Remarquée par l'excellent
Mauvais Genre, le travail de
Chloé Cruchaudet se poursuit cette année avec la sortie de
la croisade des innocents.
Tout comme
Mauvais Genre, l'autrice s'inspire également d'un fait réel pour tisser cette histoire à la différence ici que ce fait réel demeure malgré tout très romancé. En effet, la scénariste et dessinatrice s'inspire d'une histoire brumeuse qu'elle aurait découverte par hasard au gré de ses lectures et qui aurait eu lieu durant le Moyen Age. Cette histoire relate le quotidien d' un groupe d'enfants qui seraient partis en croisade et auraient fini par devenir des pilleurs.
A la différence d'un
Mauvais Genre qui s'inspire d'un fait réel toujours assortie de photographies,
La Croisade des Innocents est une histoire qui puise son inspiration dans les tréfonds opaques et obscures du Moyen Age . le peu de documentation au sujet de cette croisade laisse davantage de place à l'imagination et l'improvisation de l'auteure pour tisser ce récit.
Au final, je ressors de cette lecture un peu mitigé, je n'ai pas été totalement convaincu par ce récit même si nous y retrouvons les mêmes qualités de finesse au niveau du dessin et de l'écriture propre à la bibliographie de l'auteure. Nous y distinguons cette même volonté à la fois intellectuelle et sensible de s'approprier une histoire pour mieux la raconter à travers la BD.
Ces qualités sont au rendez-vous mais, malheureusement, cette histoire se finit de manière un peu abrupte, s'accélère et brise la lente intensité de cette croisade qui aurait méritée davantage d'étoffe, davantage de matière.
Pour autant, il est difficile de ne pas rester insensible devant cette histoire agonisante racontant le quotidien des innocents dans une existence des plus précaires. Ces enfants vivent sous la coupe d'un monde véritablement menaçant. Pourtant, ils trouvent refuge derrière cette croisade. Durant cette quête, l'autrice parvint à distiller un peu de poésie et d'espoir à travers l'image d'un ciel étoilé dont la lueur bleutée et reposante contraste avec la froideur graphique qui hante ce nouveau titre.
Plus sombre, plus renfermé , plus contrasté ,
La Croisade des Innocents est un titre dessiné dans le glas et le funèbre. Cela m'a un peu dérangé car là ou
Mauvais Genre fait parfois ressentir un petit élan de liberté, cette Croisade nous enferme davantage dans une ambiance pesante. Un parti pris un peu trop manichéen de l'enfant contre le monde, contre les adultes comme si l'autrice préférait voir le M.A avant tout comme une prison obscure condamnant la jeunesse.
C'est un point de vue un peu figé mais totalement assumé.
Toujours est t-il que la nouvelle BD de Mme Cruchaudet est toujours aussi animée par un véritable amour pour ses personnages. Les enfants sont attachants et leur évolution est aussi bouleversante qu'effrayante. Pour autant, l'image d'une famille finit par ressortir des décombres de cette tragique histoire.
Plus dur, plus renfermé et moins libre que
Mauvais Genre,
La Croisade des Innocents demeure un titre réussi dans la bibliographie de l'auteure. Les qualités graphiques, bien que plus homogènes, sont toujours présentes avec cette même finesse du trait et ce remarquable contraste. L'argot des personnages est bien pensé avec une petite mention spéciale pour quelques intermèdes poétiques issus de certaines oeuvres moyen-nageuses Cependant, nous pouvons regretter un rythme en dents de scie ainsi qu'un petit manque de matière au niveau de l'intrigue générale. Ce n'est pas le titre le plus abouti de l'auteure mais cela demeure un titre original porté par une histoire, parfois bancale, mais, somme toute, assez intense.