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De bonne humeur aujourd'hui ? Ne lisez pas Cioran

« Être ou ne pas être : ni l'un ni l'autre ». Cela ne devrait pas nous étonner pour un clou…Emil Cioran n'est-il pas l'anagramme d'acrimonie ?

« L'homme est inacceptable. » L'écrivain roumain de langue française ne délivre pas un essai philosophique, poétique ou moraliste. Dans ces ébauches solitaires c'est avant tout une voix.
En dépit de l'antipathie de façade - « extermination » lui vient à l'esprit en voyant les gens dans la rue - Cioran nous aide à relativiser nos colères, nos indignations, nos impuissances, nos blessures d'orgueil « gouffre de l'hérésie du moi ».

« Je m'intéresse à n'importe qui sauf aux autres. » Cette lecture est comme un journal de bord fragmentaire, d'un homme qui voit le flot de son existence comme le radeau de la méduse d'un pessimisme, d'une ironie et d'une sincérité rare.
Cioran dit ce qu'il pense et non ce qu'il faut penser ni comme il faut penser, il se revendique comme antiphilosophe et ne répond pas à cette question, qu'il juge capitale, « comment se supporter ? ».

« Suivre sa pente au lieu de chercher son chemin » Talleyrand. La souffrance, la maladie, notamment la maladie de la conscience de soi, du facultatif de ce qu'on fait et de ce qu'on est. Ce nihilisme, faute de suicide, est incurable ; pour Cioran ce mal évolue de façon chronique, de livre en livre.
Cioran a-t-il mutilé son « conatus » spinozien comme Van Gogh son oreille ? Quel est son secret, proche d'une certaine idée bouddhique du détachement, tout juste concède-t-il que « mûrir c'est constater l'aggravation de ses incohérences » ? Qu'a-t-il de moins que nous ou de quelle « carence » ne souffre-t-il pas car « prendre au sérieux les affaires humaines témoigne de quelque carence secrète » ?

« Le fragment, genre décevant sans doute, bien que seul honnête. » C'est très long de faire court. Emil Cioran, je crois, a noirci bien des pages avant d'arriver à extraire le résumé d'une démonstration, la conclusion et l'introduction en même temps. Ces ébauches sont pareilles à des poussières d'alphabet grises broyées sur des interlignes achromiques qui, tel un halo brumeux, séparent ces (max)cimes de désespoir : ne pas regarder en bas, le gouffre, vertigineux, est sans fond.

« la timidité, source inépuisable de malheurs dans la vie pratique, est la cause directe, voire unique, de toute richesse intérieure. » Pourtant nous ne pouvons nous départir du sentiment que Cioran nous a compris. Celui qui veut à tout prix nous faire croire qu'il ne se parle qu'à lui-même trouve en fait le chemin de l'universel. Cioran, et c'est son paradoxe, parvient à dire si bien ce qu'il déplore qu'on ne puisse dire avec des mots.

Qu'en pensez-vous ?
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Parisienne résidant en Charente-Maritime, j'ai une amie Belge vivant à Ottawa qui, suite à un partage de citations d'Eric Chevillard, a rebondit sur "Ébauches de Vertige" dont l'auteur n'est autre qu'un Roumain né dans les Carpates en 1911, envoyé en France en 1947 et y publiant, en 1949, son premier livre en français.
C'est donc en partant de Bucarest via Paris, Bruxelles, Ottawa, à nouveau Paris puis La Rochelle que Cioran est arrivé l'été 2016 dans les mains d'une sexagénaire exilée sur le littoral Rochefortais, soit la bien nommée Iboo, votre dévouée mais non moins fumiste "amie-lectrice", actuellement en vacances - d'où l'inconsistance de la présente critique. On l'applaudit bien fort.

Vertigineux ! Autant le périple amenant à cette rencontre que l'auteur et sa réflexion.
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Maître à penser de tous les cyniques occidentaux désabusés. Au-delà de ses succès et chef d'oeuvres parmi lesquels « Sur les cimes du désespoir » ou « de l'inconvénient d'être né », ce tout petit ouvrage que Folio a tout récemment sorti dans sa célèbre collection à 2 euros – et dont il ne faut donc absolument pas se priver – se présente comme un concentré de délectation pour qui aime la plume acéré, le verbe au vitriol qui gravent dans la chair la pensée corrosive du génie au sang chaud.

« Ebauches de vertige » est un concentré de pensées, d'aphorismes d'une à deux phrases tout au plus. Sur le monde, la vie et le quotidien. Critique d'un grand penseur ou agacement au détour d'un coin de rue. D'une drôlerie aux degrés élevés, l'humour tranchant ne se substitue jamais à la réflexion et chaque aphorisme mérite ses longues minutes d'introspection. de quoi passer des mois à lire cette toute petite centaine de pages…

Pour le plaisir :
« Etre, c'est être coincé. »
« Ma mission est de tuer le temps, la sienne de me tuer en retour. On est tout à fait à l'aise entre assassins. »
« Malheur au livre qu'on peut lire sans s'interroger tout le temps sur l'auteur ! »

C'est tout autant une bonne entrée en matière pour qui ne connaît pas l'écriture unique de cet immense penseur qu'un régal pour les amateurs.
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Certes, la langue est acerbe, le ton désabusé mais que de richesse dans ces sentences parfois dérangeantes qui ne vous laissent jamais indifférents.
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Avec Cioran ça passe ou ça casse . La preuve encore ici avec ce trés court opus qui méle encore humour décapant , cynisme , et réalisme . Quand l'on ne connait pas le personnage il est vrai que cet ouvrage est une introduction efficace à l'univers trés particulier de ce penseur hors norme .
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Cioran on adore ou on déteste, moi j'adore.
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Je termine "Ébauches de vertige".
Et c'est bien d'un vertige dont on ressort à la lecture de ces quelques aphorismes publiés dans la collection Sagesse de Folio.
Un vertige de la pensée d'un "anti"-philosophe tel que E. M. Cioran.
À la fois percutants, emprunts de scepticisme, de pessimisme même confinant au désespoir et parfois une certaine forme de morbidité, à la fois balancé entre le doute et le paradoxe de sa pensée claire, l'amertume qui le ceint, la spiritualité qui l'enveloppe, on perçoit l'ironie et le cynisme d'un homme pour qui la vie aura été d'être condamné à la lucidité et au reniement. Une oeuvre esthétique.
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Un petit livre qui reprend des citations extraites de la pensée de Cioran (« écartèlement »)
Très sombre, très pessimiste.... très réaliste?
Dans tous les cas très intéressant
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On m'avait plutôt bien vendu ce non-philosophe d'origine roumaine, qui avait soi-disant dans les mains une vérité fracassante ; en lisant l'une de ses oeuvres fameuses, certes la moins connue peut-être, toute l'idée que je me faisais de cet auteur s'est rapidement déconstruite, au fur et à mesure que mes yeux passaient sur chacun des aphorismes présentés dans ce mince recueil ô combien pénible à lire. La majorité d'entre eux sont faciles, car c'est, je crois, une belle mollesse intellectuelle que de s'enfermer dans un pessimiste à la Cioran, sophistique du désespoir. C'est si simple, car on a réponse à tout, en donnant des réponses insatisfaisantes qui, à la vérité, n'en sont pas ; ce ne sont que des bouche-trous. Je ne suis pas insensible au pessimisme de manière générale, encore moins à la désespérance, mais lorsque Cioran affirme qu'il ne fait pas de philosophie, je le crois très volontiers, car je n'ai trouvé rien de pertinent dans son ouvrage. Dieu sait ce qu'aurait fait Cioran s'il avait vécu à notre époque et connu Instagram ou Twitter ! Une philosophie, ou rien qu'une pensée, concentrée, nouée autour du pessimisme, si elle ne cherche pas à le dépasser, ou si elle ne le dépasse par inadvertance, reste une philosophie relativement creuse. D'autant qu'après Schopenhauer ou Nietzsche – pas pessimiste à proprement parlé –, il paraît difficile d'approfondir une philosophie de l'obscur, sans paraître plat et futile. Je redonnerai sa chance à Emil Cioran avec des oeuvres plus célébrées, comme Précis de décomposition ou de l'inconvénient d'être né, et pourquoi ses Syllogismes de l'amertume, son chef-d'oeuvre aphoristique, dit-on.
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