La réussite scolaire comparée selon le sexe : catalyseur des discours masculinistes

Une idéologie qui vise à remettre en question les acquis des femmes et à discréditer le féminisme

Discours de haine contre les femmes et le féminisme, argumentations fallacieuses, négation des rapports de pouvoir, naturalisation des constructions sociales et essentialisation des différences entre les femmes et les hommes, les masculinistes manifestent « un fort courant de résistance au changement demandé par les féministes ».

Comment ne pas penser aux mots d'ordre de la mal nommée « manif pour tous », aux pères perchés sur les grues, aux intégristes religieux et en particulier catholiques, en France…

« La présente recherche, en s'y consacrant, montre la nécessité d'articuler l'analyse sociopolitique et féministe aux théories de l'éducation pour générer des connaissances qui permettent de formuler, d'orienter ou de défendre des orientations publiques et politiques qui concernent au premier chef les femmes. Son originalité consiste à mettre en lumière les étapes successives par lesquelles s'élabore une dynamique de résistance au changement, comment elle se construit, dans quel contexte social et à quelles fins. Trop souvent, ce type de recherche intervient après le fait, à la suite de reculs importants pour les femmes ». Les discours masculinistes dévoilent une idéologie « qui vise à remettre en question les acquis des femmes et qui s'acharne à discréditer le féminisme. Elle se propage principalement par la presse écrite et les sites Internet d'associations d'hommes qui veulent récupérer des privilèges perdus au fil des ans. Certains propos incitent aussi à la haine et à la violence ».

Il faut souligner les effets de nuisance de la diffusion, par capillarité, via les liens et les sites internet, de thèses, ici anti-féministes, là ouvertement révisionnistes et racistes.

Pierrette Bouchard, Isabelle Boily et Marie-Claude Proulx présentent de manière détaillée leur démarche de recherche, en spécifiant les arguments étudiés (de nature, historiques, sur les familles, sur l'institution scolaire, sur les acteurs sociaux, sur les idéologies, d'ordre socio-politique, d'ordre sociopsychologique, d'ordre culturel, se rapportant à l'appareil politique, d'ordre économique, sur la violence, « argument principal »), les catégories d'interprétation (la victimisation des hommes et des garçons, la faute aux femmes, la faute aux féministes, la théorie des vases communicants, la transgression, le nivellement ou la négation de l'asymétrie entre les sexes)…

Quelques citations :

« L'idéologie de droite mise de l'avant dans le discours masculiniste préconise un retour aux valeurs traditionnelles ainsi qu'à la famille nucléaire (mère-père-enfants dans un lien de filiation). Il se développe dans un contexte où l'accès des minorités à la démocratie augmente. Les enjeux du discours masculiniste sont à la fois de récupérer des privilèges perdus et d'arrêter la démarche d'émancipation des femmes. le fait que les masculinistes s'attaquent aux acquis des femmes dans les domaines de la famille, de l'éducation et de la santé ne tient pas du hasard. Ce sont trois domaines dans lesquels les femmes ont traditionnellement été tenues à des rôles. En avançant que les femmes sont responsables des problèmes qu'ils dénoncent dans ces trois sphères, les masculinistes insinuent en même temps qu'elles perdent elles aussi quelque chose : leurs qualités « naturelles » en tant que femmes. Les hommes deviennent dès lors les experts de l'analyse de la situation dans la sphère privée ».

« Les masculinistes prônent le retour des mères biologiques auprès de leurs enfants. Leur objectif est de ramener la famille patriarcale traditionnelle, d'où découle la fermeture complète à l'endroit des nouvelles formes de familles et des nouveaux rôles parentaux »

« Les femmes sont encore confrontées à la violence et à la discrimination, vivent dans le contexte d'une répartition inéquitable des charges domestiques et de la conciliation famille-travail. Elles sont encore aujourd'hui confrontées aux préjugés et à la persistance des stéréotypes contre elles (à preuve ces discours), sont sur-responsabilisées face à la reproduction, et ainsi de suite. Ces contraintes entravent le parcours des femmes vers l'égalité et le plein épanouissement. le discours masculiniste ne fait pas mention des problématiques associées à des thèmes précis comme l'avortement, les grossesses non désirées, la violence, le harcèlement sexuel et sexiste, la prostitution, la pauvreté, la monoparentalité, l'abandon scolaire des filles, la surcharge de travail causée par les travaux domestiques non rémunérés, le recours à l'assistance sociale pour la prise en charge de la famille, etc. Il occulte ainsi des thèmes marquants de l'inégalité entre les sexes, cequi permet à ses auteurs d'entretenir l'idée de dépossession au profit des femmes ».

En conclusion, Pierrette Bouchard, Isabelle Boily et Marie-Claude Proulx soulignent, entre autres, que les « quelques gains sur le plan scolaire, de la part de certaines filles et non de l'ensemble, ne se traduisent pas nécessairement en gains sociaux, notamment dans les orientations, les carrières, le revenu et les conditions de travail qui sont les leurs comparativement à ceux de leurs compagnons », que le mouvement « de ressac » est porteur de la négation de la domination du groupe social des hommes, sur le groupe social des femmes…

L'étude se termine par recommandations, concernant, entre autres, la surveillance d'Internet et l'accès des journalistes d'informations sur les femmes.

Je ne sais si de telles études existent en France, quoiqu'il en soit le travail accompli par les chercheuses au Canada est une source de connaissances et de réflexions indispensables pour contrer les inventions des masculinistes, de toutes celles et ceux qui refusent l'égalité. Sans oublier le nécessaire combat des hommes pour en finir avec la virilité (John Stoltenberg : Refuser d'être un homme. Pour en finir avec la virilité, Editions syllepse 2013)
Je rappelle le petit livre du Collectif Stop Masculinisme : Contre le masculinisme. guide d'autodéfense intellectuelle, Editions Bambule 2013)
Lien : http://entreleslignesentrele..