Dimanche matin, pommes
À William Sommer
Les feuilles tomberont encore un jour, lesteront
La toison de la nature de ces desseins
Qui sont la force de ton tracé ample et juste.
Il y a désormais un défi au printemps
Dans ce nu de la maturité, la tête
levée
Parmi un royaume d’épées, son ombre pourpre
Sur l’hiver de la terre, jaillissant
De la blancheur qui provoque la neige d’un cri.
Un garçon court avec un chien face au soleil, chevauchant
Des enthousiasmes qui tracent librement leurs orbites,
Lumineuses et éternelles
Dans la vallée où tu vis
(Qui s’appelle Brandywine.)
Là, j’ai vu les pommes qui te jettent des secrets, —
Des pommes aimées de la folie de saison
Qui nourrissent tes questions de vin aérien.
Pose-les de nouveau près d’un pichet avec un couteau,
Équilibre-les, pleines à exploser —
Les pommes, Bill, les pommes !
Bâtiments blancs (White buildings)
traduction Chantal Bizzini.
Sur la tombe de Melville
Souvent, sous la vague, au large de ces hauts-fonds,
Il a vu ces dés, les os des noyés, lui léguer
Une ambassade. Comme il les regardait, ils heurtaient
Nombreux le rivage poussiéreux, puis étaient recouverts.
Et les naufrages passaient sans son de cloches,
Le calice de la mort généreuse donnait en retour
Un chapitre dispersé, le hiéroglyphe livide,
Présage enroulé dans des corridors de coquilles.
Puis, dans le circuit calme d’un vaste rouleau,
Ses lacérations sous le charme et sa méchanceté apaisée,
Il y avait des yeux givrés qui élevaient des autels;
Et de silencieuses réponses coulaient entre les étoiles.
Compas, quadrant, sextant n’inventent
Pas de marées plus lointaines... Haut dans l’azur escarpé,
Le chant monodique n’éveillera pas le marin.
Cette ombre fabuleuse que la mer garde seule.
Bâtiments blancs (White buildings)
traduction Chantal Bizzini.
Sombre destin de Hart Crane