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Citations sur Les Vrilles de la vigne (59)

Je ne veux rien, que détourner la tête et ne plus voir la mer, ni le vent qui court, visible, en risées sur le sable, en poudre d'eau sur la mer.
Tantôt il bourdonne, patient et contenu, tapi derrière la dune, enfoui plus loin que l'horizon… Puis il s'élance, avec un cri guerrier, secoue humainement les volets, et pousse sous la porte, en frange impalpable, la poussière de son pas éternel…
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Il n'y a dans notre maison qu'un lit, trop large, pour toi, un peu étroit pour nous deux. Il est chaste, tout blanc, tout nu; aucune draperie ne voile, en plein jour, son honnête candeur. Ceux qui viennent nous voir le regardent tranquillement, et ne détournent pas les yeux d'un air complice, car il est marqué, au milieu, d'un seul vallon moelleux, comme le lit d'une jeune fille qui dort seule.
Ils ne savent pas, ceux qui entrent ici, que chaque nuit le poids de nos deux corps joints creuse un peu plus, sous son linceul voluptueux, ce vallon pas plus large qu'une tombe.
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Toutes trois nous rentrons poudrées, moi, la petite bull et la bergère flamande… Il a neigé dans les plis de nos robes, j’ai des épaulettes blanches, un sucre impalpable fond au creux du mufle camard de Poucette, et la bergère flamande scintille toute, de son museau pointu à sa queue en massue.

Rêverie du nouvel an - 1908
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Vieux curé sans malice qui me donnâtes la communion, vous pensiez que cette enfant silencieuse, les yeux ouverts sur l’autel, attendait le miracle, le mouvement insaisissable de l’écharpe bleue qui ceignait la Vierge ? N’est-ce pas ? J’étais si sage !… Il est bien vrai que je rêvais miracles, mais… pas les mêmes que vous. Engourdie par l’encens des fleurs chaudes, enchantée du parfum mortuaire, de la pourriture musquée des roses, j’habitais, cher homme sans malice, un paradis que vous n’imaginiez point, peuplé de mes dieux, de mes animaux parlants, de mes nymphes et de mes chèvre-pieds… Et je vous écoutais parler de votre enfer, en songeant à l’orgueil de l’homme qui, pour ses crimes d’un moment, inventa la géhenne éternelle…
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Je voudrais dire, dire, dire tout ce que je sais, tout ce que je pense, tout ce que je devine, tout ce qui m’enchante et me blesse et m’étonne ; mais il y a toujours, vers l’aube de cette nuit sonore, une sage main fraîche qui se pose sur ma bouche, et mon cri, qui s’exaltait, redescend jusqu’au verbiage modéré, à la volubilité de l’enfant qui parle haut pour se rassurer et s’étourdir…
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Moi, j'aime ! J'aime tant tout ce que j'aime ! Si tu savais comme j'embellis tout ce que j'aime, et quel plaisir je me donne en aimant ! Si tu pouvais comprendre de quelle force et de quelle défaillance m'emplit ce que j'aime !... C'est cela que je nomme le frôlement du bonheur. Le frôlement du bonheur... caresse impalpable qui creuse le long de mon dos un sillon velouté, comme le bout d'une aile creuse l'onde... Frisson merveilleux prêt à se fondre en larmes, angoisse légère que je cherche et qui m'atteint devant un cher paysage argenté de brouillard, devant un ciel où fleurit l'aube, sous le bois où l'automne souffle une haleine mûre et musquée... Tristesse voluptueuse des fins de jour, bondissement sans cause d'un cœur plus mobile que celui du chevreuil, tu es le frôlement même du bonheur, toi qui gis au sein des heures les plus pleines... et jusqu'au fond du regard de ma sûre amie...
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Le frôlement du bonheur… caresse impalpable qui creuse le long de mon dos un sillon velouté, comme le bout d’une aile creuse l’onde… Frisson mystérieux prêt à se fondre en larmes, angoisse légère que je cherche et qui m’atteint devant un cher paysage argenté de brouillard, devant un ciel où fleurit l’aube, sous le bois où l’automne souffle une haleine mûre et musquée… Tristesse voluptueuse des fins de jour, bondissement sans cause d’un cœur plus mobile que celui du chevreuil, tu es le frôlement même du bonheur...
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Si tu suivais, dans mon pays, un petit chemin que je connais, jaune et bordé de digitales d'un rose brûlant, tu croirais gravir le sentier enchanté qui mène hors de la vie.
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Matins d'hiver, lampe rouge dans la nuit, air immobile et âpre d'avant le lever du jour, jardin deviné dans l'aube obscure, rapetissé, étouffé de neige, sapins accablés qui laissiez, d'heure en heure, glisser en avalanches, le fardeau de vos bras noirs - coups d'éventail des passereaux effarés et leurs jeux inquiets dans une poudre de cristal plus ténue, plus pailletée que la brume irisée d'un jet d'eau...
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Enchantée encore de mon rêve, je m’étonne d’avoir changé, d’avoir vieilli pendant que je rêvais… D’un pinceau ému je pourrais repeindre, sur ce visage-ci, celui d’une fraîche enfant roussie de soleil… des joues élastiques achevées en un menton mince, des sourcils mobiles prompts à se plisser, une bouche dont les coins rusés démentent la courte lèvre ingénue… Hélas, ce n’est qu’un instant… L’eau sombre du miroir retient seulement mon image qui est bien pareille, toute pareille à moi, marquée de légers coups d’ongles, finement gravée aux paupières, au coin des lèvres, entre les sourcils têtus… Une image qui ne sourit ni ne s’attriste, et qui murmure, pour moi seule : ‘Il faut vieillir. Ne pleure pas, ne joins pas des doigts suppliants, ne te révolte pas : il faut vieillir. Répète-toi cette parole, non comme un cri de désespoir, mais comme le rappel d’un départ nécessaire… […] Eloigne-toi lentement, lentement, sans larmes ; n’oublie rien ! Emporte ta santé, ta gaieté, ta coquetterie, le peu de bonté et de justice qui t’a rendu la vie moins amère ; n’oublie pas ! Va-t’en parée, va-t’en douce, et ne t’arrête pas le long de la route irrésistible, tu l’essaierais en vain – puisqu’il faut vieillir !’

« Rêverie de Nouvel An »)
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