OLIVIER, BAPTISTE, OSCAR , CLAIRE ET LES AUTRES ...
«
BFF » (Best friends forever) gros roman graphique de 255 pages de
Thomas Cadène et
Joseph Safieddine paru aux éditions Delcourt est consacré à une bande d'amis qui se connaît depuis l'adolescence et entame plus ou moins facilement le virage vers l'âge adulte et les responsabilités. Il s'agit donc d'un roman « choral » : on suit les protagonistes dont les histoires se recoupent et s'entrelacent ; histoire d'amour, histoires de cul, d'amitiés et de trahisons et une bonne dose de nostalgie pour la jeunesse qui s'éloigne. On a souvent l'impression d'être dans un film, la structure est très sérielle ou cinématographique d'autant que «
BFF » a d'abord été diffusé sous forme d'épisodes en ligne sur la plateforme Webtoon Factory.
Cet album ressemble cependant moins aux films de bandes de copains à la Sautet aux personnages complexes, veules parfois mais toujours attachants et humains qu'à un catalogue de stéréotypes à la « Petits mouchoirs » de Canet. Les personnages sont tous des « types ». Il y a d'abord Olivier, le « héros » gentil voire gentillet, autrefois l'amoureux de Claire, jeune femme qui s'apprête à convoler avec Oscar le beau gosse de la bande. Ce dernier aime surtout sa petite personne ; il ne pense pas réellement avec sa tête -et même pas tout court - puisqu'il trompe sa fiancée régulièrement avec la meilleure amie de cette dernière, Camille, pourtant heureusement en couple avec Clément. On trouve aussi Céline, la moche du groupe, pas vraiment intégrée tout juste acceptée car elle fait ainsi briller les deux étoiles féminines du groupe et puis Baptiste, l'éternel célibataire, amateur invétéré de comique de répétition …
Rien de nouveau sous le soleil donc … Pourtant, les auteurs essayent de mettre en place des ressorts dramatiques : Olivier est devenu un pianiste de renommée internationale connu sous le nom de scène d'Olivier Gro (en mémoire du surnom dont l'affublaient ses bienveillants camarades durant son adolescence pour se moquer de ses rondeurs) mais il a caché sa réussite à ses amis afin de ne pas susciter leur jalousie et détruire leur amitié. Il a donc comme un super héros une « couverture » : il est intermittent du spectacle et vit dans un studio défraichi et il possède un « repaire » : un somptueux appartement haussmannien de 150m2 avec piano à queue. Mais ce point de départ invraisemblable enlève toute crédibilité au propos et le personnage reste bien trop fade pour qu'on s'identifie à lui de quelconque façon. le secret de Baptiste est lui bien plus crédible et l'on aurait aimé qu'il soit davantage développé car lorsqu'on le découvre, le personnage prend une aura de clown triste. de même les personnages les plus aboutis sont finalement les deux personnages secondaires de Céline et Clément. Les séances chez le psy de celle-ci permettent de varier la narration et exposent un point de vue très lucide sur ce groupe d'individualités égocentriques tout comme la pièce rapportée qu'est Clément et qui voit les membres de la bande tels qu'ils sont et non tels qu'ils se voient avec complaisance. Il permet aussi de montrer le côté autodestructeur de Camille qui acquiert ainsi de la profondeur et sort du cliché.
Le graphisme est assez plat. Les personnages féminins se ressemblent beaucoup et le côté « cartoonesque » renforce l'aspect stéréotypé. le choix des couleurs n'est pas toujours harmonieux ni bienvenu tout en restant assez sage (une palette plus crue aurait davantage mis en évidence la violence larvée des rapports et la dichotomie entre l'apparence et la réalité). Et il y a bien sûr la police de caractère difficilement lisible qui rend la lecture assez désagréable.
Ce n'est donc pas un coup de coeur et, même si je l'oublierai rapidement, je suis contente néanmoins de l'avoir lu. Je remercie Netgalley et les éditions Delcourt de m'avoir permis de découvrir ce titre.
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BFF Delcourt# Netgalley France