Plaies, contusions à la suite de chutes, coupures, écorchures, souvent dans un contexte de risque infectieux, toutes ont subi ces accidents de la vie qui surviennent au travail. La main en est le siège le plus commun, celle qui prolonge l’outil, celle que l’on plonge dans une alaise, celle qui maintient le bras dans lequel se fait la ponction veineuse. Les piqûres y sont nombreuses, souvent septiques. Charlotte se pique en 1919 en changeant un malade, et la plaie s’infecte ; nouvelle piqûre en 1925, à l’origine d’un panaris au médius droit, et encore deux ans plus tard, avec infection et dix jours d’arrêt maladie. Fille de salle, Hélène s’enfonce une « esquille de bois » sous un ongle en nettoyant l’escalier de son service. Infirmière, elle se pique la pulpe de l’index droit en juin 1938, à nouveau (avec réaction inflammatoire) en juillet 1943, l’index gauche au court d’un pansement six mois plus tard, y contracte un panaris phlyctèroïde, puis se blesse la phalange unguéale du pouce droit en ouvrant un flacon en décembre 1947.
Si le mot « infirmière » n’est, théoriquement, plus utilisé pour désigner des soignantes sans qualification, c’est bien parce qu’est mise en place une formation qualifiante. La formation des personnels soignants a d’abord été effectuée sur le tas, à peine améliorée au milieu du XIXe siècle par une école pratique à l’Hôtel-Dieu pour les novices. En 1892, c’est un véritable cursus qui est organisé, avec, dans différents établissements, une école pour les novices et parfois même des cours de perfectionnement. C’est dans sa continuité qu’ouvre en 1899, toujours dans les bâtiments de la Vieille Charité, une école professionnelle d’infirmières, qui accueille pour sa première promotion trente sœurs des Hospices, six autres religieuses et quatre laïques. La scolarité, cours du soir et stages pratiques, dure huit mois dans un premier temps, et très vite trois de plus. Elle est sanctionnée par un « certificat d’aptitude professionnelle » qu’obtiennent les trente-neuf impétrantes de la première promotion.
Les femmes qui s’embauchent à l’hôpital, en cette première moitié du xxe siècle, sont heureuses de trouver un emploi, ce poste qui pourrait devenir stable et leur permettrait d’échapper quelque peu aux tourments du temps. Le travail leur octroie une utilité sociale, une identité qui passe par d’autres éléments que l’inscription dans une lignée. Ce n’est certes pas une malédiction, et c’est plutôt comme une félicité que ces femmes considèrent le fait de travailler.
Le docteur Pozzi, praticien que l’album de 1949 présente comme « assassiné par un malade », a exercé et est mort à l’hôpital Broca. Il y fut le titulaire de la première chaire mondiale de gynécologie.
Il périt en réalité lorsque le mari d’une de ses patientes, jugeant inesthétique la cicatrice que son épouse devait à l’éminent chirurgien, le lui fit savoir à coup de revolver.
Eté 44 : l'insurrection des policiers de Paris - Christian Chevandier