Citations sur Solal (78)
- Tu ne m'aimes plus, n'est-ce pas ?
- Non, je ne m'aime plus, je ne m'aime personne.
Il était Solal, il arrivait et il les aimait eux tous. Réponse : Sale Juif ! Ses mains étaient chargées de roses et il les leur tendait. Réponse : Sale Juif ! Les salles d'attente et les gendarmes dans la nuit et le passeport scruté avec méfiance. Cette race moi ça me donne le frisson, disait l'épicière.
- Nous allons à Paris, capitale de l'urbanité. Si tu me le permets, je te prierai de ne plus commettre avec la bouche certaines incongruités qui pourraient déplaire à mon neveu et qui ne conviennent pas au second d'entre les Valeureux.
- Roter m'est salutaire, dit brièvement Mangeclous froissé. Aussi continuerai-je. Je n'aime point toutes ces minuties, ces étiquettes d'Hérode, ces fausses élégances et ces embrouillaminis. Suis-je un courtisan ou peut-être une courtisane pour m'entortiller dans la grâce ?
Minuit. Puisque la société était carnassière, il se servirait de ses dents.
Oublieuse des maladies, de la décrépitude, de la mort et de la terre déjà existante qui couvrirait son insensibilité, Aude songeait au bonheur qui l'attendait. Elle ne savait pas que ses dents, illuminées par la lune et reflétées dans la psyché, étaient la première annonce de son squelette et que, par un après-midi de printemps refleurissant les champs et le cimetière, des vers s'insinueraient dans ces narines aspirant la vie et son parfum de toutes fleurs. Les bras parfaits s'étirèrent et la jeune fille imagina pour la première fois la lourdeur d'un corps d'homme (...) sur son corps.
« Un peuple poète. Un peuple excessif. Chez nous, les grotesques le sont à l’extrême. Les avares, à l’extrême. Les prodigues, et il y en a beaucoup plus, à l’extrême. Les magnifiques, à l’extrême. Le peuple extrême. » (p. 379)
En sa présence, elle faisait de continuelles allusions à sa vie d'homme hors des rangs et des cadres. Elle ne pouvait pas deviner la douleur et le désarroi de cet homme qui avait le coeur trop ardent pour pouvoir choisir entre sa femme qu'il aimait et sa race qu'il aimait, qui se sentait coupable vis-à-vis de l'une et de l'autre, qui n'avait plus le courage de rentrer dans la vie, cruelle aux passionnés d'absolu.
Mattathias sortit mais revint bientôt, accompagné de sa grasse fille rousse aux hanches énormes, vêtue de soie prune et harnachée de coraux.
- Regardez ma fille, regardez le pigeon ! claironna-t-il. Regardez les dents. (Ouvre.) Toutes saines. Nourrie à l'huile d'olive. Et quelle panse propre à l'enfantement ! Qui a vu un trésor pareil ?
Et puis pense que tu es mortel et que tu seras poussière. C'est un bon moyen pour augmenter la gaieté de résignation. Si tu sais bien que tu mourras, tout ce qui est petitesse disparaîtra et il ne restera plus que les importances. Tu comprends, on ne souffre que par orgueil et l'homme orgueilleux seul croit qu'il vivra toujours. Moi je me dis que je dois passer cette vie en homme assez bon et pur afin que je puisse goûter le bon sourire d'heure de de mort.
Production de l'amour: hasard (elle aurait tout aussi bien pu faire ses singeries musicales, distinguées, passionnées, poétiques avec un autre; social (admiration consciente -ou inconsciente chez les purettes- de l'homme qui réussit); biologique ( une large poitrine est indispensable à ces vierges ou verges du diable pour qu'elles aiment); et si l'aimé n'est pas absolument idiot il peut les tourner sur le gril de l'inquiétude. Alors c'est le grand amour bleu céleste et rouge cœur et violet infini.