En mai 2023, l'écrivain et critique littéraire Antoine Compagnon est reçu à l'Académie française. Spécialiste de l'oeuvre proustienne, il a édité plusieurs tomes d'À la recherche du temps perdu chez Gallimard. Son épée d'académicien, qui lui a été remise lors d'une cérémonie à la Bibliothèque nationale de France, est le fruit de sa rencontre avec la maison de joaillerie Boucheron. Dans cet entretien, il revient sur ce moment singulier et sur les éléments symboliques qui ont guidé cette démarche artistique commune.
Pour en savoir plus, rdv sur le site Les Essentiels de la BnF : https://c.bnf.fr/TRC
Crédits de la vidéo :
Antoine Compagnon
Écrivain, critique littéraire, professeur émérite et membre de l'Académie française
Direction éditoriale
Armelle Pasco, cheffe du service des Éditions multimédias, BnF
Coordination scientifique
Charline Coupeau, docteure en histoire de l'art et chercheuse à l'École des Arts Joailliers
Coordination éditoriale
Constance Esposito-Ferrandi, chargée d'édition multimédia, BnF
Lieu de tournage
Institut de France
© Bibliothèque nationale de France
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C’est la grande expérience du deuil, qui est celle de ne jamais sentir autant la présence de quelqu’un qui a l’instant où l’on comprend qu’il a disparu pour toujours.
Elle (Colette) appartient à l'immense génération des classiques modernes de la littérature française : Claudel, Gide, Proust, Valéry, Péguy et Colette sont nés tous les six en cinq ans, entre 1868 et 1873, et ils accapareront la première moitié du XXème siècle. Mais Colette, la seule femme dans ce bouquet, fut à la fois la plus insolente et la plus populaire.
La Recherche fait le procès de l'intelligence, lui oppose l'intuition. Avec la madeleine, le héros a l'intuition d'une autre réalité, puisque la sensation lui apporte l'extase. Nous aurons l'explication des milliers de pages plus loin, mais nous savons déjà que le bonheur de la réminiscence passe par le corps.
Il compare la lecture, toute instruction, à la digestion. Les leçons , comme les aliments, ne doivent pas être goûtées du bout des lèvres seulement , et gobées toutes crues, mais mâchées lentement, ruminées dans l'estomac afin de nourrir de leur substance l'esprit et le corps.
P. 95
NDL : sur Babelio nous nous posons souvent ce genre de questions à propos de nos lecture, trop tôt, trop vite, pas compris ? Ou tout simplement mauvaise digestion.
Quand les Gots ravagèrent la Grèce, ce qui sauva toutes les librairies d'être passées au feu, ce fut un d'entre eux, qui sema cette opinion, qu'il fallait laisser ce meuble entier aux ennemis : propre à les détourner de l'exercice militaire, et amuser à des occupations sédentaires et oisives.
P. 74
Nous lisons parce que, même si lire n’est pas indispensable pour vivre, la vie est plus aisée, plus claire, plus ample pour ceux qui lisent que pour ceux qui ne lisent pas.
Comme Cicéron, Montaigne pense que l'homme n'est pas vraiment lui-même dans la vie publique, le monde et le métier, mais dans la solitude, la méditation et la lecture. Plaçant la vie contemplative au-dessus de la vie active, il n'est pas encore un de ces modernes qui jugeront que l'homme se réalise dans ses activités, dans le 'negotium', le négoce, soit la négation de 'l'otium', du loisir. Cette éthique moderne du travail a été liée à la montée du protestantisme, et 'l'otium', l'oisiveté, a perdu sa valeur suprême pour devenir un synonyme de la paresse.
(p. 46)
La fréquentation de l'autre permet d'aller à la rencontre de soi, et la connaissance de soi permet de revenir à l'autre.
Au nom de la nature, Montaigne efface la frontière de la maladie et de la santé. Les maladies font partie de la nature; elles ont leur durée, leur cycle de vie, auquel il est plus sage de se soumettre que de prétendre le contrarier.
Le refus de la médecine fait partie de la soumission à la nature. Montaigne modifie donc le moins possible ses habitudes quand il est malade.
Vient alors la flèche du Parthe : les médecins ne vivent pas mieux ni plus longtemps que nous ; ils souffrent les mêmes maux et n'en guérissent pas davantage. (p. 124 )
"La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l'écoute" (III, 13, 1694) (p.82)