Aspiration à la mort, clémence du ciel...Quoi, ce corps réduit à un amas de chair saignante est-il encore capable de sentiment, de pensée?
Ce monde, suffoquant d'odeurs de sueur, d'urine et de sang, n'a pas étouffé toute mémoire?
Sous les coutelas, la chair saignante, l'espace d'un éclair, se rappelle encore avoir été choyée, dorlotée par une mère, par une femme. Lui revient encore un chant d'enfant dans cet abîme de terreur régi par des monstres. Horreur, horreur, horreur!
A ce point de ratage, l'horrible et inutile question encore : pourquoi tout ceci, en ce coin perdu de l'univers, au milieu de millions d'étoiles ?!
Seulement voilà: si l'amour passion est la plus grande félicité, il est aussi la plus grande souffrance.
Le désir du gain ne connaît point de frein ; les forts goulûment dévorent les faibles.
Si tout est regret, le plus grand ne serait-il pas de ne pas avoir aimé ?
Le chant le plus authentique est plus qu'un produit maîtrisé par l'esprit; il jaillit bien de l'âme. La grande affaire pour un artiste, j'en suis persuadé maintenant, c'est d'entendre et de donner à entendre l'âme qui l'habite et qui résonne de fait à l'âme cachée de l'univers.
Est-ce sur un coup de tête, ou poussé par un désir surgi du fond de mon être? Est-ce là un acte de vanité, ou un sursaut de dignité? M'est-il possible d'y voir clair?
Noble amitié, noble amour. Heureux ceux qui connaissent les deux dans le même temps. Si l'amour enseigne le don total et le total désir d'adoration, l'amitié elle initie au dialogue à cœur ouvert dans l'infini respect et à l'infini attachement dans la non-possession.
Les deux, vraie amitié et vrai amour, s'épaulent, s'éclairent, se haussent, ennoblissant les êtres aimants dans une commune élévation.
Ce dont on vit, on meurt avec. C'est le sort de tout artiste, c'est le sort de tout homme.
L'empereur inaugural règne par une terreur de plus en plus extravagante. Un mot, un geste de travers, ou même un simple soupçon; et voilà un innocent qualifié de coupable. Pour le punir, on consulte la liste: un nombre impressionnant de châtiments est prévu pour un nombre impressionnant de cas. Toutes les parties du corps sont visées: mains coupées, jambes amputées, nez ou oreilles sectionnés, yeux crevés, langue arrachée, perforation, castration... Celui qui est condamné à la peine capitale entraîne la mort de tous les membres de sa famille, voire de sa tribu, soit de dizaines ou de centaines de personnes. De toute façon , la vie d'un humain ne vaut pas plus que celle d'une bête de somme.Les individus sont comme corvéables à merci. On en mobilise des centaines de milliers pour la construction de palais. On en déporte plusieurs millions pour bâtir la Grande Muraille. Peu retournent vivants dans leur village.
Passion pour les richesses,passion pour le pouvoir, passion de la possession et de la domination. Les drames qu'elles engendrent s'écrivent en lettres de sang.