Par les mots : contre eux on ne pouvait pleurer, on ne pouvait répondre et moi, quand tu intervenais, je ne parvenais pas à en prononcer un seul, entre l’apnée et le bégaiement . On apprend bien tard à se défendre des mots
Ils sont maladroits les mots de l’absence
[À propos des objets]
La mort n'est pas identique pour toutes les choses : ce n'est qu'après avoir traversé la mort que certains objets commencent à vieillir. (...)
C'est dans la mort seule que la vie est tout entière à qui l'a vécue, et sa possession est sans donateurs, sans reproches. (p. 53)
Entre mère et fils le progrès n'existe pas, la civilisation n'évolue pas : les mots seront toujours réduits et ne seront que des mots, rares, préservés. Ils ne remplacent rien, ni les coups, ni les caresses. (p. 50)
À ce moment là, j'ai dû comprendre pour la première fois que le mal est irrémédiable et qu'il est impossible de réparer un tort quoi que l'on fasse ensuite. Le seul remède est de ne pas en commettre et ne pas en commettre est en ce monde l’œuvre la plus ardue et secrète. (p. 35)
Tu paraissais moins jeune que les femmes de ton âge, mais tu repris l'avantage sur le tard. J'ai vu des femmes tomber dans l'âge suivant comme on rate une marche, par mauvais calcul, pour avoir voulu retenir trop longtemps le précédent. (p. 21)
Une grande partie du destin de chacun dépend d’une question, d’une demande faite un jour par quelqu’un, personne chère ou inconnu : on réalise soudain qu’on attend depuis longtemps cette interrogation, peut-être banale, mais qui sonne comme une annonce et on sait qu’on tentera d’y répondre par toute sa vie
Je suis ton fils, l’étranger dont le profil s’est stylisé entre la vitre d’une maternité, qui sépare le nouveau-né de sa mère, et celle d’un autobus
Ville, dimanches : d’aussi loin que je me souvienne, je n’ai su en faire partie
Alors je l'ignorais, l'adolescence est une des stations de la patience, attendant de consister en de futurs accomplissements. Ces années étaient étriquées, le monde immense.