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3,66

sur 570 notes
En rentrant d'un voyage en Indonésie où il a découvert l'existence de l'arbre du pays Toraja, Philippe Claudel apprend que son éditeur, producteur et ami est atteint d'un cancer, dont il mourra peu après.
Tel l'arbre du pays Toraja qui recueille les corps des enfants morts pour les accompagner dans leur élévation, ce livre recueille les souvenirs des amis morts de l'auteur.
Ce livre, désigné comme roman, ne m'en paraît pas un. C'est le récit d'une amitié, c'est l'arbre du pays Toraja, c'est le tombeau d'Eugène.. C'est la continuité de la vie au-delà de la mort, dans la mémoire des gens où les absents sont toujours présents.
C'est une suite de réflexions, sur la mort, mais aussi sur le vieillissement, sur ce corps qui trahit à partir de cinquante ans, nous amenant tout doucement à la mort.
Comme le cinéaste qu'il est, l'auteur fait des plans sur sa vie, sur ses souvenirs.
C'est un livre sur la mort, mais qui pourtant n'est pas triste, qui est même optimiste.
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Sur l'île de Sulawesi, en Indonésie, le narrateur a rencontré les Toraja. Ce peuple a des rituels funéraires très particuliers, dont un qui consiste à confier la dépouille des enfants à un arbre afin que les jeunes défunts grandissent en étant portés par la végétation. « L'existence de ce peuple est obsessionnellement rythmée par la mort. » (p. 5) La mort, hélas, le narrateur n'est pas préparé à y faire face quand son meilleur ami, Eugène, est foudroyé par un cancer. le temps passe, les proches s'éloignent ou disparaissent. le narrateur s'interroge sur l'apparition des maladies, la dégradation du corps et la jeunesse que l'on voudrait conserver. Lui-même vieillit : il a vu les enfants de ses amis grandir et son amante est bien plus jeune que lui. Comment faire face au temps qui file et aux êtres qui nous quittent ?

Ce beau roman, comme nombre de ceux de Philippe Claudel, pose des questions sur la mort, le deuil et l'existence. Quel souvenir garde-t-on de nos défunts ? Qu'est-ce qui disparaît de nous avec eux ? « Nous autres vivants sommes emplis par les rumeurs de nos fantômes. » (p. 28) À l'instar du narrateur, le lecteur entend résonner une évidence difficile à affronter : il ne faut pas laisser la mort prendre toute la place, mais il ne faut pas l'ignorer pour autant. Finalement, il faut vivre sans oublier la mort, mais sans en faire un horizon. « Quel est le plus haut degré du vivant ? Y aurait-il différents états qui nous permettraient de distinguer si l'on est plus ou moins vivant ? » (p. 60)

Le narrateur est un cinéaste qui travaille sur un scénario La fabrique intérieure. Cette fabrique, c'est celle qui produit et conserve les souvenirs, celle qui continue de faire grandir les êtres que l'on a perdus. de cette fabrique naissent aussi les films du narrateur, comme autant de manifestes de la vie. « J'ai depuis longtemps compris que nous ne faisons pas des films, mais qu'ils naissent de nous et se dessinent comme ils l'entendent, au moment qu'ils ont choisi. » (p. 8)

Le roman est traversé de grandes figures de la culture contemporaine : Beth Gibbons, Milan Kundera, Jean-Luc Godard ou Michel Piccoli. Ces êtres sont autant d'étoiles qui fileront, mais qui brillent encore intensément et qui illuminent l'existence de ceux qu'ils croisent. Cette lumière, chacun de nous la porte, et elle réchauffe ceux que nous n'oublions pas.
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Dans "l'arbre du pays Toraja", son dernier roman à la superbe couverture publié dans les prochains jours, Philippe Claudel nous offre une magistrale leçon de philosophie sur la vie, la mort, le deuil.

"Depuis quelques années, la mort m'encercle. Elle cherche à m'enclore. A s'approcher au plus près de moi. Afin de me tâter un peu. Pour me faire comprendre que je vieillis? Qu'il faut que je m'attende à elle? Que le match a commencé alors que je n'ai pas encore l'impression qu'on m'ait tiré des vestiaires?"

Dès les premières pages, Philippe Claudel nous explique le titre plutôt énigmatique au premier abord de son dernier opus et pose très clairement le sujet de ce dernier. Ce sera sombre, noir, mélancolique comme souvent avec lui.

"Près d'un village du pays Toraja, situé dans une clairière, on m'a fait voir un arbre particulier. Remarquable et majestueux, il se dresse dans la forêt à quelques centaines de mètres en contrebas des maisons. C'est une sépulture réservée aux très jeunes enfants venant à mourir au cours des premiers mois. Une cavité est sculpte à même le tronc de l'arbre. On y dépose le petit mort emmailloté d'un linceul. On ferme la tombe ligneuse par un entrelacs de branchages et de tissus. Au fil des ans, lentement, la chair de l'arbre se referme, gardant le corps de l'enfant dans son grand corps à lui, sous son écorce ressoudée. Alors peu à peu, commence le voyage qui le fait monter vers les cieux, au rythme patient de la croissance de l'arbre."

Le narrateur est un cinéaste travaillant sur un scénario de film, la fabrique intérieure. Il est confronté à la mort brutale de son meilleur ami et réalisateur, Eugène, suite à un cancer. Vieillissant lui-même, il se remémore ses souvenirs dans un récit libre dans sa forme, dans son agencement et dans son déroulé comme il le définit lui-même. Il use (et abuse si judicieusement) de métaphores autour de l'arbre du pays Toraja.

En mélangeant tous les temps de conjugaison, il évoque le passé et le présent: les deux magnifiques femmes de sa vie, le temps qui passe, les enfants qui grandissent, des êtres qui nous quittent, le chagrin, les interrogations et autres doutes... Quelques grandes figures sont invitées dans le récit: Milan Kundera, Jean Luc Godard, Michel Piccoli. Ce sont des illuminations, des étoiles qui brillent au milieu de la noirceur, mais également des réponses.

"Poursuivre sa vie quand autour de soi s'effacent les figures et les présences revient à redéfinir constamment un ordre que le chaos de la mort bouleverse à chaque phase du jeu. Vivre, en quelque sorte, c'est savoir survivre et recomposer"

L'écriture est somptueuse, très forte et très évocatrice. Les phrases sont souvent longues mais si fluides à la lecture, si chantantes et puissantes à haute voix. On retrouve avec un plaisir non dissimulé les caractéristiques du style de Philippe Claudel. C'est un vrai régal (j'ai dévoré le livre). Même si les sujets évoqués sont terriblement tristes et durs, la fin (le début du tournage de la fabrique intérieure malgré la disparition de Eugène) et la conclusion (les dernières phrases sont très émouvantes) sont un hymne à la vie, cette volonté miraculeuse de survivre.

"Il me semble désormais que je n'aurai plus d'autre âge que le sien, et qu'oubliant mes maux et mes hésitations, mes erreurs, mes blessures, je serai tout à elle, afin qu'elle puisse vivre, aimer, rire, s'éblouir et grandir jusqu'au ciel"

C'est à nouveau un grand roman que nous propose Philippe Claudel. Je l'ai particulièrement apprécié et ne peux que vous le conseiller. Je ne doute pas qu'il en sera de même pour vous.

4,5 / 5

Lien : http://alombredunoyer.com/20..
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Jolie couverture, titre gentiment exotique, quelques lignes sur les rituels funèbres des Toraja (île de Sulawesi, archipel indonésien) et plus particulièrement sur la sépulture des jeunes enfants.
Ça commençait bien, je le sentais bien, ce "roman".
Roman ? Ou réflexions personnelles, en vrac, récit fourre-tout, mélancolico-nombriliste ?
Dans ce récit, un cinéaste (l'auteur ?) évoque pêle-mêle la vie, la mort, la maladie, le temps qui passe... Il constate après le décès de son vieil ami que la mort l'encercle, resserre son étau (on en est tous là en vieillissant !). Il explique pourquoi il aime le cinéma, il cite quels films il a faits ou projeté de faire, les 'people' qu'il a rencontrés, les femmes qu'il aime, qu'il hume, il parle des ruines croates, de sa culpabilité de petit Occidental, de loin, de temps en temps, quand il voit à la TV des migrants se noyer, ça l'empêche de dormir... une nuit.

J'ai relevé de jolies phrases, j'ai trouvé plein de poncifs aussi hélas, et je n'ai pas aimé la fin - pour des raisons très subjectives.
Je suis déçue parce que j'attendais autre chose, un récit plus construit, moins anecdotique, pas un tel patchwork intime.

- avis : 2,5/5
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En 2013, Philippe Claudel a perdu un ami éditeur des suites d'une grave maladie. Ce drame va l'amener à se poser des questions sur la mort mais aussi sur lui-même. Pour se faire, il va imaginer le destin d'un double romanesque qui va lui permettre d'approfondir cette expérience de vie personnelle.

Dans ce court roman, il utilise la métaphore de l'arbre du pays Toraja, pour raconter les séquelles d'une disparition. Pendant qu'en Indonésie, le cadavre des enfants continuent de grandir en même temps que l'arbre dans lequel il est posé, dans notre monde, la vie se perpétue elle aussi après la mort d'un proche. le souvenir du passé reste alors persistant et joue encore un rôle dans le monde des vivants.

A travers ce texte existentiel, le narrateur semble s'interroger sur son âge et sur son rapport au temps. En vieillissant, il se sent plus proche de la mort. Il veut se poser et méditer sur cette fin inéluctable et sur ce que l'on fait du temps qui nous reste.

C'est un roman d'une beauté lumineuse. Il s'en dégage une humanité personnelle qui touche le lecteur au coeur. Je pense qu'il faut tout de même avoir un peu vécu, avoir de la maturité, pour comprendre ces sentiments et appréhender au mieux les tourments qu'a voulu analyser Philippe Claudel. C'est donc une réflexion presque philosophique sur notre condition d'être humain et sur la trace que laisse les gens, non pas sur la terre, mais dans l'existence des autres.
Ma première approche de l'oeuvre de Philippe Claudel a été une réussite. J'ai découvert à la fois un livre tendre, qui a su m'émouvoir sans tomber dans le pathétique et un livre plein de sagesse, qui a su me faire réfléchir sans être pompeux. J'ai rencontré un écrivain débordant d'humanité dont je lirai avec plaisir les autres écrits.
Lien : https://leslivresdek79.wordp..
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Une merveille d'écriture on se régale. Et pourtant facile à lire. A partir de la mort de son seul ami, un homme vieillissant explore avec justesse et mots justes les thèmes de l'amour, la vie, la vieillesse, la mort et tout ceci au fil de l'eau et avec philosophie.
Très grande réussite A METTRE DE SUITE DANS VOTRE PAL
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Cinquante ans, c'est souvent l'âge auquel on est confronté à la mort. Celle de ses parents mais aussi d'amis, de collègues, emportés par l'une ou l'autre maladie.

Suite au décès de son meilleur ami, le narrateur quinquagénaire s'interroge sur la mort, la représentation qu'on en a dans notre civilisation et l'importance qu'on lui donne ou pas. Dans notre société de métaphores ou le cancer devient une longue et pénible maladie, un cancérologue, un oncologue et la mort, un monde meilleur ou le grand voyage, quelle place lui laissons-nous ? Alors que l'espérance de vie a été multipliée par trois en cent ans, nous en sommes presqu'arrivés à nous croire immortels et sommes choqués de voir la mort emporter ceux qu'on aime.
le narrateur plonge en lui-même pour relater ses expériences de la mort, tout ce dont ses voyages et ses réflexions personnelles lui ont fait prendre conscience. Il aborde des sujets sérieux de manière grave ou plus légère qu'il s'agisse du cancer, de la maladie, du corps, de l'amour après cinquante ans, de la solitude, de l'amitié... Comment vivre avec tout cela ?

« Poursuivre sa vie quand autour de soi s'effacent les figures et les présences revient à redéfinir constamment un ordre que le chaos de la mort bouleverse à chaque phase du jeu. Vivre, en quelque sorte, c'est savoir survivre et recomposer ».

L'arbre du pays Toraja qui donne le titre au roman est un tombeau où les Indonésiens enferment les enfants morts prématurément. Un peu comme ce livre où Philippe Claudel renferme le nom de ceux qui comptaient et qui sont partis. Mais l'auteur se défend d'être le narrateur. Il l'a expliqué longuement lors des deux rencontres auxquelles j'ai assisté. Il aime écrire en « je » car le plaisir du jeu c'est d'entrer dans un personnage l'espace d'un moment. Mais il s'agit bien d'une fiction.

Une fois de plus, Philippe Claudel nous offre un récit d'une grande finesse psychologique. En conteur d'exception, il parvient à rendre l'histoire passionnante tout en soignant la profondeur des analyses. « L'arbre du pays Toraja », un roman du coeur à corps.

A découvrir absolument.
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Une âme plane dans l'infini de l'espace et du temps. Elle s'installe un jour dans une enveloppe charnelle. le temps d'une vie, l'intemporelle se contraint alors au rythme d'une horloge biologique. Devient conscience. Se tourmente de questions. Sur l'avant, l'après, le pourquoi. Puis s'arrête un jour le tic-tac du temps et retourne à son infini. N'est-ce que cela la vie ?

Les peurs, les douleurs des autres nous ramènent aux nôtres. Au chagrin de la perte de son ami, un auteur scénariste se plaît à imaginer que le livre dans lequel il évoquera son souvenir va se refermer sur son esprit, l'inclure à jamais dans son texte et le faire monter peu à peu vers les cieux. Comme le fait le peuple Toraja des enfants morts en bas âge, en plaçant leur corps dans une cavité d'un arbre majestueux. Il les emporte alors vers le ciel au rythme lent de sa croissance ligneuse.

Un texte fort. Conceptuel. Une élévation. Un texte qui dédramatise la mort.
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Dans ce roman philosophique très évocateur, l'auteur donne la parole, à un quinquagénaire qui, arrivé au mitan de sa vie, a peur de vieillir... Il a un beau métier : il est cinéaste et écrivain, mais il est inquiet pour l'avenir.
Sa vie va être bouleversée lorsqu'il apprend que son meilleur et unique ami a une maladie grave. Il laisse alors libre cours à ses peurs, à ses regrets et à ses pensées.
Son ami Eugène est producteur de cinéma et il aime la vie. Il a eu cinq enfants avec cinq femmes différentes, parce qu'il n'a jamais pu s'empêcher de tomber amoureux.
Sa maladie est plus grave qu'il n'y paraît, mais il va tenter de prendre ça avec légèreté et de continuer à vivre.
Comment le narrateur, pourra-t-il accepter de vieillir, d'être moins aimé , de ne pas réussir tout ce qu'il entreprend dans la vie et surtout de perdre aussi rapidement, en tout juste un an, son ami de toujours ?
"Pourquoi tombe-t-on malade", se demande-t-il ?
Qu'est-ce qu'être vivant ?" Respirer ? Etre amoureux ?
C'est qu'avant, il y a déjà eu Agathe, l'enfant mort-né qu'il a eu avec Florence, sa femme. Malgré l'amour immense qu'ils avaient l'un pour l'autre, leur couple n'a pas résisté.
Et maintenant, qu'en sera-t-il de celui qu'il forme avec sa jeune voisine Elena...
En Indonésie, il existe une île où les habitants, le peuple Toraja, perpétuent une tradition séculaire : ils enfouissent au coeur d'un tronc d'arbre les petits corps des enfants trop tôt décédés et qui n'ont pas vécu au delà de quelques mois. Ainsi, ils continuent à grandir en même temps que l'arbre...
Cette pratique est le point de départ de ce dernier roman de Philippe Claudel, un auteur que j'apprécie beaucoup qui a écrit des livres très forts et qui encore une fois, bouscule les idées reçues, ici sur la mort..et la vie.
Philippe Claudel nous offre-là une longue méditation philosophique sur la place que la mort occupe dans notre vie, ou comment sa présence modifie notre perception des choses.
Au fil du récit, le lecteur comprend qu'Eugène accompagne le narrateur, aux côtés des autres disparus et qu'ensemble, ils l'aident à accomplir son oeuvre...
Au-delà des sujets douloureux qu'il aborde, c'est un roman très positif qui parle surtout de la vie, de l'amour, de l'amitié, de l'attachement aux êtres qui nous entourent...et aussi de ce que nous sommes pour les autres et ce que les autres sont pour nous, mais aussi de que nous garderons de nos proches et qu'ils garderont de nous...
Écrit avec une belle plume, pudique, facile et même souvent légère et poétique, ce roman est lui aussi une sorte d'arbre du pays Toraja, un hommage à ceux qui ont disparu mais surtout un hymne à la vie, très différent et beaucoup moins noir que les précédents romans de l'auteur...

Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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"Sur l'île de Sulawesi vivent les Toraya. l'existence de ce peuple est obsessionnellement rythmée par la mort." Ainsi commence ce récit , dans lequel Philippe Claudel évoque remarquablement la disparition d'un ami et raconte sa relation avec cet Eugène, avec lequel il a partagé des moments de profonde connivence. Il évoque aussi des épisodes de sa vie de cinéaste, ses rencontres, ses doutes, et parle de voyages. Plus qu'un roman, ce bref - mais si dense-ouvrage- explore nos doutes et nos fragilités humaines face au grand mystère de la mort, et bien sûr de la vie.
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