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Citations sur La dernière leçon (57)

J'ai caressé ton front, tes cheveux blancs, ton visage chaviré de fatigue, de déception.
Les choses ne s'étaient pas passées comme tu l'aurais souhaité.
Tes yeux étaient fermés. Tu étais si pâle que tout à coup, sans effort, je t'ai vue en gisante. J'ai pu t'imaginer dans la mort. On aurait dit qu'elle était déjà en toi, que déjà elle travaillait pour toi, en alliée, en amie, alors que nous... Alors que moi qui disait t'aimer en caressant ton front, tes cheveux... Moi, ta fille, si sûre, jusque-là, de mon amour... J'ai trouvé la mort plus aimante que moi. Oui, c'est cela : plus aimante.
Ce doit être à cet instant que tout a basculé, que tout s'est décidé avant même que tu ne me parles, dans cet instant stupéfiant, encore inexplicable, je me suis sentie comme prise en défaut, en défaut d'amour. Jusqu'à être jalouse, oui, jalouse de la mort, ton amie la mort.
Je t'avais donc déçue, et penaude j'étais, assise sur ton lit. L'as-tu sentie ? Tes yeux se sont ouverts. Les deux larmes chétives qui ont mouillé ta peau transparente semblaient les dernières gouttes d'une source qui s'épuise et qui le sait. Au bout de vos forces, au bout des larmes vous étiez, la source et toi.
Sans me regarder, tu as prononcé ces mots, plus épuisés encore que les larmes : " Vous ne comprenez pas. Il faut m'aider maintenant."
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Un jour anniversaire, on ne se réveille pas comme pour un jour ordinaire. Le jour anniversaire est en surcharge d’émotions.
À l’état du moment, heureux ou malheureux, s’ajoute quelque chose d’autre qui n’est pas prévisible dans ses effets : la conscience aiguë du temps et, souvent avec elle, en un éclair, la mémoire de tous les anniversaires d’avant, avant celui-là, dans une seule et unique pensée qui les confond tous et nous rend nostalgiques, parfois, souvent, toujours.
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Tout devenait trop loin, trop lourd, trop haut, trop bas, inaccessible en un mot, ou au prix de tant d'efforts que ta tête, encore vive et fière, ne voulait plus. Elle ne voulait plus que le corps fourbu, moulu, rompu, peine davantage. Et puis, après le corps, qui dit que le lierre ne gagnerait pas la tête, vive et fière, pour l'étouffer à son tour, l'empêcher de marcher droit ?
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Page 19
Nous dire ? Ne pas nous dire ? La question t'a déchirée toi aussi
"Je vous croyais préparés à l'entendre..."
Oui, en effet, tu étais en droit de nous croire préparés. Je croyais l'être moi qui avais promis, solennellement, d'être au rendez-vous, de vivre ce moment, avec toi, sauf que... l'est-on jamais?
Est-on jamais préparé à entendre, de la bouche de sa propre mère, la date choisie de sa mort, même si cette mort a été admise, dans son principe, depuis fort longtemps ?
Non, maman.
C'était trop demander, Trop.
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Il faut parfois l’aimer très fort, la vie, pour préférer la mort.
Il arrive que le choix de la mort soit un hymne à la vie.
J’admettais maintenant, sans effort, que tu souhaites fermer, sans honte, les yeux qui avaient si bien veillé à la marche de ton petit monde, et du grand monde aussi.
Droit de les fermer, les yeux, de ton propre gré, comme on décide d’aller dormir parce qu’il est l’heure, tout simplement, et le devoir de vie accompli. Plus de surveillante pour t’en empêcher. Droit de mourir. Droit de mourir dans la dignité parce que tu t’étais bien battue contre le temps, contre toi-même, jusqu’aux limites de ton propre vouloir.
Le choix de fermer les yeux en mettant fin à tes jours avait nom récompense. Mourir n’était pas indigne, c’est de rester, si fatiguée, qui l’eût été. Difficile d’expliquer cela, aux gens, plus tard : « Mais pourquoi donc votre mère a-t-elle mis fin à ses jours ? Elle était malade ?
— Non. Elle était fatiguée. »
Incompréhension. Fatiguée. Était-ce une raison pour mourir ?
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Mais, à ma grande surprise, l'image de la délivrance me visitait de plus en plus :
" Songe au cadeau qu'elle te fait - me soufflait la voix - , ce corps, cette tête aimés, tu ne les verras pas se défaire davantage. Tu n'assisteras pas au spectacle déchirant de leur mort lente, cruelle.
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Le droit à mourir dans la dignité t'était devenu devoir, et ce devoir j'en avais adopté le principe. J'en admirais la pertinence jusqu'à y songer pour moi-même, si un jour, moi aussi, je me sentais confrontée à une forme possible d'indignité.
Tout était dans la définition de l'indignité. Où celle-ci commençait-elle ? Selon quels critères ? Jusqu'à quelles limites de l'insupportable ?
(p. 51)
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Dans la nuit, j'ai pensé au brassard noir que l'on portait, autrefois, lorsqu'on avait perdu un être cher. J'ai regretté que ce ne soit plus l'usage, ce signe extérieur de la tristesse. Aujourd'hui, la souffrance du deuil ne se partage pas. Elle demeure secrète et solitaire. Pour ne pas dire taboue.
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[...] pour aller au bout de ton geste, il te fallait rassembler tant d'énergie que, si celle-ci s'épuisait, si tu parvenais trop tard à la frontière, tu n'aurais plus la force, ni physique ni psychique, de l'accomplir. D'où ton obsession sur l'état des lieux, le recensement incessant de tes facultés. En dépit de l'épuisement qui te gagnait et qui gagnerait cette bataille, perdue d'avance, contre le temps, il te fallait la tenir en réserve, cette force précieuse, la préserver de l'érosion implacable de la nature, être sûre que, au dernier moment, elle ne t'abandonnerait pas, ne te trahirait pas, que tu pouvais compter sur cet ultime sursaut de tout ton être pour sauter le muret, proprement, dignement et seule. (p. 77-78
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"Mais c'est bien la peine de mort ! C'est normal d'avoir de la peine quand quelqu'un est mort !"
Génie de l'enfance qui transformait la punition en chagrin!
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