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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"La fille du juge Boulouque" a écrit à 26 ans un témoignage d'amour magnifique et émouvant pour ce père qu'elle a tant aimé mais brutalement perdu comme gamine de 13 ans par un suicide atroce, le 13 décembre 1990.

Je connaissais l'auteure pour avoir lu ses entretiens avec Denise Epstein (1929-2013), la fille aînée de la romancière Irène Némirovsky (Kiev 1903 - Auschwitz 1942) et qui sont parus en 2008 et en pocket folio en 2014 sous le titre "Survivre et vivre". Déjà la contribution de Clémence Boulouque m'avait frappé par sa forte dose d'empathie ainsi que par la pertinence de ses questions et thèmes évoqués.

Gilles Boulouque est né en 1950 à Neuilly-sur-Seine d'un père avocat, d'origine maroco-algérienne et de la petite-fille de Léon Gaumont, le pionnier du cinéma.

Après des études de droit, il a été nommé aux tribunaux d'Évry et Bobigny, où il a inculpé le légendaire gendarme Paul Barril dans une sombre histoire de trafic d'armes, en 1981. C'est à Paris à partir de 1983 que Gilles Boulouque commence à s'occuper de dossiers de terrorisme, jusqu'à sa nomination, 3 ans plus tard en 1986, à la 14e section du parquet de Paris compétente pour les dossiers de terrorisme, la SCLAT - Section de lutte antiterroriste.
Clémence confesse que sa mère a essayé de convaincre son mari de refuser cette promotion. Hélas en vain.

L'auteure commence son livre-souvenir de ce père bien-aimé, pendant qu'elle fait des études à l'université de Columbia de New York, au moment de l'attaque terroriste des tours jumelles du WTC ("World Trade Center") du 11 septembre 2001. Par fines touches, elle remonte à son enfance, à sa vie comme enfant protégé par des gardes de corps, aux fréquentes absences professionnelles de son père, aux critiques, campagnes de presse et "phrases assassines", mais sans prendre position sur les événements qui ont conduit au coup de revolver final ou développer des théories quant aux responsabilités d'en haut et ailleurs.

Je respecte le choix fondamental de l'auteure et préfère ainsi m'abstenir de commentaire sur le terrorisme des années 1980, l'affaire Wahid Gordji, l'attitude de la République islamique iranienne de Khomeiny et des otages français d'Hezbollah au Liban.

Pour le débat télévisé houleux Chirac-Mitterrand sur Gordji du 24 avril 1988, je signale le téléfilm de Guillaume Nicloux "L'Affaire Gordji" de 2012, avec Thierry Lhermitte comme Jacques Chirac, Michel Duchaussoy comme François Mitterrand et Éric Elmosnino comme Gilles Boulouque.
Consultez Internet Movie Database.

Le portrait que brosse Clémence de Gilles Boulouque est loin de celui qu'une certaine presse en a fait. Nous apprenons que le juge est un grand sportif qui aurait aimé devenir professeur d'histoire. Un homme qui aimait préparer le petit-déjeuner pour la famille et qui faisait des pans-bagnats à sa gamine adorée. En plus, il la gâtait avec des cadeaux pour lesquels sa mère fut plutôt réticente à cause du prix.

Elle conclut quelque part : "Ce qui perdure de mon père sont ces souvenirs, cette vie un peu étrange, bordée de douleurs".

Pour les cinéphiles, je mentionne le documentaire français de 2006 "La Fille du juge" d'une heure et demie, réalisé par William Karel et dans lequel Clémence Boulouque interprète elle-même. (Voir site Cité Ressources, Cinémathèque française).

Mais de grâce ne loupez pas "Mort d'un silence" de Clémence Boulouque qui est un ouvrage absolument brillant et mémorable !
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Ce petit livre m'a profondément ému.
Clémence est la fille du juge anti-terroriste Gilles Boulouque, qui eut son bref moment de célébrité quand il fut magistrat instructeur des attentats de 1986 (souvenez-vous de la joute verbale hallucinante entre Chirac et Mitterrand lors du débat télévisé de la présidentielle de 1988. "JC : Pouvez-vous vraiment contester ma version des choses en me regardant droit dans les yeux ? FM : Dans les yeux, je la conteste.").
Deux ans plus tard, broyé par le système, la haine et les mesquineries du quotidien, le juge Boulouque finit par se tuer en se tirant une balle dans la tête.
Clémence Boulouque, étudiante à New-York, assiste aux attentats du 11 septembre 2001, et se retrouve brutalement confrontée avec sa propre histoire. "Le terrorisme, mon père, ma perte". Alors, elle écrit pour essayer de dominer son passé. Pas d'analyse politique, pas de jugement, pas de dénonciation dans ce livre ! Elle se souvient de son Papa. Simplement ! de son papa quand elle était une petite fille espiègle. de son papa qui ne pouvait pas s'empêcher de pouffer de rire avant d'achever son histoire drôle… de son papa passionné d'athlétisme et lecteur assidu de l'Equipe. Des petits riens de la vie quotidienne !
Puis la vie professionnelle de son Papa vient s'immiscer dans sa vie de petite fille. Les gardes du corps. Les menaces. La dureté des médias. La célébrité de Papa et la méchanceté des copines ("Fille de juge. Fille de pute"). On s'efforce malgré tout de vivre comme toutes les autres familles, et de rester digne et droit face à la férocité des hommes et aux "coups d'épingles" qui font souvent si mal.
Clémence sort à reculons de son petit monde d'enfant et devient une jeune adolescente. Elle reproche parfois âprement les trop nombreuses absences de son père dévoré par sa Grande Mission. Elle entrevoit aux détours d'un regard où d'une photo prise à ses dépens, l'immense souffrance de son père et le raconte avec des mots plein de retenue et d'amour perdu.
"Mon père était comme ces athlètes dont il suivait assidûment les performances, ces coureurs qui, au milieu de leur course, sont victimes d'un claquage (…); ils ont un masque de douleur, lorsqu'ils quittent le stade à cloche-pied, soutenus par un soigneur. A partir de ce mois de novembre, mon père a porté ces traits qui lui rayaient le visage".
Ce livre est empreint d'une telle tristesse qu'il vous poigne le coeur. Un livre tellement bouleversant qu'à plusieurs reprises il en est tombé de mes mains.
A lire absolument.
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Clémence est la fille du Juge anti-terroriste, Gilles Bouloque exerçant dans les années 80 à Paris.
....terrorisée à son tour, par la traque des terroristes que son père menait contre eux....
Pourquoi ce choix de lecture ? : La vague des attentats perpétrés à Paris et dans le monde a retenti en moi. J'ai aussi repensé à Salman Rusdhi et ses versets sataniques... très impressionnée à l'adolescence par cette chasse à l'écrivain, sa condamnation à mort pour le reste de sa vie, son exil....
Je plonge dans cette lecture irrégulièrement, mais elle me capte à chaque fois que j'y reviens....
C'est une écriture empreinte de gravité au fil des pages. Une pesanteur s'installe lentement. On sent le silence qui va sonner le glas de la mort du père de Clémence....
Elle nous fait alors découvrir combien elle grandit dans la solitude, protégée et surveillée comme une enfant de chef d'Etat à la fois dans l'attente du retour de son père, mais aussi dans sa conscience d'enfant, qu'elle va le perdre inévitablement...
Elle raconte avec sa lucidité d'adulte mais aussi avec son regard d'enfant demeuré intact, ses souvenirs, ses ressentis....
On comprend donc sa marche avancée vers l'inacceptable....inévitable....
Après l'inculpation de son père pour violation du secret de l'instruction, les souvenirs de Clémence se font plus flous "les quelques mois qui ont suivi ne me parviennent pas avec netteté, comme s'ils auraient été dépolis par cette affaire".
Puis dans la nuit du 12 au 13 décembre, son père met fin à sa vie en se tirant une balle dans la tête dans l'appartement familial. La vie de Clémence bascule, je retiens le mot "hurlement" écrit plusieurs fois....
A partir de la page 108 (le livre fait 129 pages) ....., fleur a eu beaucoup de mal, à lire, à ne pas pleurer..... les ressentis, la douleur de Clémence m'ont fait écho....dans cette absence qui manque à sa vie au quotidien, cette quête de recherche de son père dans "ses objets", restés discrètement présents afin de ne pas le faire mourir une deuxième fois.

Elle finit par cette phrase : "je n'ai pas échappé à mes souvenirs, ces souvenirs sont comme une chance qui blesse"....
voilà toute l'émotion de Clémence que je vous partage....à ma façon....
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Très beau témoignage, très émouvant et très pudique de Clémence Boulouque, fille du juge Boulouque en charge du dossier des attentats parisiens de 1986. Enfant, elle a connu les menaces de mort, les phrases assassines. Elle a treize ans lorsqu'en 1990, son père se suicide d'une balle dans la tête. Elle raconte sa peine immense, essaie de faire revivre son père, un homme sensible. Elle tente de comprendre ses sentiments, ses difficultés à faire face à la pression. Elle le réhabilite sans en faire pour autant un héros, sans chercher à expliquer son geste. Ce livre m'a beaucoup touchée.
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J'ai croisé à plusieurs reprises Gilles Boulouque, son épouse et ses deux enfants (dont Clémence) il y a de cela environ trente ans.
C'était à chaque fois dans un stade d'athlétisme; Gilles et moi étions des passionnés de ce sport.
La dernière fois, j'ai trouvé Gilles vraiment très perturbé ...
J'ai toujours pensé que Gilles est parti suite aux menaces qui ont pesé sur sa propre famille. Il s'est sacrifié pour protéger les siens.
Dans le livre, Clémence Boulouque nous offre des moments de vie inoubliables.
Un témoignage poignant sur son père Gilles, sa mère et son petit frère.
Merci Clémence.

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Il s'agit d'une jeune femme qui relate son enfance, celle de la fille d'un juge qui énonce dès les premières pages « Je suis la fille du juge Boulouque, du terrorisme, des années quatre-vingt, des attentats parisiens. (…) Je suis la petite fille qui a connu les menaces de mort et les gardes du corps autour de sa dixième année – les campagnes de presse, les phrases assassines ». Ce récit m'a profondément émue. Il raconte la difficulté de ce métier au travers des yeux d'une petite fille. Son père, le juge anti-terroriste, Gilles Boulouque, est connu pour avoir géré les attentats parisiens qui ont marqué la France dans les années 80. Mais, accaparé par ces difficiles dossiers, les tracas du quotidien et la brutalité du système, il finit par se tuer en se tirant une balle dans la tête.

Sa fille, des années plus tard, alors devenue une jeune femme, est confrontée aux attentats du 11 septembre 2001, qui la font retomber brutalement dans ses souvenirs d'enfance. Elle parle de son père, de son absence surtout. Elle pose des mots sur l'insoutenable manque qu'engendre la perte d'un être cher. Elle raconte comment la vie professionnelle de son père les a accaparés, lui et sa famille. Elle décrit la terreur qu'elle ressentait, les cauchemars qu'elle faisait, les inquiétudes qu'une fillette de 10 ans ne devraient jamais connaître, en raison de sa profession.

Elle ne cherche pas à dénoncer, à reprocher, à juger, elle raconte simplement. Elle adopte parfois un ton adulte qui reflète ce qu'elle ; et parfois un ton plus enfantin qui s'apparente à ce qu'elle était et a vécu. L'écriture semble être un moyen expiatoire mais aussi d'hommage, à son papa, qui pour elle n'était pas qu'un juge mais « Papa, Gilou, Loukbou, Tournesol, Mattel, Travolta », soit un être humain avec ses forces et ses faiblesses.
Lien : https://littecritiques.wordp..
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