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sur 1296 notes
J'ai eu l'occasion récemment de revoir Apocalypse now de Francis Ford Coppola. Chef d'oeuvre qui n'a pas pris une ride tout comme le livre dont s'est inspiré le réalisateur : Au coeur des ténèbres de J. Conrad.
Comment sortir indemne de la lecture d'un tel roman ? L'impression la plus forte reste pour moi la somme d'interrogations existentielles auxquelles il renvoie. Car mine de rien ce long "voyage immobile" sur le fleuve Congo auquel s'est livré Marlow, le narrateur du récit principal, est avant tout un voyage dans le temps - celui des origines de l'humanité - et aussi à l'intérieur de soi. Mais Conrad se plaît à perdre sa lectrice ou son lecteur ou plutôt à l'entraîner dans cette sombre équipée en brouillant ses repères : jeu de l'ombre et de la lumière tous deux porteurs de mort ; jeu de miroirs entre Conrad et Marlow car on ne sait pas toujours à qui renvoie la férocité de l'ironie ou des traits d'humour noir...
Aucune certitude donc : des doutes, des équivoques, des interrogations.
A commencer par le regard jeté sur le monde extérieur. Parfois la Nature apparaît comme une force primordiale et souveraine, bien au-dessus des hommes et de leurs misérables gesticulations. A d'autres moments, il s'agit d'une puissance occulte d'autant plus redoutable qu'elle recèle des dangers que Marlow et ses compagnons ne peuvent ni identifier ni prévenir.
Cette vulnérabilité de l'humain au coeur d'une "terra incognita" permet d'ailleurs à J. Conrad de jeter un regard acerbe sur la notion de civilisation. Fragilité du vernis civilisationnel, relativisme des moeurs et des coutumes, il s'en donne à coeur joie à travers le récit de Marlow confronté lors de son expédition sur le fleuve Congo aux pratiques colonialistes des Blancs qu'il va rencontrer tout au long de son périple.Critique féroce de l'exploitation des indigènes portée par une plume qui sait se montrer éloquente et indignée. Mais ne croyez pas pour autant qu'il se fasse le chantre de l'anti-colonialisme car il porte en même temps sur les Noirs réduits à l'état d'esclaves un regard souvent froid et distancié qui pourrait être celui d'un anthropologue, l'empathie en moins.
C'est un thème important du roman mais ce n'est pas, à mes yeux du moins, le plus important. Au fur et à mesure de son "voyage immobile" sur le fleuve Congo, Marlow va nous entraîner dans une sorte d' "hallucination funèbre et insensée". Et il va petit à petit être confronté à un univers cauchemardesque "tout près d'une frénésie noire et incompréhensible" dont il n'a pas les clés. C'est d'ailleurs dans l'analyse subtile de ces états de conscience modifiée que la plume de Conrad donne sa pleine mesure, tant il rend palpable l'état de tension hallucinée dans lequel se trouvent Marlow et ses compagnons.
Cette force d'évocation on la retrouve aussi dans les scènes où l'auteur décrit d'une plume subversive, car minutieuse et impitoyable, l'agonie terrible des esclaves noirs qui succombent sous les mauvais traitements infligés par les colonisateurs. Des scènes qui renvoient de plein fouet à tous les processus d'extermination qu'a connus notre vingtième siècle et à leur corollaire : le Mal absolu.
Dans le roman, l'auteur le relie souvent à un retour à "l'homme primitif" et à la violence qu'il déploie par instinct de survie. Mais quid des personnages du roman ? Surtout si l'on considère l'ambiguïté avec laquelle Marlow évoque le personnage de Kurtz, un aventurier qu'il est censé récupérer sur l'île où il s'est réfugié. On sent que jusqu'à la fin du roman Marlow est à la fois fasciné par la magie du sorcier et terrifié par les pratiques de tortionnaire mises en place par Kurtz sur les indigènes qu'il a sous sa coupe.
Et ce n'est pas la fin qui apporte des éclaircissements à ce questionnement métaphysique car on s'enfonce toujours "au coeur d'infinies ténèbres". Ce sont les derniers mots du roman.
Et pourtant je n'ai pas regretté de m'embarquer à bord du vieux rafiot de Marlow tant l'univers dans lequel il évolue est prenant sans parler des questionnements existentiels auxquels il renvoie.
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Difficile d'ajouter ses pauvres "nouveaux" mots aux somptueuses & érudites critiques de nos amis d'ici : celle de Woland [pionnière en novembre 2012] m'épatant tout particulièrement ! (Mon Dieu, quel boulot et quelle culture... ). Citons aussi le bel éclairage d'ordreterne [février 2016], et sa flamboyante conclusion ! le Mythe vivant.

Eh bien, si "Heart of Darkness" (écrit en 1899, publié pour la première fois en 1902) est invariablement découvert par tant de générations de lecteurs (grâce au "bon" Francis Ford Coppola, "son" Vietnam et sa "Chevauchée des Walkyries"), on ne s'en plaindra pas ! Car l'odyssée de l'aventurier Marlow remontant le fleuve Congo (jusqu'aux sources d'Humaine Barbarie) est toujours aussi hallucinante ; le vapeur pourri, rafistolé, reprenant sa route jusqu'à ce que le dinosaure de métal et de bois vermoulu s'immobilise sous les sagaies des assaillants et les pièges de la brume grise... Un parfum d' "Aguirre la colère de Dieu" [1972] de Werner Herzog, avec le regard halluciné de l'acteur "fou" Klaus Kinski au milieu du fleuve, face à la jungle... Puis la nuit complète, enfin... L'apparition de Kurtz mourant, âpre aventurier trafiquant d'ivoire entièrement "passé à la sauvagerie"... sa disparition presque anonyme sur le vapeur qui repart... le retour européen de Marlow qui veut rencontrer la fiancée du "sauvage"...

On se demande un peu pourquoi tant d'autres romans - pourtant également fameux - de l'ukraino-polono-brittanique Joseph Conrad n'ont pas eu la gloire française de "Heart of Darkness", sombre tragédie d'allure shakespearienne (moderne) sous forme de court roman : et je pense particulièrement aux "jeunes" romans de sa quarantaine : "The Nigger of the Narcissus" - le Nègre du Narcisse" (1897) et "Lord Jim" (1900) ou même au "Nostromo" (1904) qui gardera la tonalité de ce "coeur des ténèbres"... (cité dans le très noir "Alien" de Ridley Scott : Nostromo étant le nom de baptème du navire-cargo spatial en route vers la "mauvaise "planète...)

Et je pense aussi à "Sous les yeux de l'Occident" (son énorme et passionnant roman "russe" tardif, paru en 1911, travail de trois années qui le laissa complètement exténué... ) ou encore au mélancolique "The Shadow Line" (1916) - "La Ligne d'Ombre" qu'adapta brillamment Andrzej Wajda pour la télévision polonaise.

Et vous savez quoi ? Mais vous le savez déjà... Joseph Conrad avait longuement "vécu" (bourlingué sur les mers du globe, de 1875 à 1894) avant de commencer à écrire et publier... "Petit détail" qui contribue fortement au réalisme des situations et peut expliquer le pessimisme (structurant) de ses "récits" : si peu d'espoir placé dans l'espèce humaine... Expliquant aussi les personnages-relais (marins, capitaines) de la pensée de l'auteur... Expliquant enfin - selon nous - l'exigence et la grandeur de son art littéraire, d'une extrême modestie de forme et ne s'encombrant pas de "faire littéraire" (un peu "L'Ecole Simenon" avec le vécu périlleux d'un Antoine de Saint-Exupéry).
Lien : http://www.regardsfeeriques...
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Première incursion pour ma part dans l'oeuvre de Joseph Conrad, cet écrivain anglais d'origine polonaise. Et quelle incursion… Je suis allée bien plus loin que prévu. En effet, le narrateur, Marlow va nous emmener en Afrique, remonter un fleuve jusqu'au coeur des ténèbres
Une histoire courte mais intense, où je dois avouer que j'ai sincèrement été marquée par une partie du récit.
C'est évidemment en Afrique que cette histoire qui va crescendo va atteindre l'apothéose une fois que Marlow aura rencontré un certain Kurtz.
Kurtz, collecteur d‘ivoire, se trouve au fin fond de la jungle, et Marlow, au bord de son rafiot est chargé de « « récupérer » cet homme qui est entouré d'une aura plutôt inquiétante. En effet, Kurtz s'est « ensauvagé » et il faut reconnaître à l'auteur qu'il a su avec beaucoup de talent restitué une ambiance qui ne peut que confirmer cette hypothèse.
C'est le fleuve africain que va remonter Marlow au bord de son bateau qui est clairement un des personnages principaux de ce roman à l'atmosphère si particulière. Une atmosphère qui engendre un malaise de plus en plus prégnant au fur et à mesure de l'avancée de la lecture, je dois le reconnaitre.
Je ne rentrerais pas dans l'analyse de ce roman et tout ce qu'il dénonce, d'autres babelionnautes l'ont déjà fort bien fait, mais c'est une lecture qui ne laisse clairement pas indifférent(e)..

Une lecture qui marque…


Challenge BBC
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Pour ce chef d'oeuvre époustouflant, immersif, étouffant, définitif, je vais pour une fois briser la coutume et plutôt que d'écrire moi-même car les mots me manquent, renvoyer humblement à la formidable critique de Foxfire qui a exprimé exactement ce que je ne sais pas dire.
A l'issue de ce voyage au bout de soi-même où l'horreur de ce qu'on y rencontre est indicible, il me vient un tel dégoût de l'humanité que cela me laisse sans voix.
A lire absolument, quitte à se retrouver à vie hanté par le personnage de Kurtz.
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Comme beaucoup j'ai d'abord approché ces ténèbres par l'adaptation qu'en a fait Coppola dans "Apocalypse now". le film, transposé à la guerre du Vietnam, m'avait fort marqué. Il bénéficiait d'une aura particulière en raison d'un tournage dantesque : burnout de Copolla, alcoolisme de l'acteur principal, tempêtes destructrices... Des années plus tard j'ai retrouvé dans le livre de Joseph Conrad cette langueur au fil de l'eau, cette nature envoûtante et intouchable et cette menace diffuse qui accompagne le capitaine Marlow tout au long de son périple . S'enfonçant inexorablement dans les ténèbres et perdant petit à petit ses repères, arrivera-t-il à ne pas sombrer et à mener à bien sa quête ?
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Atteindre l'enfer c'est suivre une voie pour Joseph Conrad. Ce chemin nous le suivons ou nous le quittons. Pas d'autre choix. L'horizon des ténèbres se tisse ici au fil de l'eau, vers la source du fleuve Congo. « Regarder d'un navire de la côte filer, c'est comme réfléchir à une énigme ».voici l'invitation à ce voyage. Remonter un fleuve, c'est remonter le temps, le temps du premier homme, celui qui est en chacun de nous. Les pulsations des rives du fleuve réaniment les pulsions primaires des hommes. Torpeur, sauvagerie, «  pèlerinage lassant parmi des débuts de cauchemar ». S'enfoncer plus profond, entrer dans le coeur des ténèbres... L'enfer est il un espace auquel on se livre pour délivrer celui qui vit en nous? Les ténèbres ont ils la faculté d'infecter le coeur de ceux qui le traversent ? ou portons nous ce germe depuis toujours et à jamais en nous ?
L'enfer on le vit ou on le détruit, il n'y a pas d'autre choix.

Astrid SHRIQUI GARAIN
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Sans doute, j'en attendais trop, de ce livre, de cette longue et célèbre nouvelle de Joseph Conrad, après avoir lu sur Babelio tant de critiques bien faites, d'appréciations élogieuses.
Une nouvelle chargée d'une aura spéciale, elle qui aurait inspiré beaucoup d'autres auteurs, dont Céline, et de cinéastes dont Coppola qui, avec son mythique Apocalypse Now, a transposé l'histoire dans la jungle vietnamienne.

Car il y a eu, pour moi, à la lecture, une déception, un peu à l'égard du fond, plus pour ce qui est de la forme.

Pourtant, l'auteur m'a fait partager sa vision étouffante de la forêt africaine, de ce monde sauvage et hostile. le récit du voyage dans un fleuve (qui n'est jamais nommé) est absolument saisissant. L'évocation des paysages a quelque chose d'angoissant.

J'ai apprécié aussi sa critique impitoyable du colonialisme, l'exploitation éhontée des ressources du continent, la cruauté des colonialistes, les conditions misérables des travailleurs africains, qui meurent d'épuisement.
Aussi sa description sans concession de la cupidité, la rouerie, la couardise de tous ceux qui font le commerce de l'ivoire.

Mais, j'ai été déçu du récit de la rencontre avec Kurtz, le responsable d'un poste avancé dans les ténèbres de la jungle.
Certes, on est saisi par l'atmosphère terrible qui l'entoure, par ces derniers mots: « l'horreur, l'horreur ». Mais le portrait de cet homme cruel et mégalomane qui, très malade, doit être évacué, et mourra dans le voyage de retour, m'a laissé un peu perplexe,
En effet, à part les têtes coupées fichées sur les piques entourant son habitation, et que l'on devine qu'il est devenu pour les indigènes une sorte de dieu, et qu'il a peut-être pris femme en ce lieu, on ne saura pas vraiment les méfaits de cet homme.
Et la rencontre du narrateur Marlow, avec l'épouse que Kurtz avait laissé en Angleterre, m'est apparue peu crédible.

Ce récit enchâssé, raconté par le marin qui a dirigé cette expédition, est par certains aspects saisissant, par d'autres aspects très décousu, manquant de liant.

Bref, un avis mitigé sur cette célèbre nouvelle.

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De temps en temps, je sors des sentiers battus et je quitte mes lectures habituelles pour aller découvrir d'autres territoires littéraires.

Pour cela, le choix des libraires dans l'émission "La grande librairie" est un vivier important dans lequel je m'amuse à aller puiser. Hélas, ce n'est pas toujours le coup de coeur assuré.

Je ne tournerai pas autour du pot : ma lecture a été étrange.

Sans détester ce roman, sans jamais passer des pages, je n'ai jamais réussi à m'intégrer dans l'histoire, comme si le récit et moi avions navigué en parallèle, sans jamais nous croiser.

L'atmosphère du récit est étouffante et assez onirique. L'auteur, par le truchement de son personnage du capitaine Charles Marlow, utilise une forme de narration complexe, la rendant opaque et sans les notes en fin d'ouvrage, que j'ai consulté à chaque renvoi, j'aurais loupé une partie de ses insinuations, de ses comparaisons, de ses images.

Le récit est une charge contre la colonisation en général, même si ici elle concerne le Congo, qui, à l'époque de la publication, appartenait à Léopold II, notre ancien roi (qui ensuite se débarrassa du Congo en le donnant à la Belgique).

Par le biais d'une société belge (dont il est l'actionnaire principal), le voici donc propriétaire d'une vaste partie du territoire et il ne s'est pas privé d'en exploiter les richesses. Je n'irai pas plus loin dans les pages sombres de l'Histoire.

Le capitalisme débridé, décomplexé, c'est contre lui que Marlow mène la charge : une société peut accaparer tout un pays et exploiter la population, voler ses richesses, massacrer pour de l'ivoire. Non, non, rien n'a changé.

Ce qui frappe dans ce récit, c'est que l'auteur avait déjà tout compris : la civilisation n'est qu'un vernis et lorsque le vernis craque, c'est Néandertal qui apparaît (et j'insulte Néandertal). Les sauvages ne sont pas ceux que l'Homme civilisé désigne : les autres, les habitants du pays qu'ils ont colonisé. Que nenni, les sauvages, ce sont les Hommes Blancs, même si les Africains qui peuplent ce roman se font rhabiller pour l'hiver aussi.

L'auteur a une manière bien à lui de décrire la jungle, la rendant oppressante, vivante, faisant d'elle un personnage à part entière du récit. La Nature peut nourrir, comme elle peut tuer.

Oui, le roman de Conrad est puissant, son écriture n'est pas simple, que du contraire. le côté sombre de l'Homme est bien mis en avant dans son récit, la remontée du fleuve sinueux étant une belle représentation, jusqu'à leur arrivée au coeur des ténèbres.

Malgré tous ces points forts, malgré le fait que j'ai lu ce roman en deux jours, il me reste cette impression que je suis passée à côté, que la rencontre n'a pas eu lieu entre nous, que l'étincelle a manqué pour mettre le feu à ma lecture.

Il n'ira pas caler un meuble bancal : ce roman n'est pas mal écrit, il m'a juste été impénétrable, comme une jungle. Il aborde des thèmes forts comme le capitalisme à tout prix (quoiqu'il en coûte), le colonialisme et la folie, et ce, à une époque où le colonialisme n'était absolument pas mal vu.

Pas de chance pour ma première lecture de l'année… D'habitude, cela se termine par un coup de coeur, ce ne sera pas le cas pour ce début d'année. Pourtant, je ne regrette pas d'avoir lu ce roman.

Comme je vous l'avais dit, c'était une lecture singulière et ma chronique en est le reflet : le cul entre deux chaises.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Au cours de mon exploration de l'oeuvre de Paul Auster, je suis tombée sur un article qui comparait Moon Palace à ce livre de Joseph Conrad. Je l'ai acheté et mis de côté le temps que je me décide à relire Moon Palace et finalement c'est Robert Silverberg qui m'a décidée ^_^

Pour le challenge auteur consacré à Robert Silverberg je vais lire Les profondeurs de la terre qui selon la 4ème de couverture serait un hommage à ce même livre de Conrad. L'affaire était donc entendue…

Marlow (le personnage principal) raconte son voyage au Congo à la fin du 19ème siècle (le livre a été écrit en 1899) afin de prendre la relève d'un certain Fresleven qui y a trouvé la mort. A cette époque, c'est l'ivoire qui est au centre de toutes les convoitises.

Marlow entend régulièrement parler d'un certain Kurtz qui le fascine de plus en plus. Avec son équipage, Marlow doit aller le récupérer en remontant le fleuve Congo. L'homme est mourant et au final

L'histoire en elle-même n'est pas exceptionnelle et pourtant le livre l'est. Joseph Conrad a une écriture vraiment profonde et il a l'art de la description et de la métaphore. L'histoire n'est qu'un prétexte pour dénoncer le colonialisme (exploitation, maltraitance, …) et pour montrer ce que l'homme détruit (vies, nature, …) pour le profit.

Pour info, j'ai lu l'excellente traduction de Catherine Pappo-Musard.
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Cette nouvelle de Joseph Conrad a servi de terreau à Francis Ford Coppola pour réaliser son film Apocalypse Now. Ce dernier a su transposer habilement ce récit d'une descente aux enfers le long du fleuve Congo en période coloniale dans le bourbier de la guerre du vietnam.


Comme dans la nouvelle « Jeunesse », Au coeur des ténèbres est le récit de Marlow un marin qui raconte son histoire à ses amis proches. Marlow a fait des pieds et des mains, pour être embauché comme « marin d'eau douce » pour une compagnie commerciale dans le but de découvrir l'Afrique. La compagnie le nomme capitaine d'un bateau fluvial sur le fleuve Congo et le charge de reprendre contact avec un de ses plus brillants chasseur d'ivoire, le dénommé Kurtz, qui ne donne plus signe de vie depuis des mois.


L'auteur va nous décrire dans un style flamboyant et oppressant, cette descente aux enfers progressive que va constituer le voyage de Marlow qui coupe les amarres de la « civilisation » pour entrer dans la « sauvagerie » à chaque mile parcouru le long d'un fleuve tourmenté, étranglé par une forêt impénétrable et étouffante. On y découvre la vie des pèlerins occidentaux accrochés à leur chimère : faire fortune. On y découvre le traitement des noirs, dressés, terrassés ou simplement maintenus à distance par la terreur que leur inspire les blancs et leur attirail. Marlow se coupe peu à peu de ses compatriotes qui le dégoutent, mais il ne se rapproche pas plus des « sauvages » qui ne l'intéressent guère. Il tend vers le personnage mythique de Kurtz dont la légende et le pouvoir l'inspire. La rencontre avec ce « Roi », sera un grand choc et une terrible désillusion. La sauvagerie a rongé l'homme qui n'est presque plus qu'un fantôme. L'homme mythique se révèle bien n'être qu'une chimère dans tous les sens du terme : à la fois bête mythologique monstrueuse et terrifiante et à la fois une illusion sans consistance.


Le récit se termine lors du retour de Marlow en Europe, alors qu'il rencontre la fiancée de Kurtz. La pureté de la femme ne doit être souillée par la sombre vérité. Marlow choisi de lui épargner les ténèbres en la laissant à ses illusions. « Horreur, horreur » sont les dernières paroles de Kurtz. Pour la fiancée éplorée, Marlow mentira en affirmant qu'il n'a fait que prononcer son nom avant de mourir. Une nouvelle sombre et sans espoir.
27 avril 2012
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