AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,28

sur 76 notes
5
6 avis
4
1 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La photo de la première de couv', aux éditions le temps qu'il fait, montre la "gueule" de Luc Dietrich. Et c'est déjà lui, tel qu'il se peint dans le Bonheur des tristes quand,   après une remarque féminine sur sa laideur, le jeune Dietrich se regarde au miroir:

"C'était moi, mais quel drôle de moi! Mon visage était comme une racine avec ses barbes follettes! Mon regard fendait cette noirceur, comme un coutre la terre. Ma bouche y vivait comme une balafre fraîche.  Et par-dessus le tout, poussait un pin qui débordait sur les oreilles et le cou.Je ne savais si c'était ridicule, désolant ou beau, mais je ne ressemblais pas aux autres: j'étais plus grand et plus visible."

Tout le livre a cette même honnêteté, cette désarmante  lucidité, cette déchirante modestie et cette bouleversante poésie de la formule, qui balaie d'un coup de faux les poncifs, les clichés,  les convenances.

Le bonheur des tristes est le récit d'une enfance chérie et cruelle, celui des 22 premières années d'un garçon amoureux de sa mère -  une femme tendre, fragile, droguée au laudanum et qui en meurt- un fils qui la couve, la protège, et, dans un amour toujours inquiet, grandit  auprès d'elle, dans la mesure où les cures de désintoxication de celle-ci  ne l'éloignent pas de lui, envoyant alors le petit Luc chez un vieil oncle pervers,  dans un asile pour débiles, ou dans une ferme qui a tout d'un bagne pour enfants.

Il y a du Poil de Carotte dans ce récit-là , pour la cruauté des hommes, la force résiliente de l'enfant, la consolante beauté de la nature, mais pas pour  le cynisme , ni l'afféterie dans la formulation qui est la marque de Jules Renard qui parfois semble parler par aphorismes.

Luc Dietrich, lui,  est un sauvage, il parle sauvagement, avec ses tripes, avec son oeil de voyant, sa bouche de "balafre fraîche" , sa fraternelle compassion pour les misérables, bêtes et gens, sa farouche crainte des manipulateurs et des tortionnaires de tout poil, et c'est si beau, si vrai, si puissant qu'il nous met souvent le coeur en charpie... ou tout au bord des lèvres. 

Il y a du Rimbaud dans ce bohème, cet effaré, ce vagabond aux semelles de vent, ce poète aux poches crevées,   tendre et brutal .

J'ai ouvert le Bonheur des tristes un matin,  charmée par son titre ,  et n'ai pu le refermer qu' après en avoir savouré  la dernière page, dans la même journée!

Encore un de ces 53 Désemparés de Patrice Delbourg,  est-il besoin de le dire?

Après Hyvernaud, Guérin, Larronde, Augieras , un nouvel univers, un monde,  un style, un homme à découvrir.

Peut-etre le plus touchant, le plus proche, le plus attachant de tous, jusqu'ici.

Lanza del Vasto ne s'y est pas trompé,  qui a su tendre la main, guider, aider Dietrich à devenir ce qu'il était déjà sans le savoir: un immense écrivain.
Commenter  J’apprécie          538
Le ton est donné : " le Bonheur des tristes " (quel bel oxymore) et " l'Apprentissage de la ville " (ou plutôt "de la vie").

Ces deux livres ne doivent pas être dissociés : le deuxième (narrant l'auteur, une fois adulte, en quête de savoir, et surtout, à la recherche de lui-même pour éveiller sa propre conscience) est bel et bien le suite logique du premier ( le Bonheur des tristes ou les confessions d'une enfance triste et candide).

La teneur de ces deux autobiographies est que, la souffrance est bonne lorsqu'elle est maîtrisée, lorsqu'elle est affranchie car cela nous rend plus lucide de nos maux ! A contrario, une souffrance avec pathos nous enchaîne toujours, pitoyablement, dans nos sombres dédales...

Les textes sont légers mais denses; les mots sont sombres mais poétiques, à la fois !

Auteur méconnu (malheureusement) qui nous laisse découvrir, à travers ces deux magnifiques bijoux, la vie dans son expression la plus simple.

Je vous conseille vivement de lire L.Dietrich
Commenter  J’apprécie          170
Le bonheur des tristes de Luc Dietrich narre avec innocence la vie d'un jeune garçon, fou d'amour pour sa mère.
Ce récit intimiste est une voix douce agréable de l'enfance, chantonnant une mélodie lente d’une vie de nature, une source claire d'émotion, la joie, l'amour, l'exaltation, la tristesse, la bêtise humaine animent la vie de notre jeune héros.
Le bonheur des tristes, ce titre, un joli oxymore, caresse la joie de la vie simple de ce jeune garçon, amoureux de la vie rurale, des fleurs, de la terre source de vie, de la végétation, des animaux, sous la tempête de cette jeunesse explose la rudesse de la vie, des autres, des êtres humains, de sa mère droguée....
Voyageant du Jura, à Paris, en Auvergne et d’autres contrés de France, cet enfant en équilibre avec les rapports humains, glisse dans le désordre de la vie s'offrant à lui, puni par sa famille ingrate de son innocence rurale, il devra combattre la méchanceté d'un asile de fous. Il sera l'ignorance érudite de ce foyer carcérale d'enfants aux maux psychologiques anormaux.
Cette quête de l'absolu, de la vie, de l'amour qu'il trouvera dans les plantes et les fleurs qu'il nourrira, il cultivera cette force incroyable de la terre, puis sa soif de pureté d'âme, d'amour pour sa mère. Vivre dans la pauvreté, subir la crasse dans une campagne hostile, cet enfant suivra la route de son destin avec ses privations, comme une vie d'ascèse, une vraie vie, la vie de l'auteur, celle de Luc Dietrich, un récit fort, puissant.
La pudeur des mots, la douceur tendre de ce roman, ce chemin d'apprentissage à la saveur religieuse, aux élans mystiques, à la sauvagerie humaine forte, cette barbarie sourde, coulent dans les veines de cet enfant esclave de la maladie de sa maman, droguée, alcoolique, vagabonde de ses paradis artificiels, fiévreuse de ce travail d'infirmière, laissant à l'abondant cet enfant sauvage, garçon de la terre, adolescent des mots, amoureux de la poésie.
C'est comme un conte pour enfant, l'imagination des montres, des princesses, des légendes que raffolent les enfants, puis le récit vacille des émotions de notre personnage, celle de la vie qui l'entoure, la mort, le sexe, la folie humaine puis la privation de liberté....
Ce testament de vie est comme un conte philosophique mais c'est la vraie vie de notre auteur, un roman autobiographique d’une pureté émotive explosive.
Il y a une suite à ce roman, L’apprentissage de la ville, une continuité à la magie de cet opus utérin, ce cristal fragile de l’enfance se fissurant vers la maturité de l’adulte, j’ai hâte de me perdre dans cette continuité de Luc Dietrich.

Commenter  J’apprécie          133
On est carrément dans le chef-d'oeuvre ici ou pas loin. Qui dicte que Céline, Sallinger, Proust, Saint-Exupery sont les auteurs qui comptent? C'est oublier des auteurs comme Luc Dietrich. Était-ce parce qu'il était catholique qu'on l'a laissé de côté? Probablement. Un livre incroyable, différent.
Commenter  J’apprécie          60
Quelle magnifique découverte! Une prose incroyable, à la fois dense et lumineuse, d'une sensibilité extrême. La sincérité brutale qui émane du texte vous emporte sur les traces de cet enfant fasciné par sa mère, mais aussi par cet univers grouillant de vie qu'il découvre autour de lui. Luc Dietrich est mort jeune dans un bombardement. Ses textes méritent vraiment d'être découverts. Des perles rares.
Commenter  J’apprécie          30
Quelle belle découverte, je vais m'empresser de lire "l'apprentissage de la ville"
Commenter  J’apprécie          20


Lecteurs (202) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1720 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}