Paulot nous mène vers le Moana, même au-delà quand le bleu devient noir, dans les profondeurs des ténèbres, on voyage entre ce bleu magnifique et ce noir qui nous glace le sang.

Entre le déroulement de l'enterrement et les confidences de Paulot, entre l'exposé des us et coutumes sur cette île, on ne ressort pas indemne de cette lecture qui m'a fortement émue.
Lien : http://lesmotsdepascale.cana..
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Moana c'est le prénom du fils de Malinda, épouse de Paulot. Paulot, le déraciné. Paulot, le métropolitain, pied-noir d'origine, débarqué un jour à Tahiti pour tenter de s'y enraciner justement. Il a épousé Malinda, maman de deux garçons, Moana et Félix. Ensemble, ils ont fait la petite Urahei, la petite soeur. Moana c'est l'adolescent fou du surf, qui sans accepter son beau-père Paulot, ne le rejette pas. Et puis, à force de patience et grâce à la plongée sous-marine, ces deux-là vont s'apprivoiser et s'apprécier et devenir inséparables. Aussi lorsque Moana meurt d'un accident de plongée et que toute sa famille est inconsolable, Paulot se sent étranger, père illégitime et a peur de se sentir rejeté.
Moana blues se passe le jour de l'enterrement de Moana et c'est le déroulement de la journée de Paulot, ses questions, ses pensées, ses réflexions qui nous expliquent son arrivée sur l'île, sa rencontre avec Malinda et avec ses enfants.
Roman intérieur, très fort. L'emploi alterné des deuxième et troisième personnes du singulier donne une proximité avec Paulot, avec son discours et ses émotions. Il est pudique envers les autres, mais dans ses réflexions intimes il se livre, se découvre. Un homme simple confronté à une douleur qu'il ne peut ni partager ni diminuer. Moana, était devenu son fils ; une vraie complicité et un vrai amour père-fils étaient nés. Trop vite arrêtés, puisqu'ils n'ont pu en profiter que quelques petites années, d'où une douleur encore plus vive.
L'écriture de Anne-Catherine Blanc provoque des sensations, elle prend au ventre. J'ai compati -ce que je pouvais faire de mieux- à la douleur de Paulot et des autres membres de la famille, je me suis senti concerné et me suis même revu dans des circonstance analogues, ayant des pensées identiques à lui, des moments de solitude et des instants où j'avais l'impression de ne pas être à ma place.
Un roman très beau, très fort sur les tourments d'un homme confronté au deuil de son récent-fils adolescent. Très différent du roman suivant d'A-C Blanc, L'astronome aveugle que j'avais également beaucoup aimé. Ce qui prouve que cette auteure a beaucoup de talent et qui me donne très envie de découvrir son prochain livre.
Lien : http://www.lyvres.over-blog...
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Un ouvrage saisissant que nous propose ici Anne-Catherine Blanc, pour un premier livre édité en Polynésie chez Au vent des îles. Avec succès car son récit a été primé par les étudiants de Polynésie française lors de sa sortie en 2001.

Et pourtant, l'histoire n'est pas des plus gaies… On accompagne le protagoniste Paulot dans une journée de deuil sans fin, celui de son beau-fils tahitien, Moana. Un prénom évocateur pour un livre qui en porte le titre, dont l'écho résonne encore et encore dans l'esprit du lecteur, qui mêle parfois avec confusion le moana de l'océan au personnage, le lien du beau-père à l'enfant, de la même manière que son lien si fort à l'océan.

Le personnage de Paulot est profondément marquant. D'abord par la force des évènements qu'il traverse, dans un contexte qui lui résulte presque étranger : celui d'un deuil empreint de traditions polynésiennes, où la douleur des pleureuses ne fait que rouvrir une plaie déjà sanglante, où les veillées festives ne sont là que pour étouffer la souffrance de la perte d'un être cher. Et surtout, la douleur de se sentir seul face à la mort, seul face aux autres, ces îliens qu'il a adopté, qui l'ont adopté. Mais dans le fond, est-il vraiment l'un des leurs ? Les comprend-ils vraiment ? Loin d'être un cas unique, le personnage de Paulot colle avec le profil du popa'a installé en Polynésie pour y oublier son passé, pour renaître sur une terre d'accueil pleine de promesses, trouvant réconfort auprès d'une famille fa'amu.

Et si oui, alors, pourquoi un tel attachement à l'océan ? Plus on avance dans le récit, plus on découvre un parallèle entre la plongée dans le bleu et la plongée en soi, forme d'introspection inavouée, aux issues incertaines et pourtant, dont l'expérience est si envoutante…

Le style est profondément littéraire, on y découvre une écriture un coup très sensible et émouvante, puis plus froide et « masculine », qui jongle à la perfection entre les états d'âme du protagoniste, qui devient à chaque page plus attachant. le ton lyrique vient sublimer les scènes, pourtant assez sombres voire étouffantes, telle une lueur d'espoir.

Lien : http://www.auventdesiles.pf/..
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Une écriture puissante, émouvante, belle pour plonger dans un deuil impossible. le lecteur suit les pensées de Paulot, homme brut, silencieux, "taiseux" comme on dit en patois, qui narre la journée des funérailles de son fils adoptif à Tahiti.
Mais Moana Blues, ce n'est pas qu'un livre sur le deuil; c'est aussi la puissance des sentiments filiaux, des liens familiaux -que ce soit la famille de sang ou de coeur.
C'est une découverte de la vie polynésienne, si particulière et si belle, qui m'a rappelé de si bons souvenirs d'il y a plus de 20 ans, précisément chez Kani.
Saupoudré d'un soupçon d'ambiance marocaine également si chère.
Un peu de la dureté de la vie.
Une journée qui raconte des vies entières.
Ce livre est une magnifique découverte pour ma part. Beaucoup d'émotions.
Et pour ne rien gâcher une belle maison d'éditions qui gagne à être suivie.
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Moana blues m'a replongé dans mes années passées à Tahiti, le bruit des vagues sur le récif, le parfum du tiare, les rayons du soleil brûlant dès le petit matin, les chants,les danses et les tambours tahitiens.
Confettis (et paradis) perdus au milieu du Pacifique, ces îles sont le berceau du mélange (ou pas), des cultures, des hommes et des femmes, des récits de vie lentement digérés.
Ce roman est un témoignage sensible, intime des liens fragiles entre les personnages, de leurs richesses dans cette nature bouleversante dans un bleu fluide, sauvage et indomptable.
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