Citations sur L'Aleph (120)
Je vis...les restes atroces de ce qui délicieusement avait été Beatriz Viterbo, la circulation de mon sang obscur, l'engrenage de l'amour et la transformation de la mort, je vis l'Aleph, sous tous les angles, je vis l'Aleph sur la terre, et sur la terre de nouveau l'Aleph et sur l'Aleph la terre, je vis mon visage et mes viscères, je vis ton visage , j'eus le vertige et je pleurai, car mes yeux avaient vu cet objet secret et conjectural, dont les hommes usurpent le nom, mais qu'aucun homme n'a regardé: l'inconcevable univers.
Toute destiné , pour longue et compliquée qu'elle soit, comprend en réalité un seul moment: celui où l'homme sait à jamais qui il est.
Personne n'est quelqu'un, un seul homme immortel est tous les hommes. Comme Corneille Agrippa, je suis dieu, je suis héros, je suis philosophe, je suis démon et je suis monde, ce qui est une manière fatigante de dire que je ne suis pas.
Homère composa L'Odyssée ; aussitôt accordé un délai infini avec des circonstances et des changements infinis, l'impossible était de ne pas composer, au moins une fois, L'Odyssée.
C’est un autre fleuve que je cherche, répliqua-t-il tristement, le fleuve secret qui purifie les hommes de la mort.
Les événements graves sont hors du temps, soit qu'en eux le passé immédiat soit coupé de l'avenir, soit que les parties qui les forment semblent ne pas découler les unes des autres.
... je vis un monument adoré à Chacarita, les restes atroces de ce qui délicieusement avait été Beatriz Viterbo, la circulation de mon sang obscur, l'engrenage de l'amour et la transformation de la mort, je vis l'Aleph, sous tous les angles, je vis l'Aleph la terre, et sur la terre de nouveau l'Aleph et sur l'Aleph la terre, je vis mon visage et mes viscères, je vis ton visage, j'eus le vertige et je pleurai, car mes yeux avaient vu cet objet secret et conjectural, dont les hommes usurpent le nom, mais qu'aucun homme n'a regardé : l'inconcevable univers.
J'en arrive maintenant au point essentiel, ineffable de mon récit ; ici commence mon désespoir d'écrivain. Tout langage est un alphabet de symboles dont l'exercice suppose un passé que les interlocuteurs partagent ; comment transmettre aux autres l'Aleph infini que ma craintive mémoire embrasse à peine ?
Le corps était un docile animal domestique et il suffisait, chaque mois, de lui faire l'aumône de quelques heures de sommeil, d'un peu d'eau et d'un lambeau de viande. Que personne pourtant ne nous rabaisse au niveau des ascètes. Il n'est pas de plaisir plus complexe que celui de la pensée et c'est à celui-là que nous nous consacrions. Parfois, une excitation extraordinaire nous restituait au monde physique. Par exemple, ce matin-là, la vieille joie élémentaire de la pluie.
Ces rechutes étaient rarissimes ; tous les Immortels étaient capables d'une quiétude parfaite ; je me souviens de l'un d'eux, que je n'ai jamais vu debout ; un oiseau avait fait son nid sur sa poitrine.
Avec horreur, je m'accoutumai à ce monde suspect ; il me paraissait impossible qu'il pût exister autre chose que des cryptes à neuf portes et de longs souterrains qui se ramifiaient. J'ignore le temps que j'ai passé à cheminer sous terre ; je sais qu'il m'est arrivé de confondre, dans la même nostalgie, l'atroce village des barbares et ma ville natale, avec ses grappes.