J'avais été bouleversée par
Rosine, une criminelle ordinaire, alors bien sûr, j'attendais avec impatience le suivant :
Tant qu'il y a de l'amour.
Sandrine Cohen met en scène des êtres fracassés, dans un contexte sociologique extrêmement réaliste, des personnages à la fois « ordinaires » ( c.a.d proches, nous ressemblant ) et « remarquables » ( lumineux et inoubliables), voire sublimés.
Ici, toute une famille, une nichée, une smala exubérante, une tribu, une fratrie hétéroclite, dépareillée, quatre enfants et Suzanne, la mère, un brin déjantée qui déborde de tendresse et de fragilité et tache de maintenir la barre, quand le bateau menace de couler, avec des perfusions d'amour, et si on faisait des crêpes…
On n'en peut plus avec elle. On voudrait la sauver, Suzanne.
Sandrine Cohen rend compte avec authenticité et précision de cette lutte aux abois, de ce vertige, la tentation de se laisser aller, de sombrer. Et le destin qui s'acharne et vous pousse vers le précipice, plus vrai que la vraie vie.
Les enfants, une galerie de portraits pittoresques et touchants. Des anges, livrés à eux-mêmes, tendres, roublards, malins, courageux, forts, unis par la déchirure et l'amour d'une mère. Les trois mousquetaires : Achille, Félix, Jules et le bout de chou Mathilde qu'on a envie de cajoler. Ils nous font sourire parfois, au milieu de l'angoisse, au coeur de la tragédie, de ce drame cocasse.
Je les ai pris dans mes bras, bercés, aimés, inquiète pour eux jusqu'à la dernière page.
L'écriture est moderne, sobre et percutante, souple et fluide, jamais débordante, et juste, toujours juste. Témoignant du souci de coller à l'histoire, sans jamais en faire trop.
Sandrine Cohen porte le réalisme et l'émotion au summum.
Le texte soulève aussi – il ne faut pas l'oublier – des questions graves et universelles, comme le sens de la responsabilité opposé à la liberté de l'être et nous interroge sur ce dilemme existentiel et moral.
Comme moi, vous n'oublierez jamais Rosine ou Suzanne,
C'est à cela que l'on reconnaît un grand roman. Non ?
Je retiens mon souffle et j'attends le prochain.