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Citations sur Masse et puissance (17)

Nous partirons d'un phénomène familier à tout le monde, la joie de trancher. "Mauvais livre", dit quelqu'un, ou "mauvais tableau", et il se donne l'apparence d'avoir à dire quelque chose d'objectif. Toujours est-il que sa mine trahit qu'il le dit avec plaisir. Car la forme du jugement trompe, et ne tarde pas à se faire personnelle. "Mauvais auteur" ou "mauvais peintre", entend-on tout de suite après, du ton dont on dirait "un méchant homme". On a constamment l'occasion de prendre des amis, des inconnus et soi-même en flagrant délit de trancher ainsi; impossible de méconnaitre cette joie du jugement négatif.
C'est une joie dure et cruelle que rien n'égare; le jugement n'est jugement que lorsqu'il est porté avec une sorte d'assurance inquiétante. Il ignore la clémence, comme la prudence. il est vite trouvé; le plus conforme à son essence est de se former sans reflexion. La passion qu'il trahit tient à sa rapidité. C'est le jugement inconditionné et le jugement rapide qui se peignent en plaisir sur les traits de celui qui juge.
En quoi consiste ce plaisir? On écarte quelque chose de soi pour le mettre dans un groupe médiocre, étant admis que l'on appartient soi-même à un groupe meilleur. On s'élève en abaissant autre chose. On suppose naturelle et nécessaire l'existence de ces deux groupes distincts, représentant des valeurs opposés. quel que soit le Bon, il est là pour contraster avec le Mauvais. On détermine soi-même ce qui appartient à l'un et à l'autre.
C'est la puissance du juge que l'on s'attribue ainsi...
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Il est important pour la masse que le bourreau lui montre la tête de la victime. ... La masse, ici constituée de têtes au regard fixe, acquiert le sentiment de son égalité à l'instant où cette tête la regarde fixement à son tour. (p. 51)
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Que les deux groupes se confrontent comme des rivaux dans un match ou comme une menace sérieuse l'un pour l'autre, la vue, ou simplement l'image puissante de la seconde foule, empêche la désintégration de la première. Tant que tous les yeux sont tournés dans la direction opposée, le genou reste bloqué par le genou; tant que toutes les oreilles écoutent le cri attendu de l'autre côté, les bras se déplaceront à un rythme commun.
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Le secret est au fond le plus intime de la puissance. L’acte d’épier est secret par nature. On se cache ou s’assimile au milieu et ne se trahit par aucun mouvement. L’être aux aguets disparaît tout entier, il s’enveloppe dans le secret comme dans une autre peau et reste longtemps à son abri. Une combinaison singulière d’impatience et de patience caractérise l’être dans cet état. Plus il y persiste, plus s’intensifie son espoir de réussite soudaine. Mais pour obtenir quelque réussite, il faut que sa patience s’accroisse infiniment. S’il la perd un instant trop tôt, tout est perdu et il lui faut, accablé de sa déception, recommencer depuis le début.
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Le secret vrai est ce qui se déroule à l’intérieur du corps. Avant de pouvoir exercer son métier, un homme-médecine, dont l’action est fondée sur sa connaissance des phénomènes du corps, doit se soumettre à de très singulières opérations
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L’élément de contagion, tellement important en cas d’épidémie, a pour effet de porter les gens à s’isoler. Le plus sûr est de n’approcher personne, n’importe qui pouvant déjà être contaminé. Certains fuient la ville et se dispersent sur leurs terres. D’autres s’enferment dans leurs maisons et ne laissent entrer personne. Chacun évite l’autre. Maintenir la distance est l’ultime espoir. La perspective de vivre, la vie elle-même s’expriment pour ainsi dire dans cette distance par rapport aux malades. Les contaminés se transforment progressivement en masse morte, les autres se tiennent à l’écart de tout le monde, souvent même de leurs proches parents. Il est à noter que c’est ici l’espoir de survivre qui fait de l’homme un individu isolé, face à lui la masse de toutes les victimes.
Mais dans cette condamnation collective où quiconque est touché passe pour perdu, voici le plus étonnant : il y a un petit nombre de gens comptés qui guérissent de la peste. On peut imaginer ce qu’ils éprouvent au milieu des autres. Ils ont survécu, et ils se sentent invulnérables. Ainsi, ils peuvent même se payer le luxe d’avoir pitié des malades et des moribonds dont ils sont entourés. « Ces gens-là, dit Thucydide, se sentaient si exaltés par leur guérison qu’ils pensaient ne plus pouvoir même à l’avenir jamais mourir de maladie.
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C'est seulement tous ensemble que les hommes peuvent se libérer de leurs charges de distance. C'est exactement ce qui se produit dans la masse. Dans la décharge, ils rejettent ce qui les sépare et se sentent égaux.
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