Nous avons, en France, la manie des formules, des étiquettes et des casiers. Pour beaucoup de personnes, amies des nigaudes symétries, un poète est un artiste qui ne sait rien, un historien est un savant qui écrit mal. Il est vrai que certains rimeurs se vantent publiquement d'être des cancres. Et plusieurs érudits, fiers de leurs barbarismes, font profession de n'avoir point de talent.
On cite des écrivains qui ont excité l'admiration de leurs contemporains ou mérité les suffrages de l'Académie par de simples traductions. Le premier ouvrage de Montaigne fut une version en français du latin barbare d'un théologien. Malherbe, avant de consoler du Périer, s'était exercé à reproduire en notre langue les gentillesses d'un Italien.