Michael Connelly, le « pape » du thriller policier américain (en tous cas l'un de ses écrivains « cardinaux »), met en scène plusieurs personnages récurrents, le plus connu étant Harry Bosch (vingt-sept romans à ce jour). Mickey Haller figure dans six romans, Renée Ballard, dans cinq romans, Jack MacEvoy dans trois romans (dont «
le Poète »). Enfin Connelly écrit plusieurs romans indépendants, dont celui-ci «
Créance de sang » paru en 1998.
C'était mon premier Connelly, le premier d'une longue lignée, tant j'avais été conquis par le roman et son auteur, (je ne dois pas être le seul, j'imagine).
Terry MacCaleb est un ancien agent du FBI. Il se remet d'une greffe de coeur lorsqu'il est accosté par une jeune femme, Graciela Rivers, qui lui demande d'enquêter sur le meurtre non élucidé de sa soeur Gloria. Terry refuse, invoquant l'enquête (légalement close) et son état de santé. Graciela, avance alors son argument-choc : le coeur qu'on vient de greffer à Terry est celui de Gloria. Terry est donc redevable envers Gloria d'une «
créance de sang » ». Vous l'avez deviné, même s'il n'est plus jeune et fringant, Terry est de la race des héros, il a de la volonté, de l'honneur, de l'intérêt pour cette requérante si particulière, et il finit par accepter. Et dès qu'il a mis le pied dans l'enquête, il comprend que l'affaire va au-delà d'un simple accident de la route. Il s'agit bel et bien d'un crime, patiemment, rigoureusement, machiavéliquement organisé. Mais qui pouvait en vouloir à Graciela, jeune femme latino sans histoires ? … Ce n'est que le début d'une enquête passionnante, qui ne nous lâche qu'à la fin.
On pourrait penser, au départ, que «
Créance de sang » est un roman policier classique, tel que ceux auxquels les Américains nous ont habitué depuis les années trente et quarante, un roman noir avec une intrigue policière bien ficelée, et un tableau de la société gravitant autour de l'enquête. Mais «
Créance de sang » est bien plus que ça : c'est un roman très contemporain, avec une thématique très pointue, et où les centres d'intérêt, loin de disperser la lectrice attentive ou le lecteur accro, convergent pour créer un suspense qui vous laisse sur le … quai (ça se passe dans un port).
L'enquête, tordue au possible, est pleine de rebondissements. Les motivations de Terry se multiplient : à la dette d'honneur, s'ajoutent la volonté d'avancer dans l'énigme, sa propre résilience par rapport à sa situation (suis-je encore bon à quelque chose ?), les règlements de comptes (bons et mauvais) avec ses anciens collègues, et puis aussi, autant l'avouer, le fait d'enquêter avec cette jolie jeune femme qu'est Graciela … L'intrigue policière, déjà bien captivante, se double d'un portrait psychologique passionnant.
Et pour lier la sauce,
Michael Connelly distille les indices avec un art consommé, multiplie les rebondissements et les coups de théâtre. Nous enquêtons pas à pas avec notre duo de détectives, jusqu'au final qui nous laisse sur le… mais je vous l'ai déjà dit, ça.
On retrouvera Terry épisodiquement dans deux autres romans : dans «
L'Oiseau des ténèbres » (2001) «
Los Angeles River » (2004), où il fera équipe avec Harry Bosch.
Vous le savez certainement, mais il faut bien le mentionner ici : «
Créance de sang » a été adapté superbement au cinéma par
Clint Eastwood en 2002, avec lui-même dans le rôle de Terry MacCaleb et Wanda de Jesus dans le rôle de Graciela, Jeff Daniels et
Anjelica Huston complétant la distribution.
Voir le film ne vous dispense pas de lire le livre
Lire le livre ne vous empêche pas de voir le film
Vous trouverez un égal plaisir dans l'un comme dans l'autre. Je vous garantis même que si vous prenez l'un ou l'autre par le début, vous continuerez d'une traite jusqu'à la fin. Prévoyez votre emploi du temps en conséquence.