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EAN : 9782264081582
312 pages
10-18 (02/02/2023)
3.93/5   55 notes
Résumé :
Tout juste débarquée de sa campagne, la jeune Antonia devient strip-teaseuse à San Francisco. Arrivée là presque par provocation, en combattante lesbienne féministe, elle devient vite accro à l'argent facile et au regard des hommes. Mais quand cette ancienne boulimique sujette aux addictions tente de reprendre le contrôle de sa vie, sa mère tombe malade. Pour payer ses soins, Antonia doit remonter sur scène, voire aller plus loin encore, quitte à risquer la prison..... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Antonia est strip-teaseuse et travailleuse du sexe, pas prostituée. Nuance. Et de taille.

Dans Consumée son premier roman autobiographique, Antonia Crane – traduite par Michael Belano – relate son parcours de vie qui l'a conduit de Frisco à L.A., en passant par Vegas et La Nouvelle-Orléans. Un parcours en grande partie choisi et non subi. Nuance encore.

Les lubriques, voyeurs et autres misérabilistes en seront pour leurs frais : si le verbe est cru et quelques scènes imagées, l'essentiel n'est pas là. Mais plus dans la compréhension des choix assumés ou subis de cette jeune femme bisexuelle, attirée par hasard et par défi dans les clubs où les billets tombent au même rythme que les vêtements.

Et puis un jour, le défi devient nécessité, quand la mère d'Antonia entre en phase terminale de cancer et que l'argent vient à manquer. La pole ne suffit plus, passage à la vitesse supérieure : massages et finitions, hôtels à 2 ou plus, approche de ses limites pour mieux ne plus les dépasser. Antonia devient dépendante, au fric plus qu'au sexe.

Écrite par celle qui se définit comme une activiste au service des travailleuses du sexe, fondatrice du mouvement Soldiers of Pole et engagée contre les abus de pouvoirs subis par ses consoeurs, Consumée est surtout un témoignage sur la rédemption d'une femme, aujourd'hui auteure, scénariste et enseignante à UCLA.

Une rédemption qui a permis à Antonia de sortir de tous les pièges dans lesquels elle est tombée : boulimie et anorexie, drogue ou alcool. le tout sous le regard d'une mère aimante, tolérante et bienveillante, qui éleva puis accompagna sa fille dans tous ses choix, quels qu'ils soient, dès lors qu'ils étaient assumés.

Un amour sans réserve qui traverse le livre de manière apaisante. Et un roman-témoignage intelligent, qui ne tombe jamais dans le pathos mais entretient au contraire, une constante lueur d'espoir et un message féministe engagé dans un milieu où il fait encore trop défaut.
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Antonia Crane couche ici sa vie de travailleuse du sexe, et c'en est d'une franchise déconcertante.

Autoportrait aussi touchant que lumineux, il compte la quête de soi d'une femme pleine de doutes et d'une volonté qu'on ne peut effriter. Ode au travail du sexe, culte du désir monnayé, on louvoie entre le strass, et le stress, l'effeuillage envoutant, et le geste mécanique. Entre les positions aguicheuses et les douleurs chroniques des chorégraphies répétées et éreintantes. L'argent est facile, mais poisseux de sueur et lubricité. Cet argent qui crame les doigts autant que ces planchers et barres de pôle-dance usent les corps convoités.

La vie ne fait pas que des cadeaux, et c'est un doux euphémisme au pays de l'oncle Sam ou tout vice se monnaie. Evidemment le désir désincarné est accessible pour celui ou celle qui fait briller les billets verts.

Boulimique, l'autrice est forcée d'avoir recours à l'aide de ses doigts pour vomir ces excès incontrôlables de nourriture ingurgitée et garder des courbes acceptables pour rester esthétiquement compétitive sur scène comme ses consoeurs.Sa perception de son quotidien à l'image de ce jet de vomi, est instantanée, douce-amère, entre l'action choisie et l'acte subi pour survivre. Elle vient par traits, par fulgurances harmonieuses.

Fort d'une sincérité étincelante, ce récit cru et bienveillant est celui de plusieurs combats, celui de l'addiction, de la tentation et de la lutte syndicale dans un milieu ou on ne la soupçonnerait pas.
J'ai adoré la dissociation qu'utilise l'auteur pour parler de ce pivot qu'est le sexe désenchanté quand il devient un métier.

Le témoignage très intéressant d'un caractère fort de femme battante portée par beaucoup d'amour maternel qui éclaire ce qui se passe dans ces lieux obscurs ou se trémoussent les sirènes-objets de désir, toujours cotées.

Petit plus pour l'objet livre, à la très belle illustration et à la couverture souple qui est vraiment plaisante à manipuler.
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💶 CERCLE VICIEUX&#xNaN

Comment faire cohabiter chimio et branlette ? Antonia Crane l'a fait !

Traduit par Michael Belano, sorti en 2017 de l'autre côté de l'Atlantique, ce premier roman autobiographique d'Antonia Crane, ne ressemble à aucun autre. Elle, la travailleuse du sexe qui garde sa liberté quant à son exercice, raconte avec un talent certain, l'univers d'un monde obscur qui effraie par certains movements. Activiste, elle lance le premier syndicat des travailleurs du sexe pour décriminaliser son activité. Et pourtant, c'est une histoire d'amour et de tendresse qui se dessine au fil du récit : celle qui la lie au quotidien avec sa mère.
Cette mère qui n'aimait pas la sécurité et la quiétude, devant élever sa fille seule, un père qui déguerpit, laissant une enfant avec les clips de Madonna sur MTV en ligne de mire. Atteinte d'un cancer rare des voies biliaires, cette dernière se bat corps et âme pour survivre telle une héroïne. Une relation d'une grande affection où aucun jugement n'est émis sur l'activité sexuelle : «  son amour n'était pas conditionné par mes activités ou mes hobbies », là où d'autres auraient été moins tolérants.

✍« Je voulais anéantir la femme en moi pour la reconstruire entièrement. »

Sans jamais verser dans le sentimentalisme ou l'amas de scènes choquantes, Antonia Crane révèle de manière crue et véritable l'envers de ces hommes à la fois inquiétants et en détresse sexuelle de manière sous-jacente. On pense à ce légendaire « homme courgette » qui reste en mémoire tant l'on imagine mal vivre une scène pareille. Tout cela fait nous interroger sur le rapport au sexe tarifé où la masculinité y déverse ses fantasmes. Après la crise covid, ce monde s'est numérisé et s'est transformé pour mettre en avant des relations beaucoup plus obscures et de manière anonyme. On y croise ainsi ces filles se bourrant de sucreries ou de cocaine, noyant leur chagrin dans le shopping mais revenant toujours à leur point de départ. En proie aux difficultés financières, le sexe permet de sortir la tête de l'eau. Avec une immense honnêteté, l'autrice entre dans la tête de ces hommes pour y décrire la face cachée de ces moments intimes parfois glauques.

✍ « J'étais devenue cette chose pour de l'argent, et la frontière qui séparait la danseuse de la femme s'est estompée jusqu'à devenir diaphane au fur et à mesure que le système faisait son oeuvre. »

Ce récit consume à la fois cette mère qui décline mais aussi son autrice. Avec un sens accru de la formule, où l'humour, avec parcimonie, prend pleinement son rôle, l'autrice embarque le lecteur dans sa jeunesse en dents de scie. Anorexie, boulimie, prison et alcool notamment sont venus abîmer les corps et annihiler tout espoir de confiance en soi. Mais il y a toujours cet espoir qu'une mère vive éternellement… que si nous réussissons quelque chose comme un diplôme, l'inéluctable se décalera dans le temps… Certaines scènes poignantes n'échapperont à personne où le prétexte du sexe vient sublimer d'autant plus la relation entre une mère et sa fille.

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La prostitution, le striptease… j'ai l'impression que c'est un sujet sur lequel tout le monde a un avis, que chacun se sent légitime à se prononcer mais que la parole est trop rarement donnée aux travailleurs et travailleuses du sexe.

Ce livre est celui d'une jeune femme qui se lance dans l'effeuillage (thème qui édulcore une réalité beaucoup moins glamour), sombre dans la drogue, se prostitue.

Un monde tout en ambivalence pour Antonia. Un monde où son corps est utilisé, chosifié par des hommes et des femmes à la recherche d'un plaisir fugace, de tendresse parfois.

Mais un monde où elle se sent forte, désirée, un monde solidaire, un monde où elle a sa place.

C'est ce que j'ai adoré dans ce roman, rien n'est manichéen, tout est en nuances, tout comme le style d'Antonia. Elle réussit à être cru sans que ce soit voyeuriste ou déplacé.

Mais circonscrire ce récit à l'expérience d'une femme dans le monde de la nuit serait par trop réducteur. Car ce récit permet, plus globalement, d'évoquer les conditions de travail des travailleurs du sexe, les législations et les patrons qui précarisent encore plus ; avec comme solution la création d'un syndicat. Car oui, l'union fait la force.

Enfin, ce récit est un merveilleux hommage à la maman d'Antonia. Cette maman qui a fait du mieux qu'elle a pu, qui a su ne pas juger, qui a été là. Une personne référente pour l'autrice, celle qu'elle ne devait pas décevoir. Une mère présente mais pas intrusive qui a laissé sa fille faire ses propres choix.

Ce livre est un coup de coeur et j'espère que vous le découvrirez !
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Antonia, ex ado paumée et boulimique, quitte sa province sans grande connaissance de la vie. Elle débarque à San Francisco et devient strip-teaseuse. Nous sommes loin du glam et des paillettes. Nous sommes au fond de couloir sombre ou le passage des hommes est marqué par les mouchoirs qu'ils abandonnent sur place une fois leurs affaires faites. Dès le début Antonia est sur un fil, d'un côté une démarche provocatrice, combattante féministe, lesbienne engagée et de l'autre une fascination pour l'argent facile et le regard des hommes. Cette dualité est présente dans tout le roman, on sent une lutte contre elle-même et ce besoin de mettre une « distance intellectuelle » derrière ses actes, comme si cela rendait la situation plus supportable. Stevie, Violet, Candy, Lolita, derrière chaque alias une impression de maitriser la situation, de contrôler la machine et en même temps l'impression criante de subir, de survivre au milieu de ce monde de solitude et de misère. Plusieurs fois Antonia va trouver des boulots lui permettant de s'éloigner de ce milieu et à chaque coup dur la solution la plus simple sera le retour vers le strip-tease. Elle vacille entre maitrise et rechute jusqu'à ce que sa mère tombe malade. Les choses s'emballent et les limites sautent. Antonia est prête à tout pour subvenir aux besoins de sa mère, et le strip-tease n'est pas la première marche de l'ascension.

Il y a une faille entre le discours, l'envie de liberté, et la réalité. J'ai eu l'impression de faire une lecture à double sens. Ce que nous raconte Antonia, et le sous-texte bien plus sombre. C'est particulièrement le cas dans ses relations avec ses collègues des clubs de strip. Comme si toute sa vie était à deux niveaux, celui du corps et celui de son intellect, qui parfois se dissocie complétement.

J'ai beaucoup aimé cette histoire de femme forte, lucide et combattante.

Antonia Crane se définit aujourd'hui encore comme une travailleuse du sexe. Elle est la fondatrice et directrice de Soldiers of Pole, un mouvement syndical qui oeuvre pour la syndicalisation et la décriminalisation des travailleurs du sexe. Elle est également scénariste, collabore dans plusieurs magazines et donne des cours d'écriture à l'université de UCLA.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Ces choses n’avaient pas d’importance car son amour était bien plus vaste que ça. Son amour n’était pas conditionné par mes activités ou mes hobbies. Son amour, c’était comme flotter dans une voie lactée maternelle, bercée par la poussière d’étoile
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Je suis devenue un monstre. Hystérique. Hors-la-loi. Je titubais sur l’arête déchiquetée qui sépare la destruction de la rédemption. J’étais anorexique, junkie, clodo, une traînée ambulante, une bisexuelle accro aux gouines.
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En cette soirée de Noël, Kara et moi avions rendez-vous avec un client à l’hôtel Four Seasons de Beverly Hills ; le genre d’endroit où l’on imagine Britney Spears et Paris Hilton étaler du fois gras sur des galettes de riz en se bourrant la gueule au champagne Cristal. Pourtant, c’était bien nous qui étions là, pas elles. Un ascenseur aux parois couvertes de miroirs nous a déposées au quatrième étage. On était payées pour faire jouir un vieux aux cheveux grisonnants. 
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Mon éthique de travail laissait à désirer : j'attendais toujours d'être fauchée avant de me mettre au boulot, parce que j'aimais la pression désespérée de la prostitution.
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Les femmes de ma famille n'étaient pas des strip-teaseuses bisexuelles qui avaient tendance à s'isoler et cultivaient une addition secrète pour le speed.
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Videos de Antonia Crane (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Antonia Crane
VLEEL 227 Rencontre littéraire avec Antonia Crane, Consumée, ÉditionsTusitala & 10-18
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