AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,02

sur 388 notes
[...] Cet ouvrage de fantasy historique s'abreuve dans les eaux du port de la République de Marseille de la fin du XVIème siècle (métaphore à ne pas reproduire chez vous si vous tenez à votre santé), parenthèse d'indépendance méconnue et rapidement contrariée par un dessein monarchiste écrasant.

S'il n'en altère ni le dénouement ni les grands acteurs, l'auteur ajoute à l'Histoire (notez la majuscule) un élément fantastique : l'Artbon, magie qui corrompt son utilisateur et détruit ses ennemis autant qu'elle guérit les nécessiteux et soulage les maux.

Dans une interview très complète qui clôt l'ouvrage, Jean-Laurent del Socorro précise qu'étant comédien de formation, il a souhaité imprimer à son roman la forme d'une tragédie.

Cela s'apprécie dès que l'on cherche à résumer le roman : dans un Marseille clos car assiégé, des personnages en fin de vie (physiquement ou moralement) croisent, décroisent et luttent contre les fils de leurs destins respectifs.

Ainsi, Axelle et Gilles les mercenaires, Victoire et Silas les assassins, Armand et Roland les artbonniers et Gabriel le chevalier sont-ils aux prises avec leurs décisions passées et celles à venir alors que l'Histoire s'impose à eux.

La forme tragique ne fait donc aucun doute : on retrouve cette omniprésence du destin chez les personnages propre au genre, ce nombre limité de personnages interagissant dans le même temps, cette construction qui place le début du récit et sa fin à seulement quelques heures d'intervalles, et, bien sûr (vrai-faux spoiler) sa fin partiellement malheureuse.

Toutefois, en représentant de notre siècle, l'auteur s'affranchit de la dimension cathartique, c'est-à-dire purificatrice, de la tragédie. Il rend l'ensemble plus humain, et bien moins empreint de manichéisme et d'absolu moral. Les personnages ne sont pas nobles, ne semblent pas naturellement soumis à un haut destin et réagissent autant par devoir que par bas instincts. Ni personnages mythologiques ni plébéiens rabaissés, ils sont nous dans notre pleine humanité.



En dépassant l'exagération des passions, l'auteur créé de fait une alternative positive à la catharsis, fondée non sur la crainte de l'éventuelle fureur divine (homme de notre siècle disais-je) mais sur la poursuite d'un intérêt commun et la prise de conscience de l'importance de nos choix.

[...] Outre la construction particulièrement intelligente, deux éléments principaux font de Royaume de vent et de colères une oeuvre réussie.

Le premier, est sans aucun doute le traitement des personnages au fil des pages de ce roman choral.

[...] L'auteur choisit d'ailleurs une chronologie éclatée qui permet un attachement aux personnages bien plus intense que dans un récit strictement linéaire. Concrètement, cela signifie que le premier et le dernier quart du roman, représentant les heures fatidiques (littéralement, j'y reviendrai) précédant la chute de Marseille, encadrent une série de flash-back dont les dates et les événements s'entremêlent jusqu'à atteindre ce point culminant.

Les personnages nous sont donc présentés en relatif danger, ne serait-ce qu'à l'échelle de l'Histoire et alors qu'on prend à peine la mesure de ce danger, ils nous sont soudain donnés à voir sous un angle sensible, nous conduisant à nous attacher. Cela nous place dans l'inconfort, pour les plus optimistes d'entre nous, voire dans un début de tristesse, pour ceux qui perçoivent l'immuabilité du destin des différentes figures qui traversent le roman.

Par ailleurs, l'auteur fournit un formidable travail de déconstruction des clichés inhérents à la fantasy. Pas de personnages archétypaux donc, mais des caractères cohérents, qui s'expliquent et se construisent petit à petit. le roman n'étant pas nécessairement très long, la prouesse est d'autant plus admirable.

[...] Bref, Jean-Laurent del Socorro se moque de l'imaginaire collectif et se contente de créer les personnages qui lui plaisent, sans complaisance, sans jugement et sans artifices pour finalement former un casting brillant. A aucun moment ses choix n'apparaissent forcés ou même mus par une quelconque volonté, ce qui contribue sans nul doute à la richesse du récit en y apportant de la spontanéité et de la diversité.

Le second élément qui fait de ce premier roman un véritable succès est son travail formidable sur la notion de destin.

En animant ses personnages au creux de l'Histoire, l'écrivain les lie, et nous avec, au Destin, celui qui n'a ni répit ni pitié mais n'est ni hâtif ni malicieux. Celui, en somme, qui s'est déjà réalisé.

[...] C'est cette constance qui fait de ce roman une tragédie, parce que les lecteurs, et, au fond, les personnages également, savent ce qui va arriver. le roman ne raconte pas une aventure merveilleuse, car elle n'a pas eu et n'aura pas lieu et tout le monde le sait. le roman se borne à livrer les bribes de vie hallucinées de personnages que Dieu a abandonné à leurs destins.

[...] L'auteur interroge ainsi, à travers la notion même de destin, les questions de Dieu et de la mortalité, de l'amour et du rejet, de la vieillesse et des regrets. Sans pathos, il conduit ses personnages sur des routes sinueuses qui ne sont pas sans rappeler celles que nous arpentons chaque jour, dans une magnifique mise en abyme qui semble nous dire « Nos destins ne sont que l'Histoire des suivants ». [...]

So what ?

Je ne sais pas s'il est nécessaire de le préciser, mais j'ai aimé ce roman.

[...]Brillant. Juste brillant. Et érudit, et sensible, et tellement de choses à la fois qui font qu'on ne ressort pas indemne de cette lecture.
Lien : http://whataboutadragon.com/..
Commenter  J’apprécie          00
Livre qui m'a un peu déçu. Mais je pense que j'en attendais sans doute de trop.
Il est intéressant d'un point de vue historique. Je ne savais pas du tout que Marseille avait été un moment une république autonome et qu'elle avait été l'enjeu d'une bataille entre protestants et catholiques, Français et Espagnols.
L'histoire est prenante, vive, et bien construite. Mais je l'ai trouvé un peu courte. Trop simple.
Quand j'ai refermé le livre, j'avais un petit goût de trop peu. le livre aurait mérité d'être plus développé.
Et après toutes les critiques positives et le prix qu'il a reçu, je m'attendais à quelque chose de beaucoup plus fort.
Domage...
C'est pourtant un auteur à suivre, car la qualité de ce premier livre presage du très bon pour l'avenir.
Commenter  J’apprécie          00
Tout à fait le genre d'histoire qui peut me plaire, un fait historique agrémenté d'un soupçon de magie ou de fantastique ! Je me lance donc dans la lecture, et après avoir lu beaucoup de chroniques élogieuses, je pars sereinement dans cette lecture en espérant passer un bon moment.


Pour tout vous dire le début me plait bien ! L'aventure s'installe dans une auberge en 1596, en plein coeur de la cité phocéenne, le contexte historique est planté, et on trouve l'armée d'Henri IV, aux portes de la ville de Marseille qui lui résiste. A sa tête, le ligueur Charles de Casaulx, consul de la cité qui n'a pas vraiment confiance dans la récente conversion du roi huguenot ! On effleure un pan de l'histoire de France qui n'est pas très connue, et à ce titre, c'est très intéressant ! L'auteur a fourni un travail de recherche et cela se sent dans l'enchaînement des faits.

Dans cette auberge, on va donc découvrir peu à peu tous les protagonistes liés à l'intrigue. Victoire, Axelle, Armand et son compagnon Roland, Gabriel, Gabin … des personnages assez charismatiques, qu'on apprend à connaître au fil des pages, les personnages féminins m'ont plu, elles sont mises à l'honneur, elles ont un passé fort et sont dotées d'une belle psychologie complexe et moderne à la fois.

La mise en bouche est donc plutôt bien tournée, on est ferré dans un premier temps, par des chapitres courts qui donnent la parole à chaque intervenant de façon personnelle. Cette première partie installe les personnages et nous dévoile sommairement le noeud de l'intrique.

…Ce qui m'a vraiment chagriné dans ce livre, c'est la suite car nous retrouvons dans une deuxième partie, les points de vue de chaque personnage mais à des dates et des lieux différents, comme pour rappeler leur passé et nous les faire arriver au jour J, c'est à dire au début du livre. Les personnages sont alternés à chaque chapitre, mais peut-on parler de chapitres lorsque cela concerne 2 ou 3 pages, ces cassures répétitives et cette chronologie déconcertante m'ont freinées et ne m'ont pas permis de m'attacher aux personnages et de prendre part à leur évolution, des flash-back intempestifs, dans lesquels je n'ai pas vu d'intérêt, sinon de m'éloigner d'une intrigue bien orchestrée au début… Voulant connaître le dénouement, j'ai donc avancé à tâtons sur la troisième partie, elle est mieux maitrisée pour moi, et m'a recentrée sur l'objet de toutes les attentions, mais l'auteur m'avait perdue trop longuement dans sa deuxième partie, et j'ai eu du mal à finir…

L'aspect historique est très largement abordé et pourtant j'aurai aimé un peu plus de développement sur certains aspects de l'intrigue, mais finalement c'est un très court roman où l'auteur a été à l'essentiel en nous présentant quelques tranches de vies reliées à un événement historique. La petite touche fantasy, elle, est très légère, voir discrète… au point que je me demande vraiment si l'on peut parler de fantasy ? Il y aurait eu sûrement à développer aussi de ce côté là !

Mr del Sosorro aura pris soin de donner en fin de roman quelques explications à sa façon de procéder, il parle d'une approche très théâtrale pour ce récit, mais, malgré ma sensibilité à cet art, j'ai plutôt ressenti un aspect cinématographique à l'enchaînement des scènes. Moins touchée que d'autres, par les grâces et l'originalité de l'intrigue, j'ai trouvé son écriture très soignée et précise donnant beaucoup de vivacité au récit avec de bons dialogues.
Sachant que c'est le premier roman de cet auteur, au demeurant très sympathique, puisque j'ai eu l'occasion de le rencontrer aux Utopiales, je guetterai la sortie de son prochain ouvrage car il y a, j'en suis certaine, de belles choses à venir chez cet auteur, dont la tête à l'air pleine de fabuleux projets... A suivre.
Lien : http://fanfanlatulipe85.blog..
Commenter  J’apprécie          00
Un presque coup de coeur ! Je dis presque pour nuancer mais j'ai vraiment adoré ce roman. D'habitude, j'ai besoin d'un peu de longueur pour réussir à entrer dans une narration puis pour entrer en empathie avec les personnages. Cette fois, tout s'est fait très vite pour moi et la brièveté de ce livre ne m'a en rien gênée. Au contraire même, je l'ai trouvé parfaite dans le style. La tension dramatique m'a semblé très bien menée avec un côté théâtral très réussi à mon goût (et soutenu justement par le rythme : des chapitres et une oeuvre courts ainsi que par la narration à la première personne et les bonds d'un personnages à un autre).
Bref, je ne peux que recommander ce roman à tous les amateurs de fantasy, de fantasy historique, d'histoire... et de théâtre aussi ! Et puis non alors, je le conseille à tous "point" !
Commenter  J’apprécie          00





Lecteurs (837) Voir plus



Quiz Voir plus

La fantasy pour les nuls

Tolkien, le seigneur des ....

anneaux
agneaux
mouches

9 questions
2493 lecteurs ont répondu
Thèmes : fantasy , sfff , heroic fantasyCréer un quiz sur ce livre

{* *}