J'ai vu peu de choses dans cette vie, mais le peu que j'ai vu, je ne m'en remettrai jamais. L'exactitude affolante d'une phrase ou la bonté d'un visage, c'est du réel tellement fort que c'est dans la foulée de ça que j'écris. Alors, je fais le point sur une feuille de cerisier ou sur le rire d'un tout-petit. (p. 152)
Peut-être que chacun de nous est comme une maison avec beaucoup de fenêtres.
On peut appeler de l’extérieur et une fenêtre ou deux vont s’éclairer mais pas toutes.
Et parfois exceptionnellement, on va frapper partout et ça va s’éclairer partout, mais ça,
c’est extrêmement rare.
Quand la vérité éclaire partout, c’est l’amour.
L'écriture a par essence une tendance autistique. Le poète est un autiste qui parle. L'autiste, c'est un homme nu dans une pièce vide.
[...]
Comme l'autiste en se taisant, le poète s'ensevelit en écrivant : il vit une gloire interne et il est mort pour le monde.
[...]
Quand j'écris, c'est comme si je n'existais plus. Le plus souvent, le temps et moi on mène une vie différente : le temps s'écoule sous mes yeux comme une rivière et pendant ce temps-là je vieillis.
On n'a qu'une vie, et on l'écrit en la vivant. (p. 46)
La plupart du temps, je vis une vie ordinaire et étrangement menacée. Je suis comme un poisson qui a été rejeté sur le sable. J’attends que l’écriture revienne me chercher : alors je renais pour bientôt remourir. Et puis, soudain, il y a un moment où j’ai comme la révélation de tout, où une feuille de tilleul peut illuminer la journée entière.
Il est extrêmement rare de rencontrer quelqu'un,qu'on voie beaucoup de monde ou qu'on soit ce qu'on appelle un solitaire.La plupart des gens rendent très difficile de les rencontrer parcequ'ils ne sont pas vraiment dans leur parole ou parcequ'ils sont sans âme.
Le temps s'écoule sous mes yeux comme une rivière et pendant ce temps-là je vieillis. Dans un sens, je n'aurai pas vécu : j'aurai passé ma vie à regarder la vie.
L'empathie c'est, à la vitesse de l'éclair, sentir ce que l'autre sent et savoir qu'on ne se trompe pas, comme si le cœur bondissait de la poitrine pour se loger dans la poitrine de l'autre.
[...]
Ce n'est pas par le toucher qu'on sent le mieux mais par le cœur. Ce ne sont pas les botanistes qui connaissent le mieux les fleurs, ni les psychologues qui comprennent le mieux les âmes, c'est le cœur.
Marcher dans la nature, c'est comme se trouver dans une immense bibliothèque où chaque livre ne contiendrait que des phrases essentielles. (p.33)
Si j'ai fait une erreur, ce n'est donc pas d'avoir trop parlé de l'amour, c'est d'en avoir parlé de façon trop imprécise. Car je crois que l'intelligence cherche toujours quelque chose à aimer, le but étant de devenir à soi-même comme le ciel étoilé. La vie est une fête de sa propre disparition : la neige, c'est comme des milliers de mots d'amour qu'on reçoit et qui vont fondre, les roses sont comme des petites paroles brûlantes qui vont s'éteindre, et celui qui arrive à les déchiffrer doit être d'une précision hallucinante s'il veut être cru, s'il veut parvenir à faire voir à d'autres ce qu'il a vu.