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3,37

sur 244 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Tous les livres vieillissent. Mais sur ‘le diable amoureux' et quelques autres, il plane comme un souffle d'intemporalité. C'est bizarre, en un sens. Voila l'histoire du jeune chevalier Alvare, qui invoque le Diable, et le soumet comme son serviteur. le diable se venge en prenant la forme d'une jeune femme, Biondetta, et en faisant tout ce qu'il est en son pouvoir pour le séduire. Bien entendu, le chevalier s'accroche à ses obligations morales et au souvenir de sa chère mère pour ne pas céder. Or aujourd'hui le sexe hors mariage n'a plus rien d'un tabou, et on devrait surtout rire des scrupules du chevalier !

Mais il y a dans l'écriture un dynamisme et un sens du rythme certain. Et surtout, au-delà de Alvare et de ses états d'âmes, il y a le Diable. Dans les contes populaires, l'homme triomphe généralement de lui par la ruse ; mais cette fois c'est lui qui mène le jeu. Avec quelle habileté et quel cynisme on le voit déployer peu à peu ses stratagèmes autour du pauvre naïf qui se croyait si malin ! Il y a une truculence incroyable dans ce chameau grimaçant métamorphosé en femme, se retranchant derrière sa pudeur et ses larmes. Suprême mépris : il finit par le planter là. L'âme d'Alvare ne l'intéresse même pas.

De Milton aux ‘Visiteurs du Soir' et jusqu'à ‘Docteur Who', quand l'homme se heurte au prince du mal, c'est généralement à son corps défendant, et il le paye cher. Un seul a eu la témérité de l'appeler à lui pour en faire son serviteur. Saluons Cazotte et son héros Alvare, qui ont bâti le personnage du Grand Méchant Sardonique. ‘Avenger' pourrait les remercier, il leur doit Loki.
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Don Alvare est un Espagnol au service du Roi de Naples. Par une relation, Bernardillo, il acquiert des connaissances dans le domaine de l'occulte et est poussé, par forfanterie, à invoquer le Diable. Celui-ci, peu disposé à se soumettre à ce nouveau maitre, se présente à lui sous la forme d'un chameau monstrueux, puis d'un épagneul, enfin, d'un page. Partageant la vie du jeune homme, le Diable succombe à son charme, et, sous la forme de la belle Biondetta, il s'attache, sans contrainte et de lui-même, par amour, aux pas de l'Espagnol.

J'ai beaucoup aimé ce livre de Jacques Cazotte, tout autant roman courtois que conte fantastique. "Le diable amoureux" est, dit la préface, à l'origine des romans fantastiques à la française (comme ceux de de Nerval par exemple). La préface indique également que ce livre a connu trois dénouements différents : dans deux d'entre eux, Don Alvare était puni de sa prétention et de ses erreurs ; c'est cependant la troisième, dans laquelle la morale est sauve et où tout finit bien (pour Alvare), qui a été éditée par Les mille et une nuits. Et c'est bien dommage !

Que dire de ce Diable amoureux ? le livre est court, la lecture est aisée, le langage poétique. Je n'ai pas beaucoup d'amitié pour le héros de cette aventure, censé être le représentant du Bien, comme Biondetta, le Diable, est celui du mal. On peut lire ce roman comme une bataille gagnée par le "pénitent" contre la tentation et la luxure. Sans aucun doute.

Pour ma part, j'ai lu le Diable amoureux parce qu'Arturo Perez Reverte l'évoque fréquemment dans son Club-Dumas (plus connu comme La neuvième porte, porté au cinéma par Polanski). Je ne suis donc pas arrivée neutre dans cette histoire. Et qu'y vois-je ?
Biondetta, une jeune femme, qui serait le Diable, revendiquant sa part d'ombre ? Elle est dangereuse, certes, belle et dangereuse. Mais qui l'a convoquée ? Qui l'a contrainte à obéir ? Elle troque son immense pouvoir pour s'incarner en humaine, assumant sa part de femme et sa part de puissance, volontairement, par amour, et se jette corps et âme aux pieds de notre héros. Qu'a-t-elle en échange ? Mépris, abandon, silences. Alvare joue au chaud et au froid, partagé entre sa passion des sens et la peur de perdre son âme et finalement, pris de terreur et de remords par un songe, s'en va courir, je vous le donne en mille… dans les jupes de sa maman !! Voilà un homme qui assume ce qu'il fait.

Histoire fantastique, roman courtois, allégorie du combat du bien contre le mal, etc…, chacun lira ce qu'il voudra dans ce court roman. La seule chose à retenir, c'est que c'est un roman à lire, parce qu'il est emblématique d'un courant littéraire français, parce que l'histoire est plaisante et l'écriture pleine de subtilités ! Ce serait dommage de ne pas en profiter !
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Ultra sexualisé, le Diable hermaphodite du Tarot se travestit lorsqu'il est amoureux.
Le monstre à tête de chameau de Cazotte se métamorphose, à la demande de l'Initié, qui s'initie aux mystères de la cabale, en chienne, en esclave et en femme.

Il est plus qu'inquiétant ce Diable de Cazotte, mais il est en même temps plus qu'amusant ce qui ne fait pas de mal au Diable, d'être ridiculisé. Quoiqu'en le dédiabolisant, le diable, on le rend peut-ête étrangement familier ...

Dans le doute, méfiez-vous et évitez de suivre n'importe qui dans des recoins obscurs, car généralement, ce n'est pas dans les recoins obscurs que nous sommes le plus éclairés ... Et méfiez-vous de vos lectures aussi ... Car la curiosité est un vilain défaut ...

Ou mettez vos scrupules de côté et lisez le Diable Amoureux et représentez-vous le diable avec une tête de chameau et surtout, surtout, à vos risques et périls, adressez-lui un défi dès qu'il vous posera la question " Che vuoi ?" avec le geste des Italiens qui va avec. Ensuite, munissez-vous d' un crucifix pour faire face aux épagneuls que vous rencontrerez et qui tenteront de vous lécher les pieds. Enfin, méfiez-vous des belles jeunes femmes dévouées qui imitent la vertu et la pudeur, ou qui surjouent le mépris, la jalousie, avant de se jeter sur vous telles des nymphomanes ! Sinon, vous risquez de vous faire violer par un Diable transformiste et hermaphrodite.

Et l'amant.e Biondetto-Biodetta ne se révélera à vous qu'une fois la relation consommée et vous ne pourrez vous en prendre qu'à vous-même car le Diable vous aura prévenu mais vous ne l'aurez pas écouté, et tant pis pour vous si vous tombez amoureux du diable amoureux, qui déçu.e de votre réaction au sortir du lit, brisera l'illusion pour votre plus grand malheur (là vous vous découvrez des tendances sexuelles assez poussées, à la limite de la zoophilie la demoiselle ayant une tête de chameau, ne l'oublions pas) et pour votre plus grand bonheur aussi car si elle s'enfuit avant le mariage, comme c'est dans le cas dans cette histoire, ce n'est peut-être pas plus mal ?

Quoiqu'il est peut-être un peu tard, le mal doit être fait. En effet, il est possible que le diable ait réclamé son dû car le diable de Cazotte s'enfuit après le mariage, une fois qu'ils ont partagé le lit du coup il est possible que le diable se soit reproduit cette nuit-là ... Et il aura sûrement fait des émules ce diable ... D'autres diables naîtront du Diable de Cazotte. Tous les diables de la littérature du XIXème ... Ce qui explique peut-être pourquoi Cazotte sera considéré comme un précurseur (par les écrivains du XIXème s'étant adonné au fantastique), comme un libre penseur, comme un Illuminé par Nerval. Et la littérature française post-Siècle des Lumières, étonnamment raffole des histoires fantastiques, comme si l'obscurantisme l'avait finalement emporté sur le siècle des Lumières ?

Enfin, pour rendre honneur à Cazotte, il ne faut pas oublier qu'il n'oublie pas la morale et qu'à la fin, le Diable ne semble pas l'avoir emporté ...

Sauf que je crois personnellement qu'il l'emporte à la fin car il aura eu la réaction qu'il attendait à son Che vuoi ? En effet, le jeune Initié qui au début, maîtrise sa peur, et ose tenir tête au Diable, se retrouve terrorisé à la fin ( après s'être fait séduire, tromper, voire carrément violer, pour dire les choses sans pudeur, par le Diable lui-même).

Ou peut se dire que le Diable était réellement amoureux, comme annoncé dans le titre et peut-être qu'il s'enfuit se rendant compte que son amour sera nécessairemment malheureux, ce qui donne un petit côté romantique au livre et ce qui redonne un titre de noblesse à Biondetta, au Diable à l'apparence féminine ...

Mais étant donné que l'apparence véritable du Diable est l'être à tête de chameau, tel qu'il est au début et à la fin, j'ai plutôt tendance à croire que la peur l'emporte sur l'amour dans cette histoire mais qu'heureusement pour le lecteur, l'humour l'emporte sur la peur.
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Grand classique de la littérature gothique, qui a surtout fleuri outre-Manche (Ann Radcliffe, Matthew Lewis, Horace Walpole). Alvare aime la diablement belle Biondetta : on voit tout de suite où l'on veut en venir. C'est assez court (moins de 100 pages), contrairement aux ouvrages des Anglo-Saxons, et d'une efficacité redoutable. Pas un grand classique pour rien, me direz-vous.
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CHE VUOI ?

Ah! le Diable et les Hommes !
Une histoire pour l'éternité,
Intemporelle,
Universelle,
Une histoire qui ne prend pas une ride.
Parce qu'après tout l'Homme a de tout temps cédé à la tentation d'un pacte avec le diable, siège d'une perfide illusion.

Oui, mais quand le diable tombe « amoureux », c'est tout l'art de Jacques Cazotte, précurseur de la littérature fantastique, qui s'agite et s'exécute pour nous conter les aventures du jeune intrépide, et néanmoins naïf, chevalier Alvare…

Un défi nocturne,
un excès de confiance,
une bonne dose de naïveté,
une intégrité morale tremblotante …
Est pris qui croyait prendre.
Alvare veut soumettre la figure du diable à son service ? qu'à cela ne tienne !
C'est dans la peau de Biondetta, une femme aux charmes insistants et difficilement résistibles qu'il se présente à lui. Tentatrice sans relâche, elle met les sens et la soi-disant vertu du jeune Alvare à rude épreuve, ne lui laissant d'autre choix que de chercher à pleurer dans les jupes de sa mère…

C'est pervers et cynique, le lecteur sourit volontiers devant l'embarras de celui qui en oublie que c'est le diable et sa malice légendaire qui mènent la barque.
La diablesse l'emportera-t-elle sur la morale du jeune faux téméraire ?
Le dénouement que Cazotte a fini par réécrire nous offre les clés d'un suspense rythmé par des rebondissements jusqu'aux dernières lignes.
Le texte est court, dense et enlevé. Comme Alvare on valse de ville en ville dans les bras de l'éblouissante Biondetta et on se laisse transporter par l'écriture dynamique de Cazotte et son histoire cruellement maligne.
Qui triomphera ?
L'Homme ou Belzébuth ?
Che vuoi ?
c'est à cette question que doit répondre Alvare … pour son salut ou pour sa perte…

Une relecture diablement succulente.

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