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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
C'était un magnifique mois de juin.

Qu'eut lieu le drame qui dissémina la famille de l'aume.
Un père monstrueux ne supportant pas le divorce réclamé par son épouse, un meurtre, un suicide, une scène traumatique pour une petite fille de neuf ans.

La folie d'un couple incompatible pour mettre au monde un enfant, une fille d'autant plus, et la faire grandir dans tout ce qu'il y a de plus normal.

C'était un magnifique mois de juin.

Chloé dite l'enfant fait honte, dérange, est toujours de trop ou pas assez. le coeur du père est de pierre, imperméable à l'amour et la bienveillance. Il est même plutôt monstrueux et fou a lier.

Le cri du sablier est tout en symbolique et en continuité avec Éden matin midi et soir. L'auteure expie un univers ténébreux, tristement et inexorablement noir.

Ce livre a été laborieux et pourtant il m'a hypnotisée. le débit de mots savants limés au scalpel d'une douleur insoutenable, une centaine de pages d'une expérience littéraire hors du commun. Les mots balancent dans tous les sens, les phrases amputées de leurs déterminants, ponctuations, majuscules, c'est asphyxiant et pourtant quel exercice impressionnant, quelle prouesse de style !

Tout n'a pas été simple à suivre, à cerner, à digérer ici. Des passages entiers sont restés un mystère pour moi.

« Le temps est élastique la vérité cenelle a la baie étendue qu'importe l'anachronisme qui grimpe en lobélie du moment que les glaires couronnent le mémorial du moment que florale reste l'expectoration. »

D'autres passages sont plus éloquents avec une finesse époustouflante. Comme si Cioran et Jim Morrison se contorsionnaient dans une larve désespérément noire.

« Condensation voltige Papa Tango Charly le triangle avorté les Bermudes à la buée tu ne répondras pas, plus personne ne te cherche. Non, papa. Plus personne. Tu es mort. Entends-tu. »

Chloé barbote dans la boue noire, elle crie, elle scalpe, elle accouche, elle avorte, elle fait saigner, elle balance les verbes sans se soucier du reste, c'est une suite de phrases décousues, extirpées de ses viscères enflammées.

« Ma vie s'engluait dans la déconfiture : quand pourrait-on m'aimer, moi l'Antigéniture. »

Et au lasso de sa rage, elle crache sur ce père.

« Mon père, mon haut-le-coeur, mon sale chaos, mon plomb salin, ma soude caustique, mon savant rance, ma plaie mesquine, ma belle charogne. »

Maintenant il est temps de régner pour Chloé. Bientôt, le mois de juin sera magnifique.
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Chloé Delaume raconte son histoire: son père a tué sa mère quand elle avait 9 ans avant de se suicider, elle a ensuite été élevée par une tante et un oncle raciste, bêtes et méchants qui sans la maltraiter avait peu de considération pour elle. On ne s'apitoie jamais chez Chloé Delaume : c'est sec, c'est rude, sans fioriture ni lysrisme déplacé quand il s'agit de dire le crime sordide, la bêtise crasse et la tentation du suicide. Si l'auto-fiction a produit un seul écrivain de qualité ces dernières années, c'est bien Chloé Delaume.
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Cela ressemble à de la poésie. Pas de virgules, des nom utilisés comme des adjectifs, des adjectifs comme des noms, des néologismes, des verbes formés sur des noms, des articles qui disparaissent. Des phrases qui se scandent, car composées de 6 syllabes pour la plupart. Cette indication permet parfois de les comprendre, qui resteraient absconses sinon. La recherche d'une parole disparue, d'un discours enfermé en soi par ces phrases étranges qui riment entre elles ou à l'intérieur d'elles-mêmes est originale et surprenante. Mais à mon sens une monotonie s'installe à ce rythme toujours repris que l'on se prête à suivre plus qu'à la lecture d'alexandrins - car, malgré tout, toutes les phrases ne sont pas identiquement rythmées. Dans les alexandrins on sait à quoi s'attendre, les règles poétiques et la typographie donnent à anticiper le rythme. Ici on découvre le rythme de la phrase, mais on ne peut la comprendre que si l'on replace la ponctuation au bon endroit et si l'on déniche les syllabes, les e muets qui sautent - car les hexamètres ne valent que s'ils sont dits, non selon la règle classique. de ce fait, la recherche d'hexamètres s'impose comme une méthode spontanée à chaque début de phrase. Elle ne marche pas si mal, mais pas toujours. le plus simple est encore de lire les phrases tout haut, c'est là que le sens paraît avec le moins de difficultés.
Il m'a été difficile de trouver une liberté dans ce texte, car ce systématisme du rythme force à rester très près des mots. Soit je lisais les phrases à la vitesse normale, et alors le rythme hexamètres s'imposait et m'empêchait de comprendre le sens global, haché malaisément par des hexamètres irréguliers ou, par surprise, des octosyllables, heptasyllabes, etc ; soit je ralentissais la lecture pour saisir chaque sens et alors c'est le sens global du paragraphe, les liens avec les autres phrases, la logique de l'articulation de l'idée qui m'échappait. de plus, le long monologue intérieur que représente le roman m'a semblé répétitif, revenant souvent en arrière, et centré uniquement sur le traumatisme, la difficulté d'expression, sans ouverture aux évènements, à une chronologie. de là aussi sans doute l'impression d'un poème par cet aspect figé, descriptif plus que romanesque.
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A l'origine il y a le drame, l'assassinat de la mère par le père, qui se suicide aussitôt. L'événement laisse Chloé Delaume, alors enfant, aphone, aphasique. Plusieurs décennies plus tard, l'écriture devient le moyen de laver la souillure, de tuer enfin figurativement l'image du père.
Longue profération, le Cri du sablier bouscule les mots, les transforme en matière mouvante, magmatique, à même de faire sentir les répercussions sans fin de l'onde de choc provoquée par le crime paternel. D'une profonde singularité, l'oeuvre de Chloé Delaume transforme le matériau personnel en geste mythologique, ce qui en fait un des projets autobiographiques les plus fascinants de notre époque.
Lien : https://balises.bpi.fr/litte..
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Je compte travailler sur ce roman pour mon mémoire de master, vous en pensez quoi ? merci :)
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