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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Cet ouvrage est la retranscription d'un échange entre l'auteur et Jenny Plocki.
Née en 1925, rescapée de la rafle du Vélodrome d'Hiver, Mme Plocki est une militante de gauche, engagée dans l'enseignement et le féminisme. Elle a été la compagne pendant 60 ans de Jean-René Chauvin, lui, rescapé des camps de concentration et membre du comité central du Parti communiste internationaliste.
Le décor est planté pour ceux qui, comme moi avant cette lecture, ne connaissent pas ces personnalités (au sens propre comme au sens figuré).
Il s'agit donc du témoignage de cette femme à travers ses épreuves et ses engagements au cours du XXème siècle. Ce qui m'a bouleversée est le récit des insidieuses exactions quotidiennes qu'elle a subies ainsi que sa famille en tant que Juifs pendant l'occupation, les détails du quotidien qui échappent aux livres d'Histoire et aux romans, souvent mélodramatiques, qui se déroulent à cette époque.
Parce que Mme Plocki est d'une pudeur absolue mais aussi parce qu'elle a le sens de la narration, on ressent la terrible profondeur des contours qu'elle n'aborde que du bout des lèvres, sans victimisation. Elle tire sa force de l'amour de ses parents, de leur éducation dont la dernière marque est relatée dans une scène incroyable (« directives et conseils » de la mère au moment de l'arrestation du 16 juillet 1942).
Est évoquée également la politisation de l'adolescente qui accompagne son père aux manifestations et notamment à celles des grèves de 1936 ; mais aussi le goût de la culture transmis par des parents plutôt avant-gardistes, bienveillants et respectueux de la liberté de leurs enfants. Ils seront les repères qui lui permettront de finir ses études malgré les circonstances et de donner un sens à son existence en s'engageant dans le militantisme.
Ce récit mélange de façon subtile celui de la narratrice et celui de Mme Plocki, leurs activités communes liées à leur statut de voisines (une recette de cuisine, un conseil en jardinage) et la présentation des souvenirs que Mme Plocki a conservé comme son étoile jaune mais aussi le carnet des spectacles auxquels elle a assisté dès avant-guerre.
Je recommande vivement la lecture de ce « roman vrai ». A travers le témoignage de ce tragique destin individuel, il rappelle en force la cruauté des uns envers les autres, l'inhumanité devenue norme d'Etat à une époque pas si lointaine de la nôtre mais dont les témoins directs auront bientôt disparu.

Je remercie les Editions Grasset et Netgalley pour cette bouleversante découverte.
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Voici un livre beau et touchant que nous propose ici Geneviève Brisac. Alors qu'elle vient de déménager, l'auteur croise Eugénie, sa voisine, une vieille dame. Elle souhaite lui parler de Charlotte Delbo, ancienne déportée de Ravensbrück. Parler des autres pour ne pas parler d'elle, c'est l'un des points communs entre Jenny et Geneviève Brisac.
Et l'auteur nous emporte dans la conversation de ces deux voisines. L'une raconte, l'autre écrit, mais les deux à leur manière témoignent. Et l'ensemble des événements racontés, chacun des éléments qui relève de l'expérience individuelle (c'est la vie d'une personne qui est racontée) devient un témoignage du vécut et d'une mémoire collective car chaque fait est replacé dans le contexte politique et social de l'époque : lois antijuives, mesures sur la déportation, condition de la femme avant, pendant et après la guerre.
Parler de Charlotte Delbo, est une entrée en matière, mais Geneviève Brisac parvient à faire parler Jenny d'elle-même, de son parcours de jeune fille née en France de parents émigrés polonais, arrêtés et déportés. Comment a-t-elle échappé à l'horreur de la déportation ?
Cela pourrait être un documentaire, mais ce n'est pas le cas, c'est bien plus vivant, car Geneviève Brisac recompose les éléments pour mieux mettre en valeur des mots ou des actes. Elle a ‘'réinventé le plus fidèlement possible la vie de Jenny'', ce qui est en fait un roman vrai.
Entre l'auteur et Jenny s'immiscent d'autres témoignages, Charlotte Delbo ou Scholastique Mukasonga (témoignage sur le génocide Rwandais) car écrire, pour toutes, c'est naviguer entre l'oubli et la disparition, c'est perpétuer la mémoire.
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Ce petit livre, petit par sa taille et par son nombre de page, est un magnifique roman dont le sujet n'a évidemment rien d'original mais qui apporte un énième témoignage sur les atrocités de la seconde guerre mondiale.
C'est l'histoire d'Eugénie Plocki rescapée de la rafle du Vel d'Hiv, cette jeune fille de 16 ans issue d'une famille juive polonaise se retrouve seule avec son frère. Ce roman retrace l'enfance d'Eugénie, ses souvenirs et ses espoirs, du moment où sa famille quitte la Pologne à aujourd'hui; elle évoque l'installation de sa famille, l'extrémisme, la peur, la déportation puis la vie sans ses parents accompagnée de son frère. Elle évoque également l'après guerre et son engagement politique, ses convictions.

Alternant passé et présent cette histoire qui se lit rapidement, des pages pleine d'émotion mais sans patho car Eugénie ne se plaint jamais, ne regrette rien de sa vie et a avancé sans haine suivant ses idéaux et son envie de vivre. S'engager pour ne pas oublier, se battre pour lutter contre le désespoir.
Le récit alterne aussi entre le témoignage d'Eugénie et les ressenties de la narratrice en de courtes phrases qui sonnent comme un appel à l'urgence, vite, dire se que l'on a vécu pour ne pas oublier, pour ne pas faire taire les voix du passé, celles qui ont encore beaucoup de choses à nous apprendre avant qu'il ne soit trop tard.

Un bel exemple de liberté dans lequel je me suis laissée emportée avec un grand plaisir.
Lien : http://stemilou.over-blog.co..
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L'an dernier, à peu près à la même période, je découvrais à la bibliothèque Vivre d'Anise Postel-Vinay, témoignage dans l'urgence d'une femme qui avait survécu à la déportation et qui ressentait le besoin de parler, maintenant, non parce que sa fin était proche, mais parce que les événements qui avaient eu lieu en France l'avaient poussé à le faire.
Vie de ma voisine pourrait sembler tout autre, au départ, et être un échange autour de cette figure de la résistance qu'est Charlotte Delbo. Cela aurait pu, cela n'est pas. Vie de ma voisine est le récit d'une survivante, aussi, une survivante particulière puisque les parents de Jenny ont réussi à leur faire quitter le Vel d'hiv, à elle et à son frère. Ils ont dû survivre, seuls, et faire face ensuite à un autre genre de survivants – tous ceux qui ont collaboré n'ont pas été inquiétés, je ne pense pas vous apprendre une immense nouvelle.
Vie de ma voisine nous apprend aussi ce que c'était qu'être juif, en France, dans les années 30, pendant la guerre, quand il semblait encore impossible que… et puis, finalement, c'est arrivé.
Etre juif en France, c'est aussi être vu comme tel alors que les parents de Jenny étaient bien loin de croire, encore moins de se conformer aux traditions – lire à ce sujet les pages consacrées au voyage puis aux vacances chez les grands-parents.
Ne rien oublier, non plus, ni les mains tendues (la boulangère du quartier) ni les mesquineries et autres bassesses. Comme souvent, ce qui fait la force de ces récits est l'absence de pathos : ni Jenny ni Geneviève Brisac ne se livre à l'exercice de l'auto-apitoiement. Cela n'empêche pas certaines pages d'être particulièrement poignantes, comme celles dans lesquelles la mère de Jenny, au Vel d'hiv, donne à sa fille, dans l'urgence, ce qu'elle sait être les ultimes conseils qu'elle pourra donner à sa fille.
Vie de ma voisine, un livre que je conseillerai à tout ceux qui me demanderont : « que pourrai-je lire, en plus du journal d'Anne Franck, pour connaître la vie d'une adolescente pendant la seconde guerre mondiale ? »
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Certes l'histoire de Jenny Plocki et de sa famille, famille de juifs polonais venue s'installer dans la France, pays de la liberté, et prise au piège de la politique anti-juive du gouvernement de Vichy , a déjà été racontée, celle de la famille Plocki_Rajsfus, mais aussi celle d'autres familles semblables. Cependant le récit de Genevieve Brisac se lit d'une traite. Les phrases sont courtes, le "je" de Jenny-la-survivante se superpose subrepticement à celui de la narratrice. Cette efficacité du récit témoigne d'une urgence à dire, pour les derniers survivants de cette période de grande cruauté, d'une urgence à laisser la parole, pour ceux qui font office de " passeurs". le récit est donc poignant ( la scène où la mère, internée au Vel d'Hiv, se presse de transmettre tout ce qu'elle sait à sa fille, qu'elle espère voir libérée dans quelques heures est extraordinaire), mais est également une ode à l'amitié, qui a permis à Jenny de survivre, et qui lui permet, une dernière fois, de faire entendre sa voix.
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Lorsque que Geneviève Brisac emménage dans cet immeuble elle ignore tout de la voisine qui habite au-dessus.
Mais elle va finir par la connaître, et surtout à force de rencontres, et de leurs innombrables discussions, découvrir l'existence de Eugénie dite Jenny.
Eugénie née à Paris en cette fin d'année 1925, dont les parents Rivka et de Nuchim Plocki ont fui l'Europe de l'est et l'antisémitisme qui y sévissait dans les années 20.
Les années de bonheur de cette petite fille qui va dans les années 30 être de toutes les manifestations main dans la main avec son père qu'elle aime et admire tant.
Mais ce bonheur est obscurci par les nouvelles que ses parents reçoivent des membres de la famille et des amis restés en Pologne et en Allemagne.
Lorsqu'en 1939 le père de Jenny proposera de partir en Angleterre sa mère refusera ne se voyant pas encore capable de recommencer à nouveau tout de zéro.
Et très vite, l'horreur va retrapper Jenny et son jeune frère lorsqu'en juillet 1942 ils seront raflés avec leurs parents.
Mais ils bénéficieront d'une loi disant les enfants français de moins de 16 ans pouvaient être libérés.
Leurs parents dans un énorme geste d'amour leur demanderont de partir après leur avoir pendant 2 heures prodigué des conseils pour leur vie future.
Ils ne reverront jamais leurs parents, tout comme ils ne reverront aucun des autres enfants qui avaient été arrêtés avec eux et dont les parents n'avaient pas voulu se séparer.
Jenny et son frère devront donc apprendre à vivre seuls dans le Paris de tous les dangers.
Mais grâce à un réseau d'amitié ils réussiront à survivre.
Après la guerre, Jenny n'aura alors de cesse d'essayer de savoir ce qui était arrivé réellement à ses parents et si elle pourra reconstituer le parcours de son père, elle ne saura jamais rien de sa mère.
Mais Jenny se relèvera, deviendra institutrice et combattra toute sa vie pour ses idées.
« Vivez, espérez » tels étaient les deux derniers mots du tout dernier message que son père a pu lui faire passer avant de partir de Drancy.
Un superbe roman empli d'amour, de joie et d'espoir malgré la noirceur des événements tragiques qui ont bouleversé à jamais la vie de cette adolescente qui les a bravement traversés.
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boulversant! pas d autre mot
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Jenny traverse la vie comme elle a traversé la guerre, en portant fièrement ses valeurs, qui lui ont été transmises par ces parents disparus pour lesquels elle a une fierté sans faille, encore aujourd'hui, elle qui est née en 1925. Ce livre est une boule d'énergie, de colère et de révolte face à l'avancée meurtrière de l'histoire des années 1930 et 1940, c'est aussi un récit sobre, humain et clairvoyant sur la force des personnes qui savent comprendre.

De sa petite enfance à la fin de la guerre, nous suivons les changements sociaux et politiques en même temps que nous apprenons à connaître la famille Plocki. L'écriture est d'une intimité et d'une amicalité telles que nous avons l'impression, nous aussi, de prendre le thé en l'aimable compagnie de la voisine du dessus, qui devient l'amie.
Lien : https://linktr.ee/usvamiscel..
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Jenny Plocki raconte à l'auteur, sa voisine d'appartement, sa vie de fille de Juifs polonais installés à Paris, puis déportés à Auschwitz. Épargnée en tant qu'enfant française, elle vit seule dans l'appartement familial avec son frère. Obtient son bac, devient institutrice. Une femme pleine de courage. Histoire des gens autour d'elle qu'elle divise définitivement en deux parties, ceux qui comprennent et puis les autres. Parmi ceux qui comprennent, Monique, son amie de toujours. Très beau texte, très simple, très émouvant.
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A travers ce bouleversant roman, Geneviève Brisac rapporte ses échanges avec Jenny, une force de la nature, une femme engagée politiquement qui n'a jamais renié ni ses origines, ni ses convictions.
Les « je » de l'auteure et de Jenny se confondent en une seule voix, celle du présent et celle du passé. Vie de ma voisine est la traversée du siècle à travers les yeux d'une enfant, les souvenirs d'une vieille dame remplie de vie et d'espoir. de leur arrivée en France, à la montée de l'extrémisme, de leur voyage en Pologne durant l'occupation en passant par la déportation de ses parents, la faim, la misère de deux enfants livrés à eux même. Puis l'après-guerre, Mai 68 et les commémorations, rien n'est laissé au hasard. Tout est inscrit, avec précision et émotion. Emotion qui nous submerge à chaque page grâce à une écriture qui se fait vive, concise, comme pour appuyer sur ces souvenirs qui pourraient à tout moment disparaître.

Ainsi la plume de Geneviève Brisac se fait l'écho d'une vie mais aussi d'un témoignage collectif.
Elle dresse le portrait d'une femme rayonnante qui ne manifeste aucune haine ni aucune rancoeur et qui aura toute sa vie avancé en écoutant son coeur, qui aura vécu pour transmettre aux autres sans jamais renoncer à ses idéaux.
Ce livre est un double hommage vibrant : celui d'une femme à sa famille, à une mère déterminée, éprise de liberté, à un père aimant, aux convictions fortes. Et celui d'une voisine à une femme admirable devenue une amie et qui brille par son courage.
Lien : http://livresselitteraire.bl..
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